Vous êtes nombreux à m’écrire chaque semaine, et je vous en remercie infiniment. Vos messages m’émeuvent, m’attendrissent, me font rire ou me bousculent, et me rappellent pourquoi j’ai eu envie de créer cette newsletter. Parfois, ils me marquent durablement. C’était le cas, il y a quelques semaines, du message de Pauline, que j’avais d’ailleurs publié ici. Mère de deux enfants de 1 et 3 ans, Pauline m’écrivait, sous le titre « Fatiguée mais heureuse mais fatiguée », un texte dont je remets ci-dessous un extrait :
« Je vis avec mon conjoint que j’aime à Paris, loin de nos familles. On a deux boulots de plus si jeunes cadres mais toujours dynamiques dans des entreprises certes compréhensives avec les parents… Mais, en même temps, le job doit être fait, après tout, on est payés pour ça. On gagne bien notre vie, mais les frais de crèche et l’emprunt mangent près de la moitié de nos revenus. Il manque plus que le chien pour compléter le tableau.
Mais pourtant je suis en apnée : fatiguée à peine réveillée parce que mon fils ne me laisse pas dormir et qu’il ne réclame que mes bras, et déjà en retard pour déposer tout le monde à la crèche et à l’école. Mon mari est toujours là pour m’aider, j’ai de la chance. Mais il m’aide, il ne fait pas ;)
J’enchaîne sur onze réunions en moyenne au travail, fais du sport le midi parce que j’en ai besoin comme soupape et puis aussi pour rentrer dans mes jeans. Le soir, on enchaîne avec mon mari sur une deuxième journée en essayant de dissocier la maman de la travailleuse, sans trop de succès. Le week-end, on sort pas mal pour se vider la tête ; ça nous fait autant de bien que ça nous fatigue. Bref, vous savez.
Là où je m’interroge c’est : comment font les autres ? Je dépose les enfants à 8 h 10 pour les chercher à 18 h 10, le tout en courant. Mes enfants sont les premiers et les derniers. Systématiquement !
Elever des enfants, c’est fatigant. Nos sociétés sont encore calquées sur un modèle où la mère ne travaillait pas. Et je suis aussi fatiguée que révoltée. Fatiguée et heureuse, mais fatiguée. Merci de m’avoir lue, et désolée pour la banalité de mon propos. »
Je n’ai pas du tout trouvé ce message banal. Il m’a estomaquée par sa force. Il me semble que Pauline exprime une sorte de cri du cœur fondamental des mères contemporaines : « Comment font les autres ? » Bien sûr, elle évoque là un mode de vie particulier, celui d’un couple urbain de cadres travaillant à temps plein. Mais la question qu’elle pose est tout aussi obsédante pour les mères rurales, célibataires, au foyer, ou celles qui sont, malgré elles, dans l’actualité ces jours-ci, les « mères d’émeutiers », à propos desquelles le gouvernement a posé ouvertement, ce week-end dans La Tribune Dimanche, la question d’une éventuelle « défaillance ».
Lire la suite ...