Les évêques réclament l’abandon d’une proposition de loi qui étend aux sites Internet le délit d’entrave à l’IVG.
C’est une prise de position importante que la gauche n’attendait sans doute pas, à la veille du débat parlementaire relatif à l’extension aux sites Internet du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), prévu jeudi 1er décembre à l’Assemblée nationale. Dans une lettre datée du 22 novembre mais rendue publique par l’épiscopat lundi 28 novembre, le président de la Conférence des évêques de France (CEF), Mgr Georges Pontier, demande à François Hollande de ne pas laisser « arriver à son terme » cette réforme. Une telle initiative épistolaire est d’autant plus marquante qu’elle est rare. L’archevêque de Marseille, reconnu pour sa pondération, affirme que la proposition de loi porte « une atteinte très grave aux principes de la démocratie ».
Le texte, présenté par l’ensemble de la majorité à l’Assemblée, relaie une initiative de la ministre des droits des femmes, Laurence Rossignol. Son objectif est de lutter contre les contenus « trompant délibérément les internautes en se faisant passer pour des sites officiels ou neutres, et cherchant à dissuader les femmes de recourir à l’IVG », selon le ministère.
Mme Rossignol a d’abord tenté de faire adopter la mesure début octobre, par un amendement au projet de loi égalité et citoyenneté, mais il a été rejeté par le Sénat. « Etre hostile à l’IVG est une opinion protégée par les libertés publiques en France, avait déclaré la ministre au Monde lors de la présentation de la mesure fin septembre. Mais créer des sites qui ont toutes les apparences officielles pour, en fait, donner des informations biaisées visant à dissuader, à culpabiliser, ou à assigner au traumatisme n’est pas acceptable. Nous ne sommes pas contre l’existence de sites de propagande anti-IVG. Nous souhaitons qu’ils cessent de se dissimuler et s’assument comme tels. »
Selon le gouvernement et sa majorité, le délit d’entrave à l’IVG, créé en 1993, s’est déplacé. Il ne s’exerce plus par une présence physique devant les hôpitaux, mais en ligne. « Internet est souvent la première source d’information en matière de santé, en particulier chez les jeunes, a affirmé Catherine Coutelle, rapporteure du texte, lors de sa présentation devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée, mercredi 23 novembre. Certains sites effectuent une désinformation volontaire et exercent une pression morale sur les femmes enceintes. »