LE MONDE DES LIVRES | | Par Gilles Bastin
Pierre Bourdieu. Un structuralisme héroïque, de Jean-Louis Fabiani, Seuil, « La couleur des idées », 312 p.
Beaucoup de livres ont été publiés sur Pierre Bourdieu, avant et surtout après sa mort en 2002. Certains ont écrit pour Bourdieu, comme si le séminaire du maître se prolongeait et qu’il s’agissait de l’impressionner encore une fois. D’autres l’ont été contre Bourdieu, profitant de son absence pour lancer de derniers traits dans sa direction sans risquer de les voir revenir plus acérés encore qu’ils n’étaient partis.
Le livre de Jean-Louis Fabiani, Pierre Bourdieu. Un structuralisme héroïque, n’appartient à aucune de ces deux catégories et c’est sans doute ce qui en fait la très grande valeur. C’est un livre écrit à côté de Bourdieu, si l’on accepte d’entendre par là deux choses. L’intimité éblouissante avec la pensée du sociologue et l’affection pour l’homme conférée par un long, quoique discret, compagnonnage, d’une part. La juste distance rendue possible par une culture sociologique bien plus large, d’autre part. Une culture acquise notamment aux Etats-Unis, et alimentée, comme chez Jean-Claude Chamboredon et Jean-Claude Passeron, deux autres maîtres de Fabiani, par l’observation de la façon d’écrire – et non seulement de penser – des sociologues (voir son remarquable La Sociologie comme elle s’écrit, EHESS Editions, 2015).