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lundi 11 avril 2022

LES HEURES HEUREUSES : interview avec la réalisatrice Martine Deyres

 9 AVR. 2022

Avant de découvrir le documentaire de Martine Deyres sur l'asile de Saint-Alban, lieu historique de la psychiatrie contemporaine, au cinéma dès mercredi 20 avril, quelques mots de la réalisatrice sur son projet.

La clinique de La Borde (Le Sous-bois des insensés), une piscine municipale (White Spirit), une gare TGV (Lieu commun) et maintenant cet hôpital psychiatrique de Saint-Alban : quel lien voyez-vous entre ces différents lieux que vous avez filmés?

Il s’agit à chaque fois d’interroger la norme et l’accueil de la singularité. Observer un lieu jusqu’à y déceler des signes infimes qui font dérailler, à la marge, les dispositifs prévus pour empêcher justement l’imprévisible, c’est ce que j’ai recherché en filmant la banalité apparente d’une gare nouvelle ou d’une piscine municipale. J’ai été surprise d’y découvrir la place que prenait le nettoyage et c’est ce que j’ai fini par filmer. Comme si ces lieux ne voulaient garder aucune trace de nos passages.

À l’inverse, je n’ai pas le souvenir d’une telle obsession de la propreté à la clinique de La Borde ou dans les images d’archives de Saint-Alban. Un infirmier nous confie qu’il a appris le métier en faisant le ménage avec des malades. Cette activité participait de la vie collective et on perçoit combien les différents espaces de l’hôpital étaient investis en permanence. Il y a toute une réflexion de la psychothérapie institutionnelle qui m’intéresse sur l’importance de passer d’un espace à un autre, de permettre une liberté de circulation qui ouvre alors mille possibilités insoupçonnées. Ce qui m’a saisie en filmant ces espaces publics nouvellement construits, comme une gare ou une piscine, c’est qu’on y est contraints en permanence par toutes sortes de protocoles qui répondent à des normes d’hygiène, de sécurité, de fonctionnalité... Au bout du compte, c’est comme si on était de trop. Dans une piscine on peut encore en rire mais si on applique cette logique à un hôpital psychiatrique, ces entraves successives peuvent se révéler dramatiques et rendre aveugle aux surgissements de vies les plus ténus.






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