PAR GÉRALDINE LANGLOIS
- PUBLIÉ LE 25/07/2019
« Chaque jour, des incidents plus ou moins graves sont causés par des erreurs humaines. » C'est pour amener les professionnels de santé à en prendre conscience et à trouver des solutions que des médecins, infirmiers, pilotes d'avion, sociologues et formateurs en simulation ont ouvert « Les enfants du facteur », une chaîne vidéo sur YouTube. Membres de l'association « Facteurs humains en santé », ils publient chaque semaine de nouvelles vidéos évoquant les facteurs humains à l'œuvre lorsqu'une erreur survient au cours d'une prise en charge médicale.
. « Nous avons acquis durant notre formation une somme importante de savoir, un peu de savoir-faire mais très peu de savoir être », ajoute-t-il.
En France, l'erreur, un écart involontaire entre ce qu'on fait et ce qu'on aurait dû faire, est encore souvent assimilée à une faute. Elle est aussi souvent attribuée à la personne qui l'a commise alors qu'elle peut trouver son origine dans des facteurs de nature différente : organisation, environnement de travail, facteurs humains, interactions entre personnes ou entre hommes et machines…
Quand la fatigue d'un médecin peut tuer
L'association s'emploie à faire évoluer les mentalités des soignants de tous les métiers à travers des vidéos courtes et faciles d'accès, réalisées par un journaliste audiovisuel, François Clapeau. Chaque film vise à leur faire prendre conscience d'un facteur humain. L'un de ces clips porte sur les biais cognitifs inconscients qui s'immiscent dans la perception de la réalité par les professionnels de santé et influent sur leurs décisions. D'autres abordent les moyens de gérer les interruptions de tâches, de faire face à la fatigue et au stress, ou de lutter contre la baisse de vigilance due à la répétition de certaines tâches. Le travail en équipe, la transgression, apprendre de ses erreurs : autant de sujets également traités.
Les membres de l'association partagent le fruit de leurs formations, leur expérience et même de leurs lectures. Dans sa première vidéo, le Dr Jérôme Cros, anesthésiste réanimateur, évoque ainsi « The girl who died twice », un livre choc qui « témoigne d'un système de santé malade et souffre d'un niveau de sécurité inacceptable ». Son histoire, qui aborde les erreurs médicales d'internes épuisés, a conduit la législation américaine à limiter le temps de travail des internes.
Mieux communiquer
Sa prochaine vidéo portera sur la communication entre soignants. Pendant les sept années où il a été responsable d'un laboratoire de simulation médicale, les débriefings l'ont familiarisé avec l'interrogation systématique des actes, des gestes, « du réel ». Ils révélaient des défauts de communication qui l'ont conduit à écrire un livre intitulé « Mieux communiquer entre soignants, un enjeu majeur de sécurité ». Il emprunte à cet égard des outils au monde de l'aéronautique, très en avance sur la culture de sécurité.
Sa vidéo évoquera les travaux du chirurgien américain Atul Gawande. Ce dernier explique qu'on « est passé d'un monde où les docteurs étaient autonomes, autosuffisants, à un monde plus complexe dans lequel la connaissance et la compétence ne peuvent plus résider dans une seule personne, explique le Dr Cros. De nouvelles valeurs peuvent faire que ce monde soit plus sécuritaire, comme la discipline dans l'application des bonnes pratiques, le travail d'équipe et l'humilité – qu'il ne faut pas confondre avec la modestie. Une fois qu'on a pris conscience du caractère faillible de tout le monde, y compris les professionnels les plus expérimentés, on est obligé de s'adapter. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire