Addictions : les propositions du rapport Reynaud
A quelques semaines du plan gouvernemental, l’addictologue Michel Reynaud a remis vendredi ses propositions à la présidente de la MILDT. Il se prononce en faveur d’une réforme de la fiscalité sur l’alcool et pour l’organisation d’états généraux des addictions qui précéderaient l’adoption d’une loi d’orientation.
Réduire les dommages liés aux addictions plutôt que prôner une abstinence irréalisable, telle est la philosophie du rapport « les stratégies validées pour réduire les dommages liés aux addictions » que vient de rendre cet après midi le Professeur Michel Reynaud chef du département psychiatrie et addictologie des hopitaux universitaires Paris sud. Remis à la présidente de la MILDT, Danièle Jourdain-Menninger, son rapport fait plusieurs constats. Celui de l’augmentation des consommations, tout d’abord, avec un tabagisme s’accroissant notamment chez les femmes, une augmentation du bindge drinking (alcoolisation ponctuelle importante ) chez les jeunes et une stabilisation de la consommation du cannabis à des niveaux élevés. D’autre part, il relève une méconnaissance globale des dommages sanitaires et sociaux liés au tabac (70 000 morts par an) et à l’acool (49 000 morts par an, implication dans 30% des violences, et 30% des viols), ainsi que de la dangerosité des différents produits par la population.
Face à cette situation, il préconise une politique pragmatique axée sur la réduction des dommages liés aux drogues, en agissant principalement sur plusieurs axes : partir de la demande de l’usager, s’y adapter et l’accompagner dans une démarche de soins progressive ; pratiquer une prévention ciblée sur les jeunes, les populations précaires, les femmes (surtout enceintes ou isolées); améliorer la fluidité du dispositif des soins... Le rapport propose aussi une "législation comparable pour les délits liés à la consommation de drogues licites ou illicites", par exemple les accidents de la route ou les violences. Il convient, dit-il de "rapprocher au maximum les actions pour pénaliser la consommation" qu'il s'agisse de drogues illicites, d'alcool ou de tabac.
L'expert se déclare aussi favorable au relèvement de la fiscalité pour l'alcool avec une taxation en fonction du degré d'alcool dans les boissons, qui reviendrait à taxer davantage qu’aujourd’hui le vin, tandis que le prix du tabac est lui régulièrement relevé, avec par exemple la hausse prévue de 5% des taxes en juillet. Enfin, il suggère de modifier les interactions santé/ police/ justice, en utilisant, en particulier, mieux la justice pour orienter vers le soin.
Tout cela ne peut prendre place que dans le cadre d’un objectif devenu priorité présidentielle, impliquant au premier chef le renforcement du « plan addictions », actuellement en jachère. Le Pr Reynaud propose d’ailleurs l'organisation d'Etats généraux des addictions pour aboutir à l'élaboration d'une loi d'orientation et appelle le président François Hollande à faire de cette lutte une priorité. Sera-t-il entendu ? Réponse le mois prochain, puisque le gouvernement doit présenter son plan addiction en juillet.
Dr Alain Dora
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