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samedi 23 février 2013

Crise à l’hôpital de Roubaix : pourquoi la chef des urgences a jeté l’éponge

Marie-Anne Babé a dit stop. Après trente années passées à la tête des urgences de l’hôpital VictorProvo de Roubaix, la médecin chef quitte l’établissement pour un autre hôpital de la région. Mais plus aux urgences. Le manque de moyens a eu raison de sa détermination.

« Voilà six mois que je réclame des postes supplémentaires, en pure perte. J’ai d’abord fait une demande directe à la direction de l’hôpital, comme tout chef de service. Je n’ai eu aucune réponse. J’ai donc monté avec mon équipe un dossier détaillé destiné à l’ARS. Pas de réponse non plus », déplore-t-elle.

Problème d’organisation ?

« Nous n’avons pas vocation à gérer les urgences de Roubaix à la place de la direction, commente Jean-Pierre Robelet, directeur général délégué à l’offre de soins de l’Agence régionale de santé (ARS). Devant le blocage de la situation, nous avons nommé un médiateur en novembre qui s’est rendu à deux reprises dans l’établissement. Il a travaillé avec les différents chefs de pôle sur la question des urgences et le projet d’établissement. Après deux semaines de rencontres, ce groupe de travail a estimé que les difficultés des urgences tenaient essentiellement à un problème d’organisation. »
Des propos qui ne convainquent pas. « Nous avons eu des interrogatoires sans fin, mais aucun médecin n’est venu aux urgences faire une garde pour voir comment cela fonctionnait sur le terrain,s’insurge Marie-Anne Babé. Ils ont regardé par le trou de la serrure et ont rendu leur avis : trop de présence la journée, et pas assez la nuit ! ».

Saturation

Les propositions de réorganisation du service des urgences ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. « Nous n’avons que vingt équivalents temps plein pour 85 000 entrées par an, argumente la chef de service démissionnaire. La fréquentation des urgences augmente pratiquement de 10 % par an et le service est saturé. Les personnes admises demandent une prise en charge plus complexe, avec une dimension sociale. Elles réclament davantage de surveillance notamment la nuit. Or, après minuit, le médecin de garde est seul. Beaucoup de services n’assurant plus de gardes, mais seulement des astreintes, nous récupérons en plus leurs urgences, ce qui représente un surcroît de travail. »
L’engorgement des urgences à l’hôpital de Roubaix est un problème récurrent. Plusieurs mesures ont déjà été prises dont l’ouverture d’une maison de santé en face de l’hôpital. Cette structure a permis de faire baisser le nombre d’entrées de malades légers aux urgences.
« Le week-end, cette aide est bienvenue car elle nous déleste de 160 patients samedi et dimanche. Mais cela ne suffit pas à absorber le flot d’entrées », déplore l’urgentiste qui ne mâche pas ses mots. « J’ai 59 ans, je suis toujours enthousiaste, j’ai une bonne équipe. Mais nous manquons de répondant. C’est un énorme gâchis. Voilà trente ans que je me bats pour les urgences de Roubaix, pour en arriver là, sous prétexte de retour à l’équilibre. Je sais que l’hôpital ne se résume pas aux urgences, mais si un service d’urgence fonctionne mal, le reste de l’hôpital ne peut pas bien fonctionner. Nous faisons bien notre travail mais nous n’avons plus la possibilité de faire le moindre projet, ni aucune vision dynamique de l’avenir. »

Arbitrages à venir

La direction fait valoir que trois postes ont été créés depuis 2010, et que les discussions étaient encore en cours pour 2013. « Un certain nombre de choix doivent être faits dans l’établissement, concernant les urgences, mais aussi la gériatrie et la pédiatrie. Toutes les ressources de l’hôpital ne peuvent pas être concentrées sur le seul service des urgences, précise Marie-Christine Paul, directrice du CH de Roubaix. Les arbitrages doivent être rendus vers la fin du premier trimestre. Mais l’augmentation des moyens doit être assortie d’une réorganisation du service, pour mieux répondre aux besoins sur des tranches horaires précises. »
Une manifestation est prévue ce vendredi devant l’établissement. Marie-Anne Babé a reçu le soutien du Dr Patrick Goldstein, patron du SMURNord Pas-de-Calais et de l’association des médecins urgentistes de France (AMUF). Une grève administrative des services d’urgence de la région est programmée le 19 mars.
› DE NOTRE CORRESPONDANTE FLORENCE QUILLE
 21/02/2013


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