LA PLACE DE L’HOSPITALISATION PRIVÉE EN EUROPE
Des envies de développement malgré la crise
Réunis à Paris à l’occasion du premier congrès européen de l’hospitalisation privée, les dirigeants du secteur ont fait le pari de la croissance malgré la crise. Partout les cliniques se regroupent, les financiers investissent, tandis que l’actionnariat médical marque le pas. La crise du recrutement médical est elle aussi européenne.
QUELS SONT les taux d’emprunt en vigueur dans tel et tel pays ? Et un scanner, ça coûte combien ? Les questions échangées dans les couloirs du congrès européen de l’hospitalisation privée reflètent l’état d’esprit du secteur : optimiste. Et entreprenant. En Allemagne, en Espagne, les rachats d’établissements, gelés pendant la crise, redémarrent.
La France est le pays d’Europe qui a le plus grand nombre de cliniques privées (en pourcentage du total de lits publics-privés – voir carte –, elle n’est plus en tête). C’est elle aussi, qui, la première, a vu arriver des groupes financiers prendre des parts de marché. La tendance gagne progressivement le reste de l’Europe. « Quand il s’agit de mettre des millions sur la table pour racheter un établissement, les banques font davantage confiance à des financiers qu’à un groupe de médecins, observe le Dr Paul Garassus, vice-président de la société française d’économie de la santé. En une décennie s’est jouée une véritable révolution. L’actionnariat médical, partout en Europe, est en recul. »
Il existe autant de paysages hospitaliers que d’États membres, en raison du principe de subsidiarité. Partout où s’ouvre une brèche, les groupes de cliniques se positionnent. En Allemagne, qui privatise certains hôpitaux publics, Rhön-Klinikum a repris plusieurs établissements dont un CHU. La chaîne a doublé son nombre de lits en dix ans. Wolfgang Pföhler, directeur général du groupe, a des projets pleins la tête. « Nous voulons développer notre secteur. Notre défi principal est de baisser les prix ». En Espagne, Capio prend en charge un territoire de santé entier avec un paiement à la capitation. « La première décision de Capio a été d’investir dans la prévention pour limiter les dépenses en soins à venir, raconte Paul Garassus. J’y vois la preuve que le mode de financement des établissements influence directement l’offre de soins. »
Batailles en vue.
L’hospitalisation privée européenne, pour poursuivre son essor, réclame une équité de traitement avec le secteur public. Elle s’est trouvé un slogan : le meilleur soin, au meilleur coût. Les batailles à mener varient selon les pays. Les cliniques françaises veulent obtenir une convergence tarifaire avec les hôpitaux. L’Europe de l’Est doit lutter contre la corruption. En Roumanie, l’hospitalisation privée en est à ses balbutiements. Sofia accueille le premier établissement, sur le sol européen, de la chaîne japonaise Tokuda. Les frontières s’estompent, et les investisseurs voient loin. « Mis à part Capio et Générale de santé, la plupart des groupes de cliniques européens étaient jusque-là strictement nationaux », rappelle le Dr Garassus, qui table sur de rapides évolutions : « Tous les groupes ont fait une étude de marché, et savent dans quels pays ils peuvent investir ». La France ne fait pas figure de favorite. « L’incertitude sur les tarifs hospitaliers empêche une visibilité à long terme. »
Autre tendance commune à toute l’Europe, le tapis rouge déroulé sous les pieds des médecins. Crèche, inscription à l’école, accompagnement de carrière pour le conjoint : les cliniques allemandes ne se contentent pas d’offrir leur plateau technique aux jeunes recrues. « La crise du recrutement est européenne, constate Paul Garassus, et les groupes privés font tout pour être attractifs et recruter de bons médecins. »
DELPHINE CHARDON
Voir la carte des lits privés dans l’Union européenne (pourcentages)
Le Quotidien du Médecin du : 31/05/2010
Des envies de développement malgré la crise
Réunis à Paris à l’occasion du premier congrès européen de l’hospitalisation privée, les dirigeants du secteur ont fait le pari de la croissance malgré la crise. Partout les cliniques se regroupent, les financiers investissent, tandis que l’actionnariat médical marque le pas. La crise du recrutement médical est elle aussi européenne.
QUELS SONT les taux d’emprunt en vigueur dans tel et tel pays ? Et un scanner, ça coûte combien ? Les questions échangées dans les couloirs du congrès européen de l’hospitalisation privée reflètent l’état d’esprit du secteur : optimiste. Et entreprenant. En Allemagne, en Espagne, les rachats d’établissements, gelés pendant la crise, redémarrent.
La France est le pays d’Europe qui a le plus grand nombre de cliniques privées (en pourcentage du total de lits publics-privés – voir carte –, elle n’est plus en tête). C’est elle aussi, qui, la première, a vu arriver des groupes financiers prendre des parts de marché. La tendance gagne progressivement le reste de l’Europe. « Quand il s’agit de mettre des millions sur la table pour racheter un établissement, les banques font davantage confiance à des financiers qu’à un groupe de médecins, observe le Dr Paul Garassus, vice-président de la société française d’économie de la santé. En une décennie s’est jouée une véritable révolution. L’actionnariat médical, partout en Europe, est en recul. »
Il existe autant de paysages hospitaliers que d’États membres, en raison du principe de subsidiarité. Partout où s’ouvre une brèche, les groupes de cliniques se positionnent. En Allemagne, qui privatise certains hôpitaux publics, Rhön-Klinikum a repris plusieurs établissements dont un CHU. La chaîne a doublé son nombre de lits en dix ans. Wolfgang Pföhler, directeur général du groupe, a des projets pleins la tête. « Nous voulons développer notre secteur. Notre défi principal est de baisser les prix ». En Espagne, Capio prend en charge un territoire de santé entier avec un paiement à la capitation. « La première décision de Capio a été d’investir dans la prévention pour limiter les dépenses en soins à venir, raconte Paul Garassus. J’y vois la preuve que le mode de financement des établissements influence directement l’offre de soins. »
Batailles en vue.
L’hospitalisation privée européenne, pour poursuivre son essor, réclame une équité de traitement avec le secteur public. Elle s’est trouvé un slogan : le meilleur soin, au meilleur coût. Les batailles à mener varient selon les pays. Les cliniques françaises veulent obtenir une convergence tarifaire avec les hôpitaux. L’Europe de l’Est doit lutter contre la corruption. En Roumanie, l’hospitalisation privée en est à ses balbutiements. Sofia accueille le premier établissement, sur le sol européen, de la chaîne japonaise Tokuda. Les frontières s’estompent, et les investisseurs voient loin. « Mis à part Capio et Générale de santé, la plupart des groupes de cliniques européens étaient jusque-là strictement nationaux », rappelle le Dr Garassus, qui table sur de rapides évolutions : « Tous les groupes ont fait une étude de marché, et savent dans quels pays ils peuvent investir ». La France ne fait pas figure de favorite. « L’incertitude sur les tarifs hospitaliers empêche une visibilité à long terme. »
Autre tendance commune à toute l’Europe, le tapis rouge déroulé sous les pieds des médecins. Crèche, inscription à l’école, accompagnement de carrière pour le conjoint : les cliniques allemandes ne se contentent pas d’offrir leur plateau technique aux jeunes recrues. « La crise du recrutement est européenne, constate Paul Garassus, et les groupes privés font tout pour être attractifs et recruter de bons médecins. »
DELPHINE CHARDON
Voir la carte des lits privés dans l’Union européenne (pourcentages)
Le Quotidien du Médecin du : 31/05/2010
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