Les pictogrammes jaunes se sont multipliés et diversifiés, jusqu’à devenir indispensables dans nos communications numériques. Sous des apparences ludiques, ils signent aussi une uniformisation du langage par les géants du Web.
Placée sous le signe de l’inclusivité, la dernière fournée d’émojis ajoutée à la bibliothèque des smartphones n’a pas manqué de faire polémique. Parmi la trentaine de nouveaux pictogrammes disponibles depuis février, le dessin d’un homme enceint vu de profil a déclenché les foudres des argumentateurs. L’essayiste Paul Melun évoque sur RMC une « propagande de la théorie du genre », une « forme de dystopie », tandis que la journaliste Eugénie Bastié souligne, dans un article du Figaro, « une révolution insidieuse des mentalités » et morigène le wokisme. De son côté, l’encyclopédie en ligne de référence, Emojipedia, défend son nouvel émoji en expliquant que « les hommes peuvent être enceints. Cela s’applique au monde réel (les hommes trans) et aux univers fictifs (Arnold Schwarzenegger dans Junior). Quel que soit son genre, une personne peut être enceinte. Désormais, il y a des émojis pour représenter cela ».
Depuis le premier jeu restreint de pictogrammes jaunes, ces symboles à portée de doigt sont devenus aussi diversifiés qu’omniprésents, ponctuant nos messages et inondant nos réseaux sociaux en représentant tantôt des expressions faciales – pleurer de rire, tirer la langue –, des concepts – amour, paix, assentiment –, tantôt des activités – nager, faire du vélo –, des objets, des animaux… Simples et, pourrait-on penser, négligeables petits dessins ornant les textes numériques, les émojis cristallisent pourtant de nombreux débats contemporains du fait de leur popularité et de leur présence dans les sphères privées comme publiques.