Médecine : témoignages d'incorruptibles
LE MONDE SCIENCE ET TECHNO |
Anne Chailleu, 38 ans, patiente devenue experte :
"Plus je creuse, plus je m'effraie des dysfonctionnements que je découvre".
C'est parce qu'elle est atteinte d'une maladie chronique, la spondylarthrite ankylosante, qu'Anne Chailleu a découvert les liens d'intérêts dans la santé. "Avant, comme tout le monde, cela ne m'effleurait pas." A l'hôpital, on la pousse à accepter un nouveau traitement alors que son cas ne correspond nullement aux indications. Un rhumatologue de ville, devant lequel elle s'interroge, lui glisse : "Ah, les labos paient bien..."
Anne Chailleu mène des recherches, s'aperçoit que l'enthousiaste praticien hospitalier est chargé d'une étude clinique pour le laboratoire. Cette fonctionnaire internationale, ingénieure, économiste et auditrice de formation, commence alors à s'intéresser de près au marché du médicament, au travail des autorités sanitaires, et adhère dans la foulée au Formindep.
Consciente que la prise de décision s'est déplacée vers l'Agence européenne du médicament (EMA), elle part en quête des déclarations publiques d'intérêts de ses experts. "Pour les obtenir, j'ai utilisé un règlement européen qui donne accès aux documents administratifs. L'EMA a fait de la résistance. J'ai insisté, harcelé l'agence par mails, et ai fini par obtenir les déclarations d'une vingtaine d'experts français, dont je me suis aperçue qu'elles n'étaient pas mises à jour depuis 1995, date de création de l'agence..."