Que fait le cerveau quand il ne fait rien ?
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Tout commence en novembre 1992 par une découverte fortuite faite par Bharat Biswal, un étudiant ingénieur électricien alors âgé de 25 ans. Voulant se former en biophysique et neurosciences, il se voit proposer un poste dans le département de radiologie de la faculté de médecine du Wisconsin à Milwaukee (Etats-Unis). Il entreprend alors de réduire le bruit de fond des signaux générés par l'IRM fonctionnelle (IRMf) afin d'améliorer l'interprétation des données recueillies lors de la réalisation d'une tâche motrice.
"Je ne pouvais travailler que tous les samedis soir car le reste du temps presque tous les scanners étaient pris par les cliniciens. A ma grande surprise, j'ai remarqué la présence d'une forte corrélation entre l'activité des cortex moteurs gauche et droit, alors même que le sujet était parfaitement immobile !", se souvient Bharat Biswal, aujourd'hui ingénieur biomédical au département de radiologie de la New Jersey Medical School. Il venait de découvrir l'existence d'une activité spontanée, au repos, entre des régions distantes du système moteur qui apparaissent fonctionnellement couplées.
"RÉSEAU DU MODE PAR DÉFAUT"
"D'autres études montreront qu'il existe dans le cerveau au repos, lorsque notre activité cognitive n'est pas dirigée vers un objectif spécifique, une activité cérébrale intense et soutenue dans des régions spatialement éloignées", indique le professeur Francis Eustache, qui dirige l'unité Inserm du laboratoire de neuropsychologie du CHU de Caen. "Ces structures sont fortement connectées sur le plan fonctionnel et forment un réseau caractérisé par la présence de fluctuations synchrones de basse fréquence", poursuit le chercheur.
Ce réseau est composé de régions du cortex préfrontal en avant et du cortex pariétal en arrière. Dans un article paru en 2001 dans lesComptes rendus de l'Académie des sciences américaine (PNAS), Marcus Raichle, professeur de radiologie à la Washington University School of Medicine (Saint Louis, Missouri), l'a baptisé "réseau du mode par défaut" pour signifier qu'il fonctionne même lorsque l'on ne fait rien. Depuis, cet article a été cité 2 595 fois dans la littérature scientifique.
Le cerveau reste donc actif au repos. Un repos très relatif dans la mesure où "le cerveau, qui représente seulement 2 % de la masse corporelle totale, consomme au repos 20 % de l'énergie du corps. De plus, la réalisation d'une tâche n'exige qu'un faible surcoût d'énergie par rapport à celle consommée par un cerveau au repos : moins de 5 %",indique Marcus Raichle.