Les risques associés à la prise d’antidépresseurs pendant la grossesse ont déjà fait l’objet de nombreux travaux. Plusieurs malformations ont été associées à ces traitements, malformations cardiaques, musculo-squelettiques, respiratoires, anomalies du massif cranio-facial. Les résultats des études sont toutefois contradictoires, parfois par manque de puissance statistique ou par la non prise en compte des facteurs confondants que constituent la dépression maternelle ou la classe de l’antidépresseur.
Une équipe canadienne a mené une nouvelle étude, recueillant les données de toutes les patientes souffrant de dépression ou d’anxiété, ou exposées à des antidépresseurs dans l’année précédant la grossesse, soit au total 18 487 patientes. Parmi elles, 3 640 ont été exposées à un antidépresseur au cours du premier trimestre de leur grossesse. L’analyse tenait compte des différents types d’antidépresseurs utilisés : inhibiteurs sélectifs de recapture de la sérotonine (IRS), inhibiteurs de recapture de la sérotonine-noradrénaline (IRSN), antidépresseurs tricycliques, etc.
Associations confirmées
Les résultats confirment l’association entre la prise d’IRS, d’IRSN et de certains tricycliques et le risque de malformations. En considérant spécifiquement le type d’antidépresseur utilisé, seul le citalopram paraît associé à une augmentation significative du risque de malformations congénitales majeures (Odds ratio ajusté [OR] : 1,36, intervalle de confiance à 95 % [IC] 1,08 à 1,73; 88 cas), bien qu’il se dessine une tendance à l’augmentation du risque pour tous les antidépresseurs les plus fréquemment prescrits.
L’analyse des anomalies par organes, apporte toutefois d’autres précisions. Ainsi, la paroxétine augmente le risque de malformations cardiaques (OR 1,45 ; IC 1,12 à 1,88) et d’anomalies du septum auriculo-ventriculaire (OR 1,39 ; IC 1,00 à 1,93). Le citalopram augmente le risque d’anomalies musculo-squelettiques (OR 1,92 ; IC 1,40 à 2,62) et de craniosynostose (OR 3,95 ; IC 2,08 à 7,52). Les tricycliques quant à eux sont associés à une augmentation des malformations des yeux, des oreilles, de la face et du cou (OR 2,45 ; IC 1,05 à 5,72) et des anomalies digestives (OR 2,55 ; IC 1,40 à 4,66), alors que la venlafaxine augmente le risque de malformations respiratoires (OR 2,17 ; IC 1,07 à 4,38).
Prescriptions en hausse
Notons qu’au cours des 10 ans qu’a duré l’étude (1998-2009), la prévalence de l’utilisation des antidépresseurs pendant la grossesse a doublé, passant de 21 pour 1 000 grossesses à 43 pour 1 000 grossesses, ce qui, selon les auteurs, augmente d’autant l’intérêt des résultats de cette étude et l’urgence de considérer les méthodes non médicamenteuses pour la prise en charge des dépressions des femmes enceintes.
Dr Roseline Péluchon
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