Lucie Nayak, docteure en sociologie, a publié dans le dernier numéro de la revue scientifique Hermès un papier sur le «paradoxe et conflits autour de la sexualité des personnes "handicapées mentales" en institution spécialisée». Elle revient sur les difficultés qu’elles ont à pouvoir vivre une sexualité la plus libre possible.
Pourquoi la sexualité des personnes handicapées mentales a longtemps été interdite dans les établissements spécialisés ?
Il y a une réponse rapide liée à la peur panique des grossesses, mais c’est plus subtil que ça. Il faut se reporter aux travaux d’Alain Giami et de son équipe qui faisaient le constat, dans les années 1980, qu’il existe deux piliers dans la manière de voir la personne avec un handicap mental : l’ange et la bête, représentations encore parfois observables aujourd’hui.
L’ange est asexué, fragile, à protéger. Il est surtout la représentation des parents et désigne les femmes, mais pas toujours. La bête, à l’inverse, a une sexualité irrépressible et dangereuse. C’est plutôt la vision des éducateurs, souvent au sujet des hommes, mais pas uniquement. Au final, les deux types de représentation aboutissaient au même résultat, c’est-à-dire l’absence de sexualité, soit pour protéger l’ange, soit pour empêcher la bête de nuire.