Transmettre l'expérience de son propre rétablissement
Par Marc Mennessier
02/11/2010
D'anciens sans-abris se dévouent aux les malades dans la rue pour les accompagner dans leur guérison.
Qui peut mieux qu'une personne atteinte de schizophrénie comprendre quelqu'un qui souffre de la même pathologie? «L'expérience de la maladie, de l'hôpital et du rétablissement peut bénéficier à d'autres», explique le Dr Vincent Girard, psychiatre de rue à Marseille à propos des trois médiateurs de santé qui font partie de l'équipe mobile psychiatrie-précarité de Marseille qu'il coordonne.
Atteint de schizophrénie depuis l'âge de 35 ans, Claude Lefèvre se définit lui-même comme un «usager de la psychiatrie». Cet ancien squatter d'origine gitane, à la silhouette frêle et aux yeux anthracite, s'est donné pour mission de «faire le lien avec les personnes de la rue exclues ou qui s'autoexcluent du système de soins souvent parce qu'elles en ont peur».
Chaque jeudi, il passe toute sa journée dans l'unité de psychiatrie de l'hôpital Sainte-Marguerite où il rencontre les patients et les personnels soignants du service du professeur Jean Naudin. «Toute mon expérience, je la fais partager à ceux qui sont en grande difficulté. Comme je suis déjà passé par là, j'essaie de leur apprendre à retrouver leur autonomie, à être des citoyens, à connaître leurs droits mais aussi leurs devoirs.» Le reste du temps, Claude sillonne les vieux quartiers de Marseille: «On souffre dans la rue, explique-t-il de manière laconique. Quand on y reste trop longtemps, les dégâts sont terribles.»
«On arrive à mieux se comprendre»
Après avoir sombré, par le passé, dans l'alcoolisme et une vie d'errance, Bernard Staes, la cinquantaine, travaille comme médiateur dans l'immeuble thérapeutique de la rue Curiol, dans le Ier arrondissement de Marseille, qui accueille depuis bientôt trois ans une douzaine de pensionnaires.
«Quand j'arrive le matin, je leur fais un café, je leur donne aussi du tabac s'ils n'en ont pas, je les écoute…, confie cet homme au regard doux et à la silhouette bonhomme. En somme, j'essaie de les mettre dans les meilleures dispositions possibles avant l'arrivée de l'équipe soignante. Comme je suis un de leurs pairs, comme j'ai vécu les mêmes souffrances qu'eux, on arrive à mieux se comprendre. Ils vont me confier des choses qu'ils ne diront pas forcément au médecin ou à l'infirmière et que je garde bien évidemment secrètes, sauf si leur vie ou celle d'autrui devait être en danger. Mon rôle consiste, non pas à les surveiller, mais à les accompagner dans leur rétablissement.»
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