What’s up doc : Pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?
Astrid Chevance : Je suis une passerellienne. À la suite de l’École normale supérieur à Paris, j’ai décidé de rentrer en médecine avec l’idée de faire de la recherche appliquée autour de la souffrance psychique et des maladies mentales. Je voulais avoir une connaissance des troubles psychiques qui ne soit pas simplement réduite aux champs des sciences sociales.
Choisir la psychiatrie aux ECN était donc une évidence. Pendant mon internat j’ai fait un DU en thérapie cognitive pour avoir d’autres outils que la pharmacologie. Puis je me suis arrêtée 3 ans pendant l’internat pour faire une thèse en santé publique avec une bourse de la fondation pour la recherche médicale, où j’ai travaillé sur la question des critères de jugement dans les essais cliniques de la dépression, avec l’idée que l’on peut améliorer la façon dont on fait les essais cliniques et mieux guider les décisions thérapeutiques dans la pratique clinique.
J’ai ensuite obtenu une bourse pour faire un clinicat Inserm/Betancourt, c’est un poste sur 4 ans en tant que chef de clinique de santé publique. Au final j’ai un DES de psychiatrie mais j’ai migré vers la santé publique avec l’idée d’avoir une valence recherche beaucoup plus importante que l’activité clinique. Mon laboratoire de recherche est à l’hôtel Dieu de l’AP-HP Paris. Mes travaux de recherche portent sur la méthodologie pour l’évaluation des traitements en psychiatrie.
Comment se répartit votre temps ?
A C : Je fais 80 % de recherche et 20 % en clinique.
Vos cas cliniques nourrissent-ils vos recherches et inversement ?
A C : Mes cas cliniques m’inspirent les questions de recherche. Le temps de la recherche et le temps clinique sont des temporalités différentes. Il faut compter minimum 10 ans pour avoir les résultats de mes recherches, donc je ne peux pas dire que mes recherches me donnent immédiatement des clés pour répondre aux questions cliniques.
L’activité de psychiatre est-elle vraiment vue comme une activité de soin par vos confrères ?
A C : Tout le monde est d’accord pour dire que c’est une activité soignante la question est plutôt : « quelle est sa place dans la médecine ? ». La psychiatrie a un positionnement particulier, son organe de prédilection est le cerveau. Dans notre construction culturelle et notre perception on en fait des choses assez abstraites et mystérieuses.
Pour des raisons anthropologiques, on a du mal à accepter en temps qu’être humain, d’être réduit à des questions de biologie. D’autre part, nous sommes des êtres psychologiques et sociaux, c’est une évidence, mais ça devrait être une évidence pour les autres branches de la médecine.
"Ce livre donne des clés pour orienter les patients, grâce à un verbatim, afin de déstigmatiser les problèmes mentaux."
Pourquoi avoir écrit ce livre : En finir avec les idées fausses sur la psychiatrie et la santé mentale ?
A C : L’idée de ce livre est d’interroger les idées reçues. Ce n’était pas pour amener des vérités, mais un recul critique. Et surtout montrer qu’utiliser ces idées de manière péremptoire cela peut faire du mal. Par exemple, l’idée que la psychiatrie n’est pas de la médecine. Nous avons essayé de travailler sur l’origine de ces croyances. Les phénomènes délétères qu’elles entretiennent pour nos patients et pour notre société au sens large.
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