Dans une tribune au « Monde », le psychiatre Pierre Lévy-Soussan estime que le seul lien biologique n’est pas en mesure de donner une sécurité narrative, familiale, symbolique, historique et enfin psychique à l’enfant.
LE MONDE | | Par Pierre Lévy-Soussan (psychiatre, psychanalyste)
Tribune. Véritable sensation le 17 janvier : un homme a annoncé avoir retrouvé son « géniteur », transgressant publiquement l’anonymat des dons de sperme en France, voire le remettant en cause, alors que vont débuter les Etats généraux de la bioéthique où cet anonymat sera à nouveau discuté, comme en 1994, 2004 et 2011.
Il ne sera pas question ici de donner un avis de type « pour » ou « contre » l’anonymat, mais d’éclairer cette question à la lumière d’une pratique clinique psychanalytique depuis près de vingt ans sur les filiations particulières que sont l’adoption et la procréation médicalement assistée (PMA) avec don.
A chaque fois qu’il est question d’anonymat concernant l’abandon des enfants ou les dons de sperme, d’ovocytes ou d’embryons, le discours énoncé dans les médias est toujours organisé en deux temps : celui d’une colère contre les médecins, voire les Centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos), et contre l’Etat, responsable de l’organisation du secret. Le secret est alors accusé d’être à l’origine de tous les maux : de couvrir un mensonge, d’empêcher de connaître « les origines », donc d’empêcher l’enfant de se développer, de se construire.