Témoignage. Gaëlle Picault, 39 ans, accompagnatrice à la naissance et à la parentalité, a fait le choix d’accoucher de son troisième enfant à la maison.
LE MONDE | | Par Camille Bordenet
J’ai choisi d’accoucher seule chez moi parce que je voulais être pleinement actrice de la naissance de mon troisième enfant. Le fruit d’un cheminement entamé il y a une vingtaine d’années, lorsque j’ai commencé à m’interroger sur notre pratique de l’accouchement. Je suis moi-même née d’un accouchement traumatique, ce n’est donc pas pour rien si je me suis intéressée à cette question.
Comme dans un cocon
Quand je suis tombée enceinte de mon premier, il y a quatorze ans, j’avais à cœur que sa naissance soit un moment respecté. Une première mise au monde, ça a quelque chose d’initiatique. Je voulais pouvoir la savourer, dans une intimité qui me permette de me livrer complètement. L’hôpital ne m’y semblait pas propice. J’ai trouvé une alternative qui correspondait à mon désir d’un accouchement moins médicalisé dans une maison de naissance, une des seules qui existait en France à l’époque. Je n’oublierai jamais la gentillesse des sages-femmes, leur écoute. Je me sentais comme dans un cocon. Ce fut un accouchement serein, fluide, évident.
Ça n’a pas été le cas pour mon deuxième, deux ans plus tard. La maison de naissance avait fermé. J’ai alors réfléchi à la possibilité d’un accouchement assisté à domicile, mais avec le coût prohibitifdes primes d’assurance imposées aux sages-femmes libérales, c’était compliqué d’en trouver une qui soit couverte et prête à le faire. A défaut, je me suis donc tournée vers la clinique la plus proche. J’ai vite senti la différence : une grosse structure, le genre usine à bébés, trop impersonnelle et protocolaire pour moi.
Le jour de l’accouchement, il a fallu que je me batte pour faire respecter mes souhaits. Je leur en avais pourtant fait part en amont, dans un document que j’avais écrit : un « projet de naissance », un bon outil de dialogue, je trouve. Mais il n’avait, semble-t-il, pas été lu. J’ai répété, en essayant de ne pas braquer : je désirais pouvoir me déplacer librement, que mon intimité soit respectée avec peu de soignants dans la pièce et le minimum de touchers vaginaux ; je souhaitais, dans la mesure du possible, pouvoir prendre le temps de travailler, sans déclenchement ni accélération ; pas non plus de péridurale ni d’épisiotomie ; je voulais pouvoir choisir ma position pour accoucher, accroupie. Et pouvoir découvrir mon bébé, peau à peau, au calme, sans gestes de soin immédiats …