20/07/2016
Quoi de plus banal que de bâiller ? La plupart d’entre nous n’y prête pas vraiment attention. Pourtant, ce comportement complexe reste mystérieux par bien de ses aspects. La pratique quotidienne d’un ORL le connaît, entre autres, comme un traitement des dysfonctionnements tubo-tympaniques.
Qu’est-ce qu’un bâillement ?
L’observation d’un bâillement l’apprécie en une véritable stéréotypie comportementale. En une dizaine de secondes se succèdent toujours en suivant la même chronologie :
– une inspiration ample, lente et profonde par une bouche largement ouverte. À cet instant, le tractus pharyngo-laryngé quadruple son diamètre par rapport au repos. L’inspiration d’air est essentiellement buccale ;
– un bref arrêt des flux ventilatoires à thorax plein, l’acmé, souvent associé à des mouvements d’étirements des membres, joliment nommés pandiculations et une occlusion des yeux. Une larme peut couler sur la joue en raison de l’obturation du canal lacrymal. La trompe d’Eustache s’ouvre, entraînant une brève baisse de l’audition. Le cardia se relâche simultanément, provoquant un appel d’air intragastrique, responsable d’une impression de plénitude abdominale ;
– une expiration passive, bruyante, plus ou moins lente, accompagnée d’une relaxation de tous les muscles concernés. La bouche se referme et le larynx reprend sa place initiale. La salive accumulée pendant le bâillement est déglutie. Une sensation de bienêtre se répand.
Physiologiquement, l’homme, à l’âge adulte, bâille entre 3 et 10 fois par jour, essentiellement après le réveil, moment privilégié de la pandiculation, et avant l’endormissement. Ceux qui ont un chronotype du soir bâillent plus que ceux du matin. Les bâillements surviennent lors de toute baisse d’activité et de vigilance, lors d’une dette de sommeil mais aussi en accompagnement de la sensation de faim ou de satiété.
L’activité des muscles respiratoires (diaphragme, intercostaux, scalènes) ne diffère en rien de celle d’une inspiration complète et très ample, alors que l’importance de l’ouverture pharyngo-laryngée, accompagnée d’un abaissement à leur maximum physiologique du cartilage thyroïde et de l’os hyoïde, est propre au bâillement. La contraction, simultanée à l’inspiration, des muscles du cou provoque une flexion modeste puis une extension marquée de celui-ci, portant la tête en arrière. Les mouvements de la tête font partie intégrante du cycle ouverture/fermeture de la bouche nécessaire à la mastication, à la déglutition, à l’élocution, au chant comme au bâillement.
D’un point de vue phylogénétique, chez toutes les espèces, ce couplage fonctionnel a une valeur adaptative, sélectionnée car elle assure une meilleure capacité à saisir des proies mais aussi à se défendre et à combattre.