Comment les textos et les mails agissent-ils sur nos névroses ? Autrefois (il y a quinze ans) écrire une lettre prenait, mettons, deux jours. Trouver un timbre et une enveloppe, poster la lettre, attendre qu’elle parvienne à son destinataire : deux ou trois jours, davantage pour l’étranger. Le temps que la lettre soit lue, que la réponse soit écrite, qu’elle fasse le trajet retour : il était normal d’attendre une bonne semaine que la boucle soit bouclée.
Cette attente-là pouvait déjà nous mettre dans tous nos états. Mais aujourd’hui ? Je vais y aller à la hache et diviser l’arbre de la névrose en trois grandes branches : l’hystérie, l’obsession, la paranoïa. Un tronc à part, c’est la perversion. La psychose, c’est encore un autre arbre. Autant de façons plus ou moins invalidantes d’être au monde et d’être avec les autres. Greffons la névrose avec la prothèse moderne que sont les moyens technologiques d’être en contact. Et prenons l’hystérique - la noblesse des névroses, disait Freud. Autrefois, l’hystérique, homme ou femme, s’inquiétait du silence au bout d’une semaine. Aujourd’hui, avec les textos, l’attente de l’hystérique commence au bout d’une minute. Surtout avec la fonction «lu» qui indique que ça y est, l’autre a ouvert le message. Pourquoi ne répond-il pas ? Pourquoi me laisse-t-elle languir ? Une heure sans réponse, et les scénarios s’échafaudent. Une journée à attendre, l’autre a rompu ou est mort.