«Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. [...] D’où avait pu me venir cette puissante joie ?»Lorsqu’il croque dans sa madeleine qui lui rappelle son enfance, Marcel Proust est envahi de souvenirs et d’émotions agréables intimement liés. Notre cerveau, en effet, est bien plus qu’un simple disque dur. Il agrémente chaque souvenir (lieu, date…) de sentiments et de sensations appelées « valences émotionnelles ».
Peut-on intentionnellement modifier ces valences, par exemple pour embellir des souvenirs douloureux ? C’est ce que vient de réaliser une équipe de neurobiologistes du Massachusetts Institute of Technology (MIT), à Boston.
Ils ont pour cela eu recours à une technique récente appelée optogénétique, qui permet de commander des neurones avec simplement de la lumière. En activant certains neurones chez la souris, ces chercheurs ont artificiellement pu leur faire revivre des souvenirs et même altérer les émotions associées.
Les souvenirs sont-ils physiquement constitués par des réseaux de neurones quelque part dans le cerveau ? La question est longtemps demeurée sans réponse. Dans les années 1930, le neurochirurgien canadien Wilder Penfield établit par hasard un premier lien entre la mémoire et son support biologique. Alors qu’il stimule électriquement le cerveau de patients épileptiques, et plus particulièrement une région appelée l’hippocampe, ces derniers se mettaient à revivre certains souvenirs.
Les chercheurs ont par la suite continué à explorer les liens entre hippocampe et mémoire, mais sans jamais parvenir à des démonstrations irréfutables.