Dans son nouveau livre, l’écrivain emprunte les chemins de traverse pour évoquer, sur le mode picaresque, ce qu’il doit aux siens.
Peu de situations sont aussi propices à se raconter des histoires que les voyages. Surtout si l’on s’y ennuie ferme, chargé que l’on est de transporter un canapé-lit depuis la maison d‘une aïeule disparue, à Créteil (Val-de-Marne), jusqu’à la ferme familiale du Cantal. Le Voyage du canapé-lit nous place ainsi à l’avant d’un Jumper, véhicule à la fois pratique et inconfortable, qui achemine par les petites routes l’imposant meuble et ses trois compagnons, le narrateur, son frère et la femme de ce dernier. D’aucuns ont eu, avant Pierre Jourde, l’idée de mettre en scène un voyage où le dialogue entre deux hommes serait le théâtre de digressions variées sur l’amour et la destinée. L’auteur, qui ne veut tromper personne, place en exergue de son texte une citation de Jacques le fataliste, modèle incontestable de cette épopée auvergnate à l’heure des camionnettes de location. La littérature picaresque n’étant pas avare d’antécédents fameux, nous sommes aussi sous le haut patronage de Laurence Sterne (1713-1768) – et, puisque Denis Diderot (1713-1784) se prévalait déjà de celui-ci, la boucle est pour ainsi dire bouclée.