LE MONDE CULTURE ET IDEES | | Par Anne Chemin
Depuis une dizaine d’années, ils voient défiler dans leur bureau des cohortes de députés coréens et d’universitaires japonais qui tentent de percer le mystère de la fécondité française. Les chercheurs de l’Institut national d’études démographiques (INED) leur projettent des graphiques sur la natalité et leur expliquent les grands principes des politiques publiques françaises. « Au cours des quatre ou cinq dernières années, nous avons reçu plus d’une dizaine de délégations coréennes ! », sourit le démographe Olivier Thévenon. Hantés par le spectre de la dépopulation, ces experts venus d’Asie sont à la recherche de la recette magique qui fait de la France la championne d’Europe de la fécondité.
Depuis le début des années 2000, l’Hexagone règne en effet en maître sur les classements européens. Après deux décennies de baisse, dans les années 1970 et 1980, la natalité est repartie à la hausse à la fin des années 1990. Depuis cette date, la France navigue juste en dessous du seuil mythique de 2,1 enfants par femme, qui correspond au taux de renouvellement des générations – elle l’a encore confirmé, en 2014, en affichant un indicateur conjoncturel de fécondité de 2,01. « En économie, l’Allemagne est l’homme fort de l’Europe. En démographie, la France est la femme forte de l’Europe », résume en plaisantant le démographe Ron Lesthaeghe, membre de l’Académie royale de Belgique et professeur émérite à l’Université libre de Bruxelles.