LE MONDE | | Par Cécile Ladjali (Ecrivaine et professeure agrégée de lettres dans le secondaire, chargée de cours à la Sorbonne Nouvelle)
Par Cécile Ladjali (Écrivain et professeur agrégée de lettres)
Les mots et leurs formes étranges sont notre mémoire. Je les comparerais volontiers aux gracieuses auréoles que le bois des arbres décline comme autant de souvenirs des siècles, ou encore aux strates crayeuses le long des falaises qui rappellent aux marcheurs chaque vague, chaque tempête, chaque naufrage.
L’orthographe des mots est la trace fossile de notre passé, sans laquelle il est impossible de comprendre notre présent ni d’envisager sereinement l’avenir. Un accent, un tréma, une double consonne ne sont pas les caprices d’un scribe obscur ou d’un académicien abscons, mais les résultats de siècles et de siècles d’évolution. Le « t » qui semble allonger bizarrement le mot cent, n’a pas été placé là pour tourmenter les élèves, mais il est l’empreinte discrète que le mot latin centum, dont il est issu, a laissée aux hommes.