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vendredi 26 juillet 2019

Les soins palliatifs, c'est quoi au fait ?

Par Eric Favereau — 
Véronique, Anne et leurs jumeaux Angèle et Lucien, nés par PMA en Belgique. A Brest, en 2015.
Véronique, Anne et leurs jumeaux Angèle et Lucien, nés par PMA en Belgique. A Brest, en 2015. Photo Vincent Gouriou

Le projet de loi qui arrivera en septembre à l’Assemblée a été présenté mercredi en Conseil des ministres. Le menu est copieux : PMA pour les couples lesbiens et les femmes célibataires, accès aux origines des enfants nés par don de gamètes, dépistages génétiques…

Et c’est parti pour la grande réforme sociétale du quinquennat Macron. Le projet de loi bioéthique qui sera soumis aux députés en septembre a été présenté mercredi en Conseil des ministres. Au menu, un texte en 32 articles porté par trois ministères (Santé, Justice, Recherche) avec en plat de résistance, l’ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée) à toutes les femmes. Et plus seulement à celles qui vivent en couple hétérosexuel. Bienvenue aux couples de lesbiennes et aux célibataires, qui seront elles aussi prises en charge par la sécurité sociale au nom des principes de solidarité et d’égalité. Coût estimé ? Entre 10 et 15 millions par an, soit seulement 4% du coût annuel de la PMA, qui monte à quelque 300 millions d’euros. Selon les estimations, cet élargissement de la PMA devrait concerner «autour de 2 000 femmes par an, alors qu’aujourd’hui, la procréation médicale assistée c’est 150 000 actes par an», selon la ministre de la Santé Agnès Buzyn. Voilà en tout cas une promesse de campagne du candidat Macron tenue et pleinement assumée.

Détruire les stocks de gamètes

Encore un bond en avant pour les femmes : la possibilité (à partir de la trentaine) de congeler leurs ovocytes et de donner ainsi un peu de mou à la dictature de leur horloge biologique. L’acte lui-même sera remboursé, pas les frais de conservation (100 euros par an).
Restaient à trancher de délicats sujets relatifs à l’ouverture de la PMA à toutes : comment reconnaître l’existence de deux mères pour un enfant ? Le texte, qui a été soumis au Conseil d’Etat avec plusieurs scénarios, est cette fois fixé. A été retenu un régime d’établissement de la filiation spécifique pour les couples de lesbiennes avec leurs futurs enfants qui, selon le texte «aura la même portée et les mêmes effets que la filiation dite "charnelle" ou la filiation adoptive».Concrètement ? Avant une PMA avec don de sperme, les couples de femmes devront signer cette «déclaration commune anticipée» devant notaire, à transmettre à l’officier d’état civil. Les deux femmes, celle qui a porté le bébé ainsi que sa compagne, seront ainsi reconnues comme les parents. De quoi mécontenter une partie de la communauté gay, qui dénonce ce côté «à part» stigmatisant. «Pourquoi différencier le mode d’établissement de la filiation selon l’orientation sexuelle des parents ? C’est une double discrimination : pour les parents et pour leurs enfants», s’est indigné SOS Homophobie.
Seconde question épineuse, elle aussi liée à la PMA et désormais tranchée : l’accès à leur origine pour les enfants nés d’un don. Parmi les 80 000 personnes nées en France grâce à un don de gamètes (sperme ou ovocytes) ou d’embryons, nombreuses sont celles qui souhaiteraient y accéder. Après une sacrée valse-hésitation, c’est une petite révolution : exit l’anonymat total, clé de voûte du système de don tel qu’il se pratique depuis les années 70. Pour donner son sperme, un homme devra désormais obligatoirement accepter que l’enfant né de ce don puisse, une fois majeur, connaître son identité s’il le souhaite. L’enfant devenu majeur pourra également, a minima et toujours s’il le souhaite, disposer de données non identifiantes sur son donneur (âge, antécédents médicaux…). Cela sera rendu possible par la création d’une commission dédiée et d’une base de données centralisée et sécurisée, gérée par l’Agence de la biomédecine. Une avancée ? C’est l’avis de moult psys (lire ci-contre),même s’il y a débat. Et même si cela suppose que l’enfant élevé par un couple hétérosexuel (impossible de tricher pour les lesbiennes) ait été informé qu’il est né d’un don : globalement, on estime (mais est-ce fiable ?) que 30% des enfants sont au courant de leur mode de conception vers l’âge de 8-10 ans.
En tout cas, conséquence collatérale de l’accès pour tous à ces nouvelles données, il est prévu de détruire les stocks actuels de gamètes donnés sous un total anonymat, une fois la loi entrée en vigueur. Une pénurie liée à cette destruction et à la levée de l’anonymat est-elle à craindre ? En 1984, la Suède, premier pays à lever ce principe d’anonymat (suivie par d’autres pays tels que l’Allemagne, la Suisse, les Pays-Bas, l’Autriche, la Finlande, l’Islande et le Royaume-Uni) a accusé une baisse de dons avant de retrouver son étiage. Les célibataires (et notamment l’association Mam’ensolo) ont déjà fait part de leur inquiétude sur une éventuelle raréfaction : seront-elles les dernières de la liste à bénéficier d’un don de sperme ?

Encourager le «don du vivant»

Sur les autres volets, le texte ouvre quelques portes, sans bouleverser le paysage. Ainsi sur les greffes, en particulier rénales, le projet de loi veut faciliter les dons dits croisés «pour améliorer l’accès à la greffe» et encourager plus largement le «don du vivant». Schématiquement, quand une personne a besoin d’une greffe de rein, elle peut venir avec un donneur de son entourage (familial ou amical) mais ce donneur peut ne pas être biologiquement compatible. L’idée est alors de le «croiser» avec un autre duo de donneur-receveur dans la même situation.
Au registre de la génétique - domaine dans lequel les découvertes s’accélèrent -, deux volets. D’abord l’information : que dire ? Jusqu’où savoir ? Et quoi savoir ? Faut-il donner à une personne une information génétique, éventuellement inquiétante, qui plus est découverte par hasard, alors que celle-ci n’a rien demandé ? Le texte fixe des règles. Et adapte le cadre du consentement en génétique aux nouvelles technologies, en permettant, par exemple, sous réserve de son accord, «d’informer la personne de découvertes génétiques incidentes, au cours d’un examen réalisé à d’autres fins, dès lors que ces informations présentent une utilité au plan médical pour elle-même ou pour les membres de sa famille». Autre cas de figure : avant la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne, le médecin prescripteur devra informer celle-ci «des risques qu’un silence ferait courir aux membres de sa famille potentiellement concernés en cas d’anomalie génétique pouvant être responsable d’une affection grave justifiant des mesures de prévention».
Ce médecin devra prévoir avec la personne, «dans un document écrit, les modalités de l’information destinée aux membres de la famille potentiellement concernés afin d’en préparer l’éventuelle transmission».
Sur le dépistage génétique, le texte se montre extrêmement prudent. Contrairement aux souhaits du Comité d’éthique, il n’ouvre pas ce dépistage à tout vent, le limitant à de seules indications médicales. Une timidité qui risque de se heurter aux pratiques individuelles.

«Valeurs éthiques françaises»

Quant à la recherche sur les embryons, aujourd’hui fermement encadrée, le texte dresse une distinction entre la recherche sur les cellules embryonnaires, qu’il va rendre plus facile, tout en maintenant un cadre strict sur la recherche sur les embryons surnuméraires. Le texte insiste également sur les «valeurs éthiques françaises en matière de recherche»,comme l’interdiction de créer des embryons à des fins de recherche, mais aussi le refus absolu de modifier le patrimoine génétique d’un embryon destiné à naître.
Toujours sur le volet recherche, à l’heure où l’on évoque de plus en plus l’intelligence artificielle par le biais d’un traitement algorithmique des données massives de santé, le projet de loi fixe les règles de transmission de l’information.
Dernier point, plus formel celui-là : les missions du Comité d’éthique vont être élargies, «pour mieux prendre en compte tous les impacts des innovations sur la santé».

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