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samedi 26 avril 2014

L'Union syndicale de la psychiatrie défend une "réelle" politique de secteur non hospitalo-centrée

À l'occasion de son congrès annuel, l'Union syndicale de la psychiatrie (USP) a notamment affirmé son opposition à la Stratégie nationale de santé du Gouvernement. Le syndicat s'oppose à toute gestion hospitalo-centrée de la psychiatrie, qui serait "en rupture avec les fondamentaux généralistes et démocratiques" du secteur.
L’Union syndicale de la psychiatrie (USP), réunie en congrès à Paris les 28, 29 et 30 mars 2014, a adopté plusieurs motions relatives à l'actualité de la discipline. Dans l'une d'elles, l'USP affirme "son opposition à la Stratégie nationale de santé du Gouvernement actuel, qui accompagne la mise en place de la loi HPST dans ses gouvernances public-privé et la transformation des services publics en entreprises concurrentielles et de marché". Le syndicat prend acte que le rapport de Denys Robiliard de décembre 2013 sur l'avenir de la psychiatrie et la santé mentale (lire ci-contre) prône une "réelle politique de secteur psychiatrique" mais "conteste l’inscription de ce rapport dans les orientations de la loi HPST et de toute gestion hospitalo-centrée, en rupture avec les fondamentaux généralistes et démocratiques du secteur". Dans l’immédiat, l’USP soutient la relance de la mise en place des Conseils locaux de santé mentale (CLSM), "comme lieux d’élaboration et de suivi des soins psychiatriques au sein de la population, en particulier dans l’accès aux soins pour toutes et tous et leur continuité". Le syndicat indique donc s’inscrire "dans une stratégie alternative de santé mentale avec l’ensemble des acteurs concernés et les élus". 

Inquiétudes sur la pédopsychiatrie

L'USP dénonce en effet "l'organisation pyramidale et gestionnaire de la santé, avec tout ce que cela charrie d'arbitraire et d'autoritarisme". Et de fait, "le discours soignant tend à disparaître au profit du seul discours administratif et gestionnaire, là où auparavant ils pouvaient se rencontrer dans le conflit, voire l'articulation", déplorent les psychiatres. Ils exigent "la mise en place d'un réel contrôle démocratique citoyen à chacun des niveaux de l'organisation actuelle de la santé, du simple service" jusqu'à l'ARS en passant par l'établissement de soins. Les conseils d'administration et de surveillance doivent être refondés, selon eux, incluant une représentation citoyenne élargie. Par ailleurs, au volet de la pédopsychiatrie (lire aussi ci-contre), l'USP s'inquiète de l'importance prise par la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) dans les orientations thérapeutiques dans une alliance avec l'Éducation nationale "à l'origine de la constitution de filières uniquement sur le registre du handicap". Elle s’alarme également de la multiplication et du poids accru des centres dits experts (Centre ressource autisme (CRA), Centres du langage...) "qui n'assurent pas l'accompagnement après le diagnostic". De plus, elle dénonce les conditions "souvent inadaptées d'hospitalisation des adolescents en psychiatrie (recours massif aux psychotropes, à la contention, à la vidéo surveillance)", des dérives qui "traduisent l'absence de structures d'hospitalisation adaptées". Enfin, elle constate parallèlement le développement d'un marché libéral non pris en charge par l'Assurance maladie (neuropsychologues, éducateurs formés à certaines techniques spécifiques, psychomotriciens...). 

Avancées dans les soins sans consentement

L’USP rappelle également qu'elle reste opposée à la loi du 5 juillet 2011 relative aux soins sans consentement dont elle demande l’abrogation. Elle se réjouit cependant de quelques avancées de la réforme du 27 septembre 2013 (lire ci-contre). En premier lieu, elle salue, grâce au Conseil constitutionnel, l’encadrement "rigoureux" des soins sans consentement en ambulatoire. Désormais, la coercition est interdite en ambulatoire (par exemple une injection de force) et, pour imposer des soins sous contrainte, il faut clairement réhospitaliser la personne dont l’état doit nécessiter cette mesure (manquer un rendez-vous ou refuser un traitement ne peut constituer un motif suffisant). L'USP salue également l’abrogation de la visioconférence "qui constituait, outre un juteux marché, une atteinte aux droits des personnes hospitalisées". Enfin, la présence obligatoire de l’avocat est saluée, "même si reste le problème important de son financement, qui devrait relever de "l’aide légale", puisqu’il s’agit d’une obligation imposée à l’hospitalisé". L’USP s’inquiète par ailleurs de l’augmentation des mesures de soins sous contrainte, "reflet d’une société intolérante et d’une pratique psychiatrique souvent sécuritaire". 

Recherche sur la pratique de la contention

Le syndicat a profité de ce congrès pour réaffirmer que les mesures telles que l’isolement et la contention ne peuvent être prescrites que pour des raisons cliniques précises recensées dans un rapport d’activité. "Il n’existe pas de contention bien traitante. Celle-ci est toujours une violence, qui, si elle ne peut-être évitée doit être strictement limitée", soulignent les psychiatres. L’USP rappelle d'ailleurs que les textes internationaux incluent la contention parmi les "traitements inhumains et dégradants". De plus, "l’emploi d’acronymes et de termes banalisant (CSO = Chambre de soins obligés, CSI = Chambre de soins intensifs, contentions bien traitante, etc.) réalisent une euphémisation de la violence qui entrave la réflexion critique", souligne le syndicat. L’USP se dit donc prête à s’associer à la Fédération française de psychiatrie (FFP) dans la recherche qu’elle propose sur la pratique de la contention.
Caroline Cordier 

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