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samedi 21 avril 2012


Ados-adultes : le grand malentendu

LE MONDE | 
Il existe un grand malentendu entre les adultes et les adolescents. Si 85 % de ces derniers considèrent qu'ils ont besoin des premiers, près des trois quarts des adultes sont persuadés que les jeunes n'ont pas besoin d'eux. Tels sont les enseignements d'un sondage Ipsos Santé effectué auprès de 807 ados de 15 à 18 ans, interrogés en ligne du 12 au 19 mars et auprès de 822 adultes de 25 ans et plus (échantillon représentatif selon la méthode des quotas).
Plus de la moitié des jeunes souhaiteraient nourrir plus d'échanges avec les adultes. Et dans leur entourage proche, 92 % des jeunes comptent prioritairement sur leur mère pour les aider à devenir adultes, devant leur père (74 %) et enfin leurs amis (58 %), alors que les trois quarts des adultes pensent que les adolescents comptent d'abord sur l'aide de leurs amis. La place du père semble contribuer au bien-être des ados : 83 % des jeunes qui se sentent bien citent leur père comme modèle contre 57 % des jeunes éprouvant un mal-être.
Cette question du malentendu entre jeunes et moins jeunes est au centre du 8Forum Adolescences de la Fondation Pfizer pour la santé de l'enfant et de l'adolescent, qui se tient mercredi 4 avril à Paris. Les adultes ont tendance à être plus pessimistes sur le moral des adolescents qu'ils ne le sont eux-mêmes. Près des trois quarts pensent que les jeunes sont souvent mal dans leur peau contre 25 % des intéressés ! Et seulement le tiers des adultes pensent qu'ils se sentent bien à l'école contre 71 % des ados. En d'autres termes, les ados vont plutôt bien, mais les adultes, pessimistes, l'ignorent.
Comment l'expliquer ? "Les parents utilisent leur grille d'analyse, explique Caroline Thompson, thérapeute familiale. Ils voient leurs ados en retrait, en butte à des revendications à leur endroit. Mais ce sont des moments particuliers d'autonomisation, somme toute assez normaux." De là à en déduire qu'ils sont mal dans leur peau, il y a un pas, trop vite franchi. Les jeunes testent les limites, tentent de trouver les nouvelles lignes de démarcation de leur autonomie.
Ils demandent plus de liberté, mais sont désemparés si on la leur donne. "Si vous dites à votre enfant, c'est toi qui décides, vous l'insécurisez, poursuit Caroline Thompson. Les adolescents ne sont pas des individus qui ont 15 ans, ils ont à la fois 8 ans et 25 ans. Ils ont besoin, à la fois, de l'affection donné à un enfant et de la liberté d'un adulte." Face à ces fluctuations affectives et d'humeur, l'adulte se doit de rester stable et de tenir un cap.
Pour Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste, le pessimisme des parents vient d'une grande inquiétude face à l'avenir de leur enfant : ils veulent lesvoir heureux, épanouis. "Alors que les enfants sont devenus le projet le plus important des adultes, commente-t-il, les adultes ont conscience que, pour la première fois, le niveau de vie de leurs enfants va être inférieur à celui de leur génération." Et alors que leurs enfants ont besoin de modèles, les parents ne savent plus vraiment quoi leur transmettre. Plus du quart des jeunes (27 %) estiment ne pas avoir de modèles dans la vie. "Leurs parents doivent transmettre à leurs enfants la confiance en l'avenir en leur montrant qu'ils ne sont pas les victimes de la société dans laquelle ils vivent. Ils ont besoin d'échanger avec leurs parents", poursuit Serge Hefez.
Selon le sondage, respect des valeurs, honnêteté et confiance en soi sont des valeurs que les jeunes d'aujourd'hui souhaiteraient se voir transmettre par leur entourage adulte. Mais très peu d'adolescents évoquent la confiance en soi parmi les valeurs apportées par leurs aînés. "Celle-ci semble au contraire sapée par les angoisses de leurs parents", considèreCaroline Thompson.
Enfin, autre malentendu qui pollue les relations des adultes avec leurs ados : les nouveaux médias. Les jeunes déclarent être connectés en moyenne cinq heures trente chaque jour. Ils contactent en moyenne quinze amis par jour sur les réseaux sociaux comme FacebookTwitter ou MSN. Mais, contrairement aux idées reçues, l'utilisation des nouveaux médias ne se fait pas au détriment d'échanges en face à face pour 84 % d'entre eux. Ils rencontrent physiquement deux fois plus d'amis par jour que les adultes (onze contre cinq) et consacrent deux heures trente en moyenne par jour àparler de visu avec eux, soit deux fois plus que sur les réseaux sociaux (une heure quinze en moyenne).
Pour le professeur Philippe Jeammet, président de la Fondation Pfizer et psychiatre, "une bonne partie des adultes qui sont acteurs de leur vie ont le sentiment ne plus avoir de pouvoir, que l'avenir leur échappe. Pourcontrebalancer cette sensation, les adultes vont avoir tendance, paradoxalement, à prendre une position négative et à renvoyer ce miroir défaitiste aux adolescents". Adultes, il est temps d'inverser la tendance !

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