Saint Martin de Vignogoul : « Le pouvoir soignant dans tous ses états » (le 20 et 21 mai 2011)
Le patient souffre toujours d’une difficulté de la relation : à l’autre, au monde, à soi. C’est pour cette raison que la mise en place d’un dispositif soignant nécessite que la dimension relationnelle prenne la place de pivot central.
Cette relation soignant-soigné procède d’une asymétrie fondamentale, quelque soit le modèle relationnel, le contexte, le statut des soignants.
Mais n’est ce pas au sein de cette asymétrie nommer un certain pouvoir ? Et de quel pouvoir s’agit-il ? Celui de refuser ou d’accepter, d’accueillir ou de rejeter, de dire non, de dire oui, de permettre ou d’interdire ? Dans tous les actes de la vie quotidienne vient se nicher cette abyssale question : le pouvoir de l’un et l’apparente absence de pouvoir de l’autre.
Reconnaître que dans tout acte de soins vient se poser cette question ouvre la voie à une réflexion indispensable : comment identifions nous ce pouvoir, qu’elle est sa fonction, comment intervient il dans l’échange avec le patient, avec les collègues, avec la hiérarchie, avec les structures administratives ?
Et puis il y a le pouvoir qui nous est attribué, dénié, confié, confisqué. Avec ce risque de l’assimilation réductionniste qui, avec les diplômes, les connaissances, la science nous assureraient d’un savoir-pouvoir qui injecterait dans la sphère sociale une bien dangereuse confusion entre savoir et vérité.
Mais, pour interroger les effets de ce pouvoir, nous avons besoin d’indépendance professionnelle, de sécurité psychique, de temps, de confiance. Les conditions actuelles d’exercice de la psychiatrie le permettent-elles ? Quels sont les effets sur le soin des processus de certification, de protocolarisation, de standardisation ?
Ne sommes nous pas tentés, avec ces rituels de soumission sociale, de vouloir assurer et délimiter « notre pouvoir », ne serait il qu’illusoire ou pris dans un infini petit territoire ? Le délitement du travail en équipe, l’abrasion de la notion même de « collectif », « l’oubli » de la dimension relationnelle de tout acte de soins ne sont ils pas le reflet d’une tentative de prise de pouvoir autoritariste et écrasante, où s’infiltrent alors mépris et rejet pour les patients ?
Or ceux ci ont sans doute besoin, à travers cette asymétrie de la relation, que le pouvoir exercé par le soignant lui permette aussi d’interroger le sien.
L’autorité soignante, nécessitant l’existence d’un tiers structurant, se différencie fondamentalement de l’autoritarisme : l’une peut permettre l’ouverture d’un espace de création, l’autre l’interdit. Alors dans quel état se trouve le pouvoir soignant ? Dépressif, mélancolique, délirant, maniaque, narcissique, désemparé, fier de lui ?
Hervé BokobzaLire la suite ici
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