Répondre aux affects négatifs en psychothérapie
Publié le 20/04/2011 | |
Dans la rubrique « études de psychiatrie » de The American Journal of Psychiatry, deux psychiatres universitaires à New York (John C. Markowitz et Barbara L. Milrod) livrent leur vision des psychothérapies, en alternant conceptions théoriques et vignettes cliniques, parfois avec humour, quand le psychothérapeute dit sobrement ‘‘Uh-huh’’ (euh hein) au patient.
Destiné notamment aux psychiatres en formation, cet article souligne l’intérêt de « répondre aux affects négatifs dans les psychothérapies » où le thérapeute est censé « offrir un support et un modèle. » S’il peut lui-même affronter des émotions et des sentiments désagréables renvoyés par autrui, comme « un flot de dépression, d’angoisse ou de panique », cela permet de l’endiguer chez le patient. Pour les auteurs, les psychiatres doivent donc travailler aussi sur ces affects négatifs, mieux les comprendre et les intégrer à une thérapie, dans une dynamique de changement. De même que le confident « sympathique » est (pour l’étymologie grecque) « celui qui souffre avec », l’empathie attendue du thérapeute implique un « partage des affects négatifs » avec le patient, car leur gestion a une incidence perceptible non seulement dans le discours du thérapeute, mais aussi dans « ses réactions non verbales » (regards, expressions faciales ou postures). Et surtout, le psychiatre doit montrer son intérêt pour le patient, être capable de « se représenter son état mental » (mentalizing the patient’s mind).
Or une difficulté concerne la formation des psychiatres, de plus en plus « submergés par la paperasserie, au détriment du contact clinique ». Désormais, le temps presse et les traitements médicamenteux tendent à supplanter les psychothérapies, jugées trop lentes. La « maîtrise comptable » des dépenses de santé implique une réduction croissante de la durée moyenne des hospitalisations, et cette évolution compromet une formation « à l’ancienne » : quand cette durée se comptait en mois, les futurs spécialistes avaient alors le temps de « se familiariser avec des patients et avec leurs propres réactions. » Pour compenser ce « manque à apprendre », les auteurs préconisent de revaloriser ce que les psychanalystes appellent « l’analyse didactique », c’est-à-dire la pratique d’une thérapie personnelle, présentée comme une bonne école de psychothérapie.
Dr Alain Cohen
Markowitz JC et Milrod BL : The importance of responding to negative affect in psychotherapies. Am J. Psychiatry 2011; 168-2 : 124-128.
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