LE MONDE ECONOMIE | | Par Paul Seabright (directeur de l’Institut d’études avancées de Toulouse)
« Pourquoi la plupart des choses que vous savez sur le sexe sont fausses. » Ce titre n’est pas paru en « une » d’un tabloïd britannique à sensation, mais dans la revue scientifique Nature du 19 février. L’auteure, Claire Ainsworth, ne parle pas, rassurez-vous, de la large gamme de nos comportements sexuels, mais des mécanismes de détermination génétique des organes sexuels, et donc plus généralement de l’identité sexuelle de l’individu.
Ces dernières années ont vu un bouleversement des idées reçues concernant ces mécanismes, qui s’avèrent plus complexes et aboutissent à des résultats plus « divers » qu’imaginé jusqu’ici. Cette nouvelle compréhension devrait faire réfléchir ceux qui pensent que la part de la biologie dans la détermination du genre est plus simple à décrire que celle de la culture. Ou encore ceux pour qui le fait d’être homme ou femme est une identité agréablement binaire dans un monde où les autres dichotomies se dissolvent souvent dans cinquante nuances de gris.
Pendant longtemps, les chercheurs ont pensé que le développement de l’anatomie femelle était l’option par défaut de l’embryon, et qu’il fallait le déclenchement d’un processus spécifique pour détourner ce développement en direction du mâle. En 1990 a même été découvert le gène SRY, qui semblait le chef d’orchestre de ce processus.
Mais depuis 2000, d’autres gènes ont été découverts qui interviennent activement dans la direction de la femelle – comme le gène WNT4, dont la présence de copies supplémentaires est capable de produire des ovaires rudimentaires même chez les individus aux chromosomes XY, en principe mâles.