Par Anne Hazard Publié le 22 décembre 2023
Devenue psychiatre par révolte et pour changer les destins, elle dirige, à Paris, la Maison de Solenn, qui accueille des ados en souffrance et leurs familles. Fille d’émigrés espagnols, l’auteur de « Et si nous aimions nos ados ? » défend la richesse de la transculturalité et la grande diversité des façons d’être père, d’être mère.
Marie Rose Moro n’arrive pas sur le dos de Rossinante, mais à bicyclette. La psychiatre pour enfants et adolescents, la soixantaine enjouée, partage avec don Quichotte, personnage qu’elle adore et compatriote d’un autre temps, un goût pour le rêve et l’utopie. Rendre le monde meilleur, retrouver du sens pour échapper au chaos, malgré les coups, qu’elle balaie d’un revers de la main, devant son verre d’eau pétillante glacée, dans la pénombre du bar Hemingway de La Closerie des lilas, à Paris.
Nous sommes tout près de la Maison de Solenn, qu’elle dirige depuis 2008. L’établissement rattaché à l’hôpital Cochin accueille des adolescents en souffrance et leurs familles. Tous les jeudis matin, elle y tient une consultation « transculturelle » avec d’autres thérapeutes.
« Je me souviens d’un adolescent, né d’un père originaire d’Afrique de l’Ouest et d’une mère bretonne et catholique, qui s’était converti à l’islam et qui, lors de notre première rencontre, avait refusé de me serrer la main. Il est difficile d’être fier et ouvert lorsque ses parents se dévalorisent ou ne transmettent rien. Certains souffrent du métissage, devant toujours expliquer d’où ils viennent. Nous avons parlé des liens entre la Bible et le Coran, de ce qui donne du sens à la vie. En partant, il a accepté de me serrer la main, au début par convenance, puis finalement, par affection. Un contact, un lien était né. »