par Laurent Goumarre publié le 4 novembre 2023
Au téléphone, la première question a été : «Vous êtes où ?» Silence. La chorégraphe Alice Ripoll ne sait plus. «Ça y est, j’ai trouvé : Düsseldorf pour le festival Tanzhaus. Désolée mais le rythme est un peu difficile à suivre.» Forcément : les dates de tournée et les festivals s’enchaînent pour l’artiste née en 1979 à Rio de Janeiro, plébiscitée sur les scènes européennes et programmée cette année au Festival d’automne à Paris. Avec deux pièces : une création, Zona Franca, et la reprise d’aCORdo, performance de trente minutes qui a marqué les esprits lors de son passage en France en 2019. Pas de décor, pas d’éclairage, juste des chaises, une porte, et quatre danseurs, embarqués d’abord dans une série de tableaux vivants, reconstitutions lascives de scènes de pietas et descentes de croix saint-sulpiciennes, puis dans une transe frénétique de corps possédés, avant de basculer dans le coup d’Etat : le braquage des spectateurs, qui devront récupérer eux-mêmes portables et portefeuilles sur le corps des danseurs. C’est ça, aCORdo : des spectateurs flics, des danseurs voleurs fouillés mains sur le mur. Le raccourci est saisissant, qui pointait au moment de sa création, en 2017, la réalité indiscutable de la lutte des classes entre ses artistes issus des favelas et le reste de la société brésilienne.