Par Patrick Chamboredon , président de l'Ordre national des infirmiers Publié le
Patrick Chamboredon, président de l’Ordre national des infirmiers, estime que pour répondre aux nouveaux besoins de santé, son métier doit être réformé.
La crise sanitaire a mis en lumière l’engagement, le courage, l’abnégation, la compétence de centaines de milliers de professionnels de santé qui travaillent en France. Les « invisibles » ont reçu les applaudissements à 20 heures et les hommages de la nation. Mais la crise Covid a aussi été le révélateur et le catalyseur de leurs difficultés, leurs problèmes, leur envie de « tout quitter » parfois. Elle était censée mettre au jour les maux qui rongent notre système de santé. Collectivement, nous devions tirer les leçons de nos erreurs. Le Ségur de la Santé, lancé en fin de « première vague », au mois de mai 2020, se donnait pour objectif de « bâtir les fondations d’un système de santé encore plus moderne, plus résilient, plus innovant, plus souple et plus à l’écoute de ses professionnels, des usagers et des territoires, avec des solutions fortes et concrètes ». Ce dernier a ouvert la voie à une nécessaire réévaluation des rémunérations, la France rattrapant ainsi en partie le retard sur la plupart de ses voisins européens. Au vu des enjeux, est-ce suffisant ?
Partout en France, des établissements de santé sont confrontés à des fermetures de lits qui ne résultent pas d’un développement accru de l’ambulatoire. Partout en France, la continuité des soins est menacée. Partout en France, assurer la qualité et la sécurité des soins relève tous les jours un peu plus du défi. Partout en France, des professionnels de santé sont épuisés, se sentent (de nouveau) déconsidérés, doutent, s’interrogent sur leur avenir… À la pénibilité du métier, renforcée par la crise sanitaire, s’ajoute la perception d’un manque de reconnaissance.
Ces derniers mois, l’Ordre national des Infirmiers a joué pleinement son rôle de vigie de la profession et a réalisé différentes consultations auxquelles 60 000 à 90 000 infirmières et infirmiers ont répondu. Certains enseignements sont alarmants : 4 infirmiers sur 10 déclarent « ne pas savoir s’ils seront toujours infirmiers dans 5 ans ». Ce chiffre prête d’autant plus à réfléchir – et devrait nous inviter à agir ! – quand on sait que pour répondre aux besoins de santé à venir, la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la santé estime que nous aurons besoin d’1 million d’infirmiers en 2040 pour faire face aux besoins de santé, soit 250 000 de plus qu’aujourd’hui.