Par Valentine Faure Publié le 12 juillet 2021
ENTRETIEN« Les nouveaux destins du corps » (1/5). Le corps est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions, y compris de la part des sciences humaines. Dans un entretien au « Monde », Dominique Memmi, directrice de recherche au CNRS, explique pourquoi, face à des identités désormais trop flottantes, émerge une demande de fixation identitaire par le corps.
« A l’heure où prolifèrent les corps virtuels, où s’échangent le sang et les organes, où s’estompe la frontière entre le mécanique et l’organique, où l’on s’approche de la programmation de l’espèce et de la réplication de l’individu, il est plus que jamais nécessaire d’éprouver la limite de l’humain : “Mon corps est-il toujours mon corps ?” », s’interrogeait Jean-Jacques Courtine dans le troisième volet de l’Histoire du corps (Le Seuil, 2006). Territoire de modifications, lieu d’expérimentations, matière librement façonnable au gré des désirs, mais aussi lieu d’injonctions pesantes, de vulnérabilités, où viennent s’incarner inéluctablement les inégalités sociales, raciales, et où s’inscrivent les violences : au cours d’une année marquée par la pandémie, l’isolement, les violences policières, le corps s’est illustré dans ses paradoxes.