Laurence Chauvy 21 janvier 2018
SUISSE
Entravé, souffrant, démembré, recomposé, mort ou glorieux: le corps inspire les créateurs de l’art brut, comme le met en lumière la 3e biennale thématique proposée par la Collection de l’art brut, à Lausanne
Lorsqu’il ne reste rien, ou qu’on a peu reçu, lorsque la créativité s’exprime par les moyens les plus pauvres et que l’enfermement, ou quelque handicap, limite la vue sur l’extérieur, est-il meilleur sujet d’exploration et de transformations que le corps, toujours à disposition? Les auteurs de l’art brut – ou de cette catégorie un peu hybride qu’est la Neuve Invention – comme d’ailleurs les artistes en général, s’intéressent à l’image du corps: corps en miroir, corps en métamorphose, corps mort, etc. Telles sont en effet les rubriques qu’aborde la 3e édition de la Biennale de l’art brut, destinée à mettre en valeur les collections du musée lausannois (riches de plus de 70 000 pièces), tout en traitant une thématique judicieusement choisie.
Quelque 300 œuvres sélectionnées par le commissaire invité, le comédien, danseur et metteur en scène Gustavo Giacosa, dont la pratique professionnelle est donc intimement liée au corps, illustrent non pas tellement les facettes diverses de ce qui se présente à la fois comme sujet et comme objet, comme outil et comme œuvre en soi, comme attribut de l’humain et comme image du divin, mais plutôt la manière dont l’abordent ces créateurs en particulier. Soit quarante personnes qui ont ou ont eu un problème mental ou psychique, ont vécu des traumatismes (comme Emma Santos, qui fut par ailleurs un écrivain reconnu), et ont par conséquent vu entamées leur estime de soi et leur perception corporelle.