Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS, Sciences Po et à l’université de Grenoble-Alpes, a réalisé une vaste étude sur les rapports entre des collègiens et les institutions publiques.
Que désigne la pré-radicalisation et pourquoi vous y être intéressé ?
La pré-radicalisation précède l’intention de passer à l’acte. La radicalisation est la phase qui suit et se traduit par un passage à l’acte, ce qui suppose de la logistique et des complices, ce dont mon étude ne traite pas. La grande question est de savoir si les itinéraires des jeunes qui passent à l’acte sont des itinéraires individuels. Je voulais prendre le contre-pied de la théorie du « loup solitaire » et savoir s’il y a quelque chose dans la société qui prépare les jeunes à accepter un message radical. Quand un jeune regarde une vidéo de Daech sur Internet, qu’est-ce qui fait qu’il est séduit ? Mes analyses s’appuient sur une étude réalisée par le CNRS, avec l’appui de l’Agence nationale de recherche, le Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégique, et avec le soutien de l’éducation nationale, auprès de 9 200 adolescents français, dans les Bouches-du-Rhône, de mars à juin 2015. Notre échantillon est issu d’un tirage aléatoire.
Au-delà de la face immergée de l’iceberg, on s’aperçoit qu’il y a des clivages socio-économiques et religieux. A Nice, pour Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, son interprétation de sa religion n’est pas connue. Ceci me pousse à douter de la « radicalisation éclair », une expression qui traduit chez les autorités qu’elles n’ont rien vu venir. Il y a un terrain favorable à la formation des intentions meurtrières.