Paris, le samedi 28 février 2015 – Avec une imagination sans cesse renouvelée, l’homme, le médecin, les artistes élaborent des artifices pour distancer la réalité, pour éviter sa morsure, pour empêcher qu’elle ne s’impose en face à face. Mais d’autres, au contraire, recherchent toujours cet affrontement, s’appliquent consciencieusement à ne pas louvoyer, s’astreignent à éprouver la cruauté de la « vérité ». Caroline Vié ne fuit pas. Journaliste et écrivain, elle signe son deuxième roman « Dépendance Day », une fresque familiale, hantée par une sombre prophétie génétique : la maladie d’Alzheimer a déjà frappé Lachésis, atteint désormais Clotho et pèse, sombre menace, sur Morta, la narratrice. Cette dernière (qui à l’image de sa mère et de sa grand-mère porte le nom d’une Parques) a choisi de ne pas abandonner, ni sa mère, ni son probable destin : elle se confronte à la déchéance de l’être aimé, aux hésitations médicales, aux moqueries, aux railleries. La plume nous raconte tout, nous obligeant nous aussi à faire face aux détails les plus crus, à la déconfiture des hôpitaux psychiatriques, la pauvreté des maisons de « repos ». Et si l’humour teinte cette tragédie d’une couleur moins âpre, il n’est pas une mise à distance, une tentative d’éloignement, mais une autre façon d’éprouver l’implacable indignité de l’histoire.
Aya Mhanna, une psychologue libanaise pas comme les autres
Melinda Trochu