Le DSM 5 au milieu du gué
Publié le 31/12/2010
Concernant officiellement « le diagnostic et les statistiques » des troubles mentaux, le DSM est devenu un passage obligé de la littérature psychiatrique. Adulé outrageusement par certains, mais diabolisé par d’autres, comme stigmate exemplaire d’une Amérique triomphante et d’une mondialisation en forme de capitulation pour la « vieille Europe », détrônée jusque dans son pré carré intellectuel, tel l’héritage des aliénistes classiques, alors qu’on pouvait encore affirmer, au premier choc pétrolier, « n’avoir pas de pétrole mais des idées ! » The American Journal of Psychiatry évoque sa prochaine mouture, prévue pour 2013, le DSM-5.
Les révisions successives de ce célèbre manuel visent à intégrer les connaissances croissantes en psychiatrie, pour proposer des critères diagnostiques de plus en plus précis, en correspondance avec la psychopathologie « officielle », dans la mesure où des observateurs différents sont censés parvenir au même diagnostic en utilisant le DSM.
Cependant, cet objectif doit être recherché tout en conservant l’intérêt clinique des critères de diagnostic, à des fins d’utilisation pratique, fiable, et valable aussi bien pour les médecins (en vue d’une thérapeutique) que pour les chercheurs (dans une perspective épidémiologique et de prévention).
Pour les auteurs, il est donc essentiel que des essais développés sur le terrain viennent régulièrement conforter ces efforts d’analyse théorique, en replaçant les conceptions nosographiques dans le contexte des réalités cliniques. Entre autres considérations, la notion de fiabilité s’impose. Elle peut s’apprécier en statistiques par un paramètre, le kappa de Cohen [1], un test mesurant l’accord entre deux observateurs distincts lors d’une évaluation qualitative (comme il en existe notamment dans un contexte diagnostique). Selon les auteurs, cette quantification d’un accord mutuel entre évaluateurs apporte aussi une mesure sur la validité de la correspondance entre certains critères et un diagnostic. Cette démarche statistique illustre parfaitement le changement de paradigme entre la psychiatrie « ancienne » (basée sur une étude de cas humaniste, voire philosophique) et « nouvelle » (ambitionnant pour son corpus de références, le DSM, une rigueur empruntée aux sciences exactes).
[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Kappa_de_Cohen
Dr Alain Cohen
Chmura Kraemer H et coll. : Moving toward DSM-5 : the field trials. Am J Psychiatry 2010 ; 167-10 : 1158–1160.
Publié le 31/12/2010
Concernant officiellement « le diagnostic et les statistiques » des troubles mentaux, le DSM est devenu un passage obligé de la littérature psychiatrique. Adulé outrageusement par certains, mais diabolisé par d’autres, comme stigmate exemplaire d’une Amérique triomphante et d’une mondialisation en forme de capitulation pour la « vieille Europe », détrônée jusque dans son pré carré intellectuel, tel l’héritage des aliénistes classiques, alors qu’on pouvait encore affirmer, au premier choc pétrolier, « n’avoir pas de pétrole mais des idées ! » The American Journal of Psychiatry évoque sa prochaine mouture, prévue pour 2013, le DSM-5.
Les révisions successives de ce célèbre manuel visent à intégrer les connaissances croissantes en psychiatrie, pour proposer des critères diagnostiques de plus en plus précis, en correspondance avec la psychopathologie « officielle », dans la mesure où des observateurs différents sont censés parvenir au même diagnostic en utilisant le DSM.
Cependant, cet objectif doit être recherché tout en conservant l’intérêt clinique des critères de diagnostic, à des fins d’utilisation pratique, fiable, et valable aussi bien pour les médecins (en vue d’une thérapeutique) que pour les chercheurs (dans une perspective épidémiologique et de prévention).
Pour les auteurs, il est donc essentiel que des essais développés sur le terrain viennent régulièrement conforter ces efforts d’analyse théorique, en replaçant les conceptions nosographiques dans le contexte des réalités cliniques. Entre autres considérations, la notion de fiabilité s’impose. Elle peut s’apprécier en statistiques par un paramètre, le kappa de Cohen [1], un test mesurant l’accord entre deux observateurs distincts lors d’une évaluation qualitative (comme il en existe notamment dans un contexte diagnostique). Selon les auteurs, cette quantification d’un accord mutuel entre évaluateurs apporte aussi une mesure sur la validité de la correspondance entre certains critères et un diagnostic. Cette démarche statistique illustre parfaitement le changement de paradigme entre la psychiatrie « ancienne » (basée sur une étude de cas humaniste, voire philosophique) et « nouvelle » (ambitionnant pour son corpus de références, le DSM, une rigueur empruntée aux sciences exactes).
[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Kappa_de_Cohen
Dr Alain Cohen
Chmura Kraemer H et coll. : Moving toward DSM-5 : the field trials. Am J Psychiatry 2010 ; 167-10 : 1158–1160.