LE MONDE IDEES | | Par Marie-Hélène Brousse (Psychanalyste)
TRIBUNE. Depuis cinquante ans, le père, puis la fille, puis la petite fille, puis leurs cohortes, et maintenant la masse innombrable de leurs électeurs, déploient sans relâche une argumentation fondée sur la spoliation éhontée des signifiants nationaux.
Ils s’emparent, pour s’en parer, des richesses du patrimoine emblématique commun au peuple français. Dans le bleu-blanc-rouge, les filles Le Pen se taillent une garde-robe de discours pour parader à la télévision et dans les meetings. Le drapeau, elles en drapent pour les masquer leurs appels fiévreux à la guerre civile. La nation, elles la kidnappent et l’enferment à double tour dans leur cambuse, et promènent à sa place un sosie monstrueux.
Les héros de l’Histoire, de Jeanne d’Arc au Général de Gaulle, elles les raflent pour les enrôler dans leurs troupes d’assaut idéologique. La langue, les mots, jusqu’au nom même de Français, elles se les accaparent. « Le long manteau d’églises et de cathédrales qui recouvre notre pays » (Henri Guaino lu par Nicolas Sarkozy) devient entre leurs mains une guenille, le cache-misère d’une pensée indigente, le cache-haine d’un discours fielleux de « révolution conservatrice ».