Elle vit cette décision du Conseil d’Etat comme le début d’une «délivrance». Apaisante, mais fragile. Eugénie Izard, pédopsychiatre de 50 ans, traîne depuis sept longues années une angoisse profonde et corrosive. «Celle qui vous colle à la peau quand vos pairs, ceux qui étaient censés vous protéger, et protéger les enfants, se mettent à vous attaquer sans répit», témoigne cette praticienne originaire de Toulouse, non sans exaspération dans la voix. Le désarroi date du printemps 2015. De ce jour où le conseil départemental de l’ordre des médecins de Haute-Garonne a porté plainte contre elle devant la chambre disciplinaire, après qu’elle a signalé des soupçons de maltraitances physiques et psychologiques de la part d’un père sur sa fille de 8 ans. «On m’a accusée de ne pas être restée à ma place, relate-t-elle. D’avoir pris le parti d’une mère aliénante qui manipulait son enfant. Alors que tout ce que j’avais fait, c’était prendre mes responsabilités et tenter de protéger de maltraitances un enfant.» Sanctionnée par l’ordre des médecins à une suspension temporaire d’exercice de la médecine d’une durée de trois mois, Eugénie Izard a vu, le 30 mai, la plus haute juridiction administrative annuler la sanction ordinale. Un événement qui a permis de mettre en lumière le sujet de l’insécurité juridique dans laquelle sont plongés les praticiens à l’origine de signalements pour maltraitances infantiles.