Le législateur ne peut évidemment tout prévoir. En légiférant sur les accidents de travail, nos honorables députés ne se doutaient pas qu’un jour viendrait où, grâce à eux et au Pr Brissaud la langue s’enrichirait d’un vocable neuf.
Comment est venu au monde ce nouveau-né ? C’est, il y a quelques jours, à la quatrième chambre du tribunal civil que cette naissance a été enregistrée. Le « comparant » était un ouvrier qui, guéri des suites d’un accident (il était tombé d’une échelle et s’était fait des contusions sans gravité) avait repris son travail ; puis s’étant peu à peu persuadé à lui-même qu’il était encore malade, il avait réclamé de ce chef une indemnité à son patron qu’il rendait responsable, selon la loi.
Le Pr Brissaud, appelé à déposer comme expert, n’a pas craint de déclarer que cette préoccupation du sujet d’éprouver encore des douleurs imaginaires est devenue pour celui-ci le thème d’une méditation continuelle, obsédante et vraiment maladive. Il suffit de cet état mental si particulier pour entraîner la conviction qu’une maladie authentique s’est constituée de toutes pièces.
Un trouble mental qui n’a rien à voir avec l’hystérie traumatique
Comment définir cette maladie ? En l’absence d’un mot officiel consacré par un long usage, le Pr Brissaud a utilisé le barbarisme « sinistrose » pour préciser ce trouble mental, la « sinistrose » n’ayant rien à voir avec l’hystérie traumatique ou avec la neurasthénie traumatique, ni même avec la psycho-asthénie traumatique.