Détresse impuissante, sentiment d’incapacité à s’en sortir… Plus la tentative de suicide est banalisée par l’entourage, plus elle court le risque d’être renouvelée. "Puisqu’on ne prend pas mon appel au secours au sérieux, la prochaine fois j’irai un cran plus loin."
Chaque année en France 140.000 adolescents font une tentative de suicide et un tiers d’entre eux récidivent. Quelles sont les motivations de ces jeunes suicidants ? Comment sont-ils pris en charge ? Quel est leur suivi psychologique ? Comment éviter ces tentatives ?
Basé sur des témoignages de jeunes et de soignants, ce reportage, tourné au centre hospitalier René-Dubos à Pontoise, nous permet d’esquisser quelques réponses à ces questions.
"Le cancer ? C'est rien comparé au fait d'être rejetée après 18 ans de mariage", assure Linda, abandonnée par son mari, comme de nombreuses Algériennes, après une ablation du sein due à la maladie.
Après l'opération, son mari l'appelait "nass mraa" (demi-femme) ou "lamgataa" (la mutilée), raconte, d'une voix toujours nouée plusieurs années après, cette assistante médicale, mère de trois enfants qui l'ont soutenue face à leur père.
Zohra a, elle aussi, subi une ablation du sein en 2015. Après 25 ans de mariage, son époux a demandé le divorce, la laissant sans ressources. Il "a été odieux", assure cette mère au foyer de 53 ans.
Linda et Zohra ne sont pas des cas isolés. "Des centaines d'Algériennes sont abandonnées par leur mari après un cancer du sein", s'insurge Samia Gasmi, présidente de l'association Nour doha (Lumière du jour) d'aide aux cancéreux des deux sexes.
Samia Gasmi, présidente de l'association de lutte contre le cancer "Nur Doha", dans une chambre de l'association à Ghardaia, à 600 km au sud d'Alger le 30 octobre 2017
Rejetées au moment où elles doivent affronter le traumatisme de l'opération et de lourds traitements, "certaines sombrent dans la dépression", dit Mme Gasmi. "D'autres se retrouvent dans des centres d'accueil car elles n'ont nulle part où aller".
Difficile de parler de cancer du sein ou de mastectomie en Algérie, où ce qui touche à l'intime est généralement tabou. Les femmes ayant témoigné auprès de l'AFP ont requis l'anonymat et refusé d'apparaître à visage découvert.
Elles "considèrent leur maladie comme honteuse", explique Samia Gasmi. Une malade "a refusé d'en parler à sa propre s?ur", une autre "s'est mise à porter le foulard (islamique) avant la chimiothérapie, pour que sa belle-famille ne se doute de rien" et une femme a même "préféré mourir avec ses deux seins plutôt que d'accepter une ablation".
En 2016, un tiers des femmes qui ont accouché de leur premier enfant ont subi une incision du périnée. Un taux qui dépasse les 50 % dans une quarantaine d’établissements, principalement de petites cliniques privées.
« L’épisiotomie était ma plus grande peur, se souvient Coralie. Mais arrivée à la clinique, on m’a fait comprendre que si le médecin décidait d’en faire une, c’était comme ça, il ne fallait pas en faire tout un plat. » Elle a finalement subi une incision du périnée, sans être consultée. Dans cette maternité privée lyonnaise, il s’agissait d’un geste routinier, réalisé en 2016 sur 43 % des femmes ayant leur premier enfant. Pourtant, à quelques kilomètres, dans la clinique de Villeurbanne, le taux d’épisiotomie pour les premiers accouchements (« primipares ») n’est que de 8 %, soit cinq fois moins.
Comme le poids économique des troubles psychiatriques représente un sujet d’une importance mondiale, il n’est pas étonnant que deux grandes revues l’évoquent presque en même temps. The Australian & New Zealand Journal of Psychiatry d’une part, dans un article sur le « coût de la prévalence élevée des maladies mentales » en Australie ; et d’autre part une publication du Journal of Affective Disorders consacrée au « poids économique du trouble bipolaire de type I aux États-Unis. »
Point commun entre ces deux articles : la retombée financière des maladies mentales. Elle ne se cantonne pas aux seules dépenses de santé et d’assurance-maladie, mais a aussi « un large impact économique » en termes de perte de productivité au travail, y compris cette conséquence (souvent méconnue) pour la collectivité : une perte d’impôts sur le revenu pour l’état, liée précisément à l’effet préjudiciable de la maladie sur l’aptitude professionnelle des patients, donc sur le niveau de leurs revenus.
On le dit souvent, surtout lorsque l’on parle des États-Unis : les enfants et adolescents sont de plus en plus sous traitements psychotropes. Qu’en est-il en France ? Une équipe de Toulouse a voulu aller au-delà des fantasmes, et est pour cela allée à la source, en puisant les données des bénéficiaires de l’Assurance Maladie. En l’occurrence, c’est la prescription d’antidépresseurs qui était évaluée.
Dans de nombreux pays, l’usage des médicaments psychotropes tend à augmenter. Par exemple, indique The Australian & New Zealand Journal of Psychiatry, +6,8 % par an au Royaume Uni entre 1998 et 2010, et +22 % aux États-Unis, entre 2001 et 2010.
Le congrès de l’Encéphale a été l’occasion de présenter dans un poster les résultats de l’étude ETAPE ayant pour objectif l’évaluation de l’incidence des évènements indésirables chez les enfants et adolescents traités par antipsychotiques.
Les psychiatres du PsyLab ont présenté une communication insolite et inhabituelle lors d’un congrès scientifique, en explorant la représentation des troubles mentaux dans les séries télévisée. Qu’est-ce que le PsyLab ? Il s’agit d’une chaîne youtube au ton volontaire décalé et animé par deux psychiatres de Lille qui abordent diverses questions autour de la psychiatrie et de la santé mentale, en particulier à travers leurs illustrations dans le cinéma, les séries et les jeux-vidéos. La chaîne s’adresse surtout au grand public.
L’interaction entre les séries et les troubles mentaux est un vaste sujet, qui nous rappelle à quel point ce « deuxième âge d’or des séries » se caractérise à la fois par son foisonnement créatif et la justesse de son regard sur la société. On peut "s’amuser" à décrire des personnages de séries atteints de troubles mentaux, correspondant à autant de vignettes cliniques, pathologie par pathologie. Les animateurs de cette communication plaident d’ailleurs pour que les séries soient utilisées dans l’enseignement. Elles permettent en effet de passer au-delà de la relative froideur de la sémiologie "classique", pour avoir une fenêtre sur l’individu vu dans la vie "réelle", dans la complexité de son quotidien et de ses interactions sociales.
La présentation du plan d'actions pour la psychiatrie, érigée en priorité de santé, par la ministre de la Santé Agnès Buzyn le 26 janvier avait été chaleureusement applaudie au Congrès de l'Encéphale. Désormais, la profession attend la mise en œuvre de mesures concrètes, et indique qu'une préservation des moyens ne saurait suffire. Répondre aux besoins de la population nécessite des financements supplémentaires, demandent les psychiatres.
Le Conseil national professionnel de psychiatrie (CNPP), qui regroupe l'ensemble des syndicats et sociétés savantes de la psychiatrie*, salue dans un communiqué « la détermination affichée d'agir », de la ministre, et voit dans le plan d'actions une première réponse aux demandes exprimées le 18 décembre par les représentants de la psychiatrie, reçus au ministère de la Santé.
Interrogée par France 2 ce matin alors que la grève des personnels d'Ehpad débute aujourd'hui, Agnès Buzyn a assuré comprendre« l'épuisement » des personnels des maisons de retraite. La colère « est justifiée » dans les Ehpad, a-t-elle reconnu. « Je comprends l'épuisement des personnels », a ajouté la ministre de la Santé. Elle a rappelé la mise en place depuis septembre d'un groupe de travail sur la qualité de vie au travail et l'évolution des carrières dans les Ehpad, dont on attend encore les recommandations.
"Voir sans être vu", serait-ce le rêve du pouvoir ?
La surveillance pourra-t-elle un jour se passer de surveillants ? C'était déjà la question que se posait Foucault à l'époque de Surveiller et Punir en 1975. La fin annoncée des institutions de surveillance par Foucault est-elle toujours d'actualité ? Du panoptique de Bentham à la série Black Mirror, où en est l’œil du pouvoir dans nos vies ?
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Extraits
Michel Foucault par lui-même, film documentaire réalisé par Philippe Calderon (2003) Voir la vidéo ...
Le simple titre du dernier livre de Catherine Chabert fait sursauter tout un chacun. Maintenant, il faut se quitter… Mais pourquoi nous fait-il frémir ainsi? Ce n’est pas par hasard, bien sûr. C’est parce que la séparation et la perte ne sont pas des expériences parmi d’autres. Ce sont des épreuves qui révèlent non seulement les capacités de chacun à les admettre et à les supporter, mais aussi les tensions et les structures les plus profondes de la vie psychique et de la vie humaine en général. La perte et la séparation sont de douloureuses révélatrices, qui peuvent être destructives, mais aussi dans certains cas constructives et en tout cas face auxquelles il faut des attitudes réparatrices. Elles retentissent jusque sur la politique. Et même l’amour en est traversé : il passe par des phases de folie, tout comme le deuil ou l’angoisse, quoiqu’en sens inverse. Mais même la folie d’amour si elle se prolonge peut détruire, car il faut faire l’épreuve de la différence. La douleur de la séparation, est-elle le prix à payer pour la joie de la relation ?
La télémédecine, technologie permettant à un médecin d'ausculter un patient à distance, se développe dans certains Ehpad. À Saint Vincent de Paul, cet outil est une révolution.
Daniel a enfilé ses lunettes Google et inspecte la plaie sur le pied de Louise, 86 ans, bien installée dans son lit, au cœur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) de Saint Vincent de Paul, à Bruguières, près de Toulouse. Sur la lunette, une petite caméra est reliée à l'ordinateur. De l'autre côté de l'écran, un expert, spécialiste en angiologie, donne ses consignes à l'infirmier. Le temps d'une consultation, Daniel sera les yeux du médecin. «Plus bas… à gauche… Oui, voilà, ne bouge plus.» À distance, le docteur prend des photos des images qui l'intéressent. «Cette technologie permet de ne pas déplacer un patient dont la pathologie ne le permet pas mais aussi de faciliter les soins et de les améliorer», indique Jean-Noël Vidal, médecin coordinateur.
À l'occasion des traditionnels vœux de nouvelle année, Luc Bénet, directeur général de l'Association hospitalière de Bourgogne-Franche-Comté (AHBFC), a fait le point sur les grandes priorités auxquelles s'attachera l'organisation pour 2018, "année de mise en œuvre globale de [son] projet institutionnel" 2017-2021. Promotion de la recherche, développement de la e-santé, ressources humaines... Parmi les axes de politique générale identifiés, la nouvelle année signe également un travail de décloisonnement entre sanitaire et médico-social ainsi que le renforcement de l'activité médico-sociale en tant que telle.
« Ce sont les hommes qui violent, qui harcèlent, qui injurient et provoquent les femmes. C’est donc à nous de changer, individuellement et collectivement. » La réflexion de Didier, directeur d’hôpital de 52 ans, résume à elle seule l’un des enjeux majeurs du mouvement #metoo. En trois mois, des centaines de milliers de femmes ont témoigné des violences sexuelles et du sexisme dont elles ont été victimes en utilisant ce mot-clé et sa déclinaison française, #balancetonporc. Une libération de la parole qui, de fait, concerne aussi les hommes.
Entre la crainte d’une « chasse aux sorcières » et une « prise de conscience », les témoignages recueillis par Le Monde donnent à voir combien cette lame de fond, qui interroge les relations entre les deux sexes, bouscule les intéressés dans leur façon de penser, voire de se comporter.
« J’ai enfin compris pourquoi ma sœur avait peur de marcher dans la rue »
Léo, jeune père de 31 ans, avait déjà entendu des histoires d’agressions sexuelles et de harcèlement. Il a pourtant été « très surpris par l’étendue et la fréquence des comportements anormaux ». « C’était difficile de s’en rendre compte, explique-t-il. Ça m’a fait peur pour ma fille. » Même surprise pour François, étudiant en lettres : « Le mouvement #metoo a été une révélation. J’ai enfin compris pourquoi ma sœur avait peur de marcher dans la rue. »
La maison d’enchères Tajan organise le 30 janvier une vente dédiée à l’Art Brut, l’art naïf et la Neuve Invention. Une manière de mettre dans un même panier des artistes qui n’ont pas grand-chose en commun.
LE MONDE| | Par Roxana Azimi
Théorisée en 1945 par l’artiste Jean Dubuffet, l’appellation Art Brut désigne des artistes singuliers supposés indemnes de toute culture. Une catégorie vaste, où l’on retrouve aussi bien des marginaux tenus pour fous, des autodidactes, des simples d’esprit tourmentés, mais aussi des créateurs très sophistiqués. Pour Jean Dubuffet, l’Art Brut devait échapper au marché. Ce dernier l’a pourtant rattrapé comme en témoigne l’enchère de 672 500 dollars (542 340 euros) décrochée par un dessin de l’Américain Henry Darger, dans la vente d’Art Brut de Christie’s le 19 janvier à New York.
Louis Soutter (1871-1942), « Hote (diable s’asseyant) », encre sur papier, estimé entre 80 000 et 100 000 euros. LEA GRYZE
Les chambres étaient neuves, les murs peints de couleurs vives. On avait mis des tablettes numériques et même un aquarium dans le « lieu de vie » de cette maison de retraite de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Stéphanie Crouzet, aide-soignante de 40 ans, espérait avoir trouvé enfin « un lieu où on me laisserait le temps de faire convenablement mon travail ». Un mois plus tard, les poissons étaient morts. On les avait laissés au fond du bocal, faute d’entretien.Un soir, au moment du coucher, une résidente avait confié avoir vécu « un grand luxe, parce qu’elle avait eu le droit à une douche ». C’était sa sixième en six mois.
« L’ascenseur parlait plus souvent aux résidents que le personnel de soin », résume l’aide-soignante,qui a préféré arrêter les remplacements dans cet établissement privé, où la chambre coûte au moins 3 000 euros par mois à un résident. Une situation extrême, de l’aveu de Stéphanie Crouzet, mais qui reflète le malaise grandissant du personnel soignant des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
L’octroi jeudi d’une nouvelle enveloppe de 50 millions d’euros par le gouvernement n’a pas convaincu. Les personnels des maisons de retraite feront grève mardi.
C’est une première. Mardi 30 janvier, les personnels des maisons de retraite sont appelés à la grève par sept syndicats (CGT, CFDT, FO, UNSA, CFTC, CFE-CGC et SUD) avec le soutien de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). Des débrayages dans les établissements et des rassemblements sont prévus dans toute la France, dont un devant le ministère de la santé, à Paris. Il n’est pas prévu que les représentants syndicaux y soient reçus.
« Il est inadmissible de ne pas prendre en compte la souffrance au quotidien que subissent professionnel, et par là même personnes âgées et familles », commentent les organisations syndicales dans un communiqué publié dimanche 28 janvier.
Voici plusieurs mois qu’elles sonnent l’alarme sur la détérioration des conditions de travail dans les Etablissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), et par conséquent la dégradation de l’accompagnement des résidents. Ces derniers arrivent en établissement de plus en plus âgés, atteints de handicaps physiques et de troubles psychiques de plus en plus importants. Le personnel n’est pas assez nombreux ni assez préparé.
Dans une lettre, le réalisateur Michel Hazavanicius et le journaliste Raphaël Glucksmann appellent les hommes à se joindre au mouvement #metoo de libération de la parole des femmes contre les violences sexuelles.
LE MONDE|
« Nous aussi, nous voulons l’égalité. » Plus de trois mois après le début de #metoo, grand mouvement de libération de la parole des femmes contre les violences sexuelles, le réalisateur Michel Hazavanicius et le journaliste Raphaël Glucksmann ont appelé les hommes à exprimer leur soutien aux femmes.
Dans une lettre ouverte publiée dans Le Nouveau Magazine littéraire (dont Raphaël Glucksmann est le directeur de la rédaction), ils prennent la parole « à [leur] tour », et se positionnent contre « des structures de dominations ».
2001 |"A l'écoute de Jacques Lacan", par Christine Goémé, troisième volet, sur cinq, d'une émission diffusée pour la première fois le 4 avril 2001. Elle proposait des extraits d’entretiens avec Jacques Lacan enregistrés en 1970, éclairés par Alain Grosrichard, fondateur des "Cahiers pour l'analyse".
En 1970, Jacques Lacan accordait à Robert Georgin un entretien pour la radiodiffusion belge, publié la même année sous le titre : Radiophonie. Dans le cadre d'une série d'émissions réalisée pour "Les Chemins de la connaissance" en 2001 et intitulées « A l’écoute de Jacques Lacan », Christine Goémé proposait d'en faire entendre plusieurs extraits, et de les éclairer en invitant pour chaque émission un spécialiste de la pensée lacanienne.
Les personnels des EHPAD se mobilisent ce mardi dans toute la France, avec le soutien des familles. Ils réclament des recrutements et de meilleures conditions de travail. En Alsace, près de 17.000 seniors vivent dans ces structures spécialisées.
Les personnels des EHPAD, établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, se mobilisent ce mardi 30 janvier 2018 dans toute la France, avec le soutien des familles. Les principaux syndicats présents dans l'action socialeappellent les agents à faire grève ce mardi. Ils réclament des recrutements, pour atteindre le seuil d'un salarié par résident, comme le prévoyait en 2006 déjà le plan "solidarité grand âge". Ils demandent aussi une amélioration des rémunérations et des carrières, ainsi que des moyens pour leurs établissements. Aujourd'hui, faute de renforts, les personnels se disent épuisés.
« La psychiatrie s’est paupérisée. C’est une discipline sur laquelle il n’y a pas eu un vrai investissement depuis des années », constataitAgnès Buzyn dans un entretien accordé au « Monde » vendredi. Face au manque de moyens financiers et de reconnaissances de la psychiatrie, alors que la société est selon elle devenue « plus dure », la ministre de la Santé, de passage au congrès de l’encéphale à Paris, a annoncé douze mesures d’urgence pour la discipline. Et les généralistes seront sollicités.
Selon la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, on ne trouvera pas de remède aux maux de la prison sans une politique de désinflation carcérale.
LE MONDE| |Par Adeline Hazan (Contrôleure générale des lieux de privation de liberté)
Tribune. Si la crise pénitentiaire vient de loin et si ses causes sont multiples et bien connues, le conflit des surveillants s’est durci dans des conditions inattendues, provoquant dans toute la France des troubles durables qui mettent en lumière une situation depuis longtemps dénoncée par tous ceux qui connaissent la prison.
L’insécurité vécue par les surveillants pénitentiaires est réelle. La saturation des capacités pénitentiaires, que l’on résume trop souvent par l’expression de « surpopulation carcérale », place les surveillants dans l’obligation d’effectuer un nombre de tâches que leur temps de travail ne peut absorber, car c’est le nombre des places « théoriques » qui détermine l’effectif des surveillants, pas celui des détenus présents. Dès lors, le personnel pénitentiaire est soumis à un rythme effréné qui lui est à juste titre insupportable.
Pour les détenus, les difficultés ne se résument pas à la promiscuité induite par la surpopulation et donc, finalement, à une question de « confort ». Elles touchent au contraire les aspects de la prise en charge : l’accès aux douches est réduit, les promenades et parloirs sont raccourcis, le courrier tarde, le travail est inaccessible, les soins deviennent parcimonieux. L’ensemble des actions de préparation à la sortie, c’est-à-dire ce qui, en réalité, prévient efficacement la récidive, est entravé. Enfin, la surveillance est insuffisante, donc les trafics et la violence se développent.