Une clôture fait débat au pôle de santé mentale - Mayenne
mercredi 10 mars 2010
Installée par la direction de l'hôpital, elle cerne deux pavillons de 27 places. Les syndicats s'insurgent contre une mesure « rétrograde ».
La polémique
Une clôture renforcée de trois mètres de haut qui cerne depuis quelques jours la cour des pavillons P3 et P4, au service de psychiatrie du centre hospitalier, boulevard Paul-Lintier. Une façon de protéger la population de la menace que constituent les patients ? « Cette clôture est destinée aux patients qui nécessitent une surveillance accrue, répond Véronique Hamon, directrice du centre hospitalier. Mais ils ne sont pas plus dangereux que d'autres, qui ne sont pas hospitalisés, ou pas reconnus comme malades. Cette mesure vise aussi, et surtout, à protéger certains patients contre eux-mêmes ».
La clôture est aujourd'hui activement critiquée par les syndicats. « La direction du centre hospitalier vient de franchir un nouveau pas dans la stigmatisation des malades mentaux, dénonce Jean Thouroude, secrétaire de la CFDT santé sociaux de la Mayenne. Elle transforme des services de soins en véritables lieux carcéraux. Les malades mentaux ne sont pas dangereux. Ils meurent davantage par manque de soins, en prison, par suicide, qu'ils ne commettent d'actes délictueux. »
« Du personnel, pas de grillages »
Une idée partagée par la CGT : « Nos patients sont plus souvent victimes que coupables, souligne Bernard Chemin, délégué syndical et infirmier psychiatrique. Cette clôture rétrograde est à l'opposé de notre approche humaine des soins. C'est choquant pour les familles en visite. Et vraiment triste pour le service de psychiatrie de Mayenne, érigé en modèle national dans les années 70. »
Et qu'en est-il de l'effet produit sur les patients eux-mêmes ? « Ce sentiment d'enfermement peut consolider une dépression, avance un membre du personnel. Nous accueillons aussi des personnes qui ont tenté de se suicider. Certaines sont là de leur plein gré. En voyant cette clôture, elles doivent se croire à l'asile. »
Pour la CFDT, cette réaction est « l'application du discours du 2 décembre 2008 du président Nicolas Sarkozy, qui réclamait une psychiatrie sécuritaire, en proposant aux établissements des financements spécifiques ». Les syndicats réclament au contraire « plus de personnel, formé à l'écoute des patients. Mais pas de murs, ni de grillages ». Réponse de la direction : « Nous avons des moyens pour du matériel seulement ».
Jean Thouroude accuse également la direction d'avoir pris cette décision « sans concertation avec le personnel ». « Faux, rétorque Véronique Hamon. Mais il est vrai que ces clôtures sont peut-être plus impressionnantes que certains ne l'imaginaient. Elles sont cependant nécessaires, puisqu'elles agrandissent les espaces fumeur des patients, devenus trop étroits. Et seront rendues plus agréables, mieux aménagées. »
Julien BELAUD.