Alors que le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes conduit toute une batterie d'auditions préalables à la publication, au printemps 2018, d'un rapport sur les violences obstétricales, demandé par la secrétaire d'État Marlène Schiappa, le Collectif interassociatif autour de la naissance (Ciane) rend publiques ses propositions pour lutter contre la maltraitance. Le Ciane la définit comme une « perturbation de la relation de soins comprise dans sa globalité », caractérisée par des faits isolés ou cumulés de violence verbale, de déni de la douleur (ou de mauvaise prise en charge), d'absence d'information et de recherche du consentement de la patiente, d'accompagnement et de respect de l'intimité, etc.
Pour un observatoire de la maltraitance
Le Ciane propose d'abord d'objectiver et de documenter la maltraitance, afin d'améliorer la prise de conscience des soignants (qui ne sont pas tous insensibles à ces questions, pas plus qu'au gynéco-bashing, comme l'a montré « le Quotidien »). La création d'un observatoire national de la maltraitance envers les patients permettrait de recenser toutes les dérives, au-delà de la gynécologie et de l'obstétrique, et de concentrer leurs signalements, aujourd'hui épars. Le Ciane encourage en parallèle la remontée des problèmes via les canaux existants : la déclaration des évènements indésirables graves liés aux soins, la saisie du Défenseur des droits en cas de manquements à la loi sur le droit des malades, et des commissions des usagers des établissements et réseaux.
Le Ciane appelle à sensibiliser les professionnels de santé à cette maltraitance banalisée, ordinaire. Comment ? En complétant les enseignements théoriques par la confrontation avec l'expérience vécue des usagers, grâce à l'intervention de patients formateurs, de jeux de rôle, de simulation relationnelle. La formation des soignants doit aussi intégrer des enseignements sur l'éthique, l'écoute active, les préjugés ou biais de perception en santé, mais aussi sur le syndrome de stress post-traumatique afin de mieux le détecter et d'orienter les femmes vers une prise en charge ad hoc. Le collectif demande la diffusion des bonnes pratiques sur l'ensemble du territoire, et son évaluation.
Pour améliorer la communication entre les patients et les soignants, le Ciane réclame que des moyens soient mis en œuvre pour les non francophones et les personnes en situation de handicap : recours à l'interprétariat, livrets d'information traduits, etc.
Recentrer le système de soins autour de la patiente
Au niveau organisationnel, le Ciane plaide pour un système centré sur la patiente : « la gestion d'un service et l'organisation des soins doivent être pensées en fonction des besoins de sécurité affective, psychique et médicale des femmes », lit-on, à rebours d'un système où la femme doit s'adapter à l'hôpital. Concrètement, le Ciane demande une augmentation des ressources humaines en maternité, une meilleure coordination entre la ville et l'hôpital et une réelle diversité des lieux et modes de naissance (maternité, maison de naissance, accouchement à domicile, filière physiologique, etc).
Pour mieux réparer les violences obstétricales, le Ciane milite pour la prise en charge à 100% par l'assurance maladie des consultations de psychothérapie, à l'issue d'un antécédent obstétrical traumatique ou un accouchement traumatique, et pour la mise en route d'une réflexion de la part des experts médicaux et juridiques.
Enfin, le Ciane réclame une grande campagne d'information grand public sur les droits des patients, la mise à disposition d'indicateurs sur les pratiques en maternités, qui soient co-construits avec les usagers, et un renforcement de la place des usagers dans les instances comme la Haute Autorité de santé, les réseaux de santé en périnatalité, etc. « Les associations d'usagers sont les experts des questions de la maltraitance obstétricale. Les professionnels de santé seuls ne sont pas en mesure de proposer des mesures pertinentes pour prévenir la maltraitance et obtenir une réparation pour les victimes », juge le Ciane.
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