Si la reconnaissance par le tribunal du contentieux de l’incapacité de Toulouse d’un handicap dû à l’électrosensibilité constitue une première en France, il ne s’agit pas pour autant d’une reconnaissance de la maladie. Le débat fait en effet rage entre médecins, associations, sociétés savantes et agences de régulation. Dans son avis rendu en 2013, l’Agence nationale de sécurité sanitaire alimentation, environnement, travail (ANSES) estimant que les niveaux de preuves disponibles étaient insuffisants en ce qui concerne l’impact des ondes électromagnétiques sur les fonctions cognitives, le sommeil, les fonctions auditives ou les maladies neurologiques.
Les auteurs de l’ANSES avaient également passé en revue les travaux qui recherchait un mécanisme neurotoxique. Ils étaient parvenus à la conclusion que les ondes électromagnétiques n’avaient aucun impact sur l’apoptose, sur l’inflammation après une exposition aiguë, sur la plasticité cérébrale ne provoquaient aucune modification de l’expression de divers marqueurs du stress oxydant. Par ailleurs, aucun effet sur la barrière hématoencéphalique n’a pu être mis en évidence sur les modèles biologiques testés.
Des malades qui doivent être pris en charge
Pour l’Académie de médecine, les symptômes que les patients attribuent à l’électrosensibilité pourraient être la manifestation de « phobies ».
Elle cite des études en aveugle ayant montré que les personnes électrosensibles « incriminent les ondes sans savoir faire la différence entre un émetteur de radiofréquence éteint ou allumé ». Elle reconnaît néanmoins que les électrosensibles éprouvent une « réelle souffrance » qui peut entraîner un « lourd handicap » et doit « être prise en charge comme une affection à part entière ». La position de l’Académie est cohérente avec la décision du tribunal qui a constaté le handicap de la plaignante, Marine Richard, sur la base de la description de signes cliniques « irréfutable », sans se prononcer sur leurs causes. Le tribunal lui a donc attribué une allocation pour adulte handicapé pour trois ans, éventuellement renouvelable, sous forme d’aide technique et d’aménagement de son logement.Des symptômes avérés, mais un lien incertain
Pour le Pr Dominique Belpomme, interrogé par l’AFP, « il est clair » que les patients qu’il reçoit dans sa consultation spécialisée souffrent d’une maladie « liée à des champs magnétiques ».
En 2005, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait reconnu l’existence de symptômes potentiellement graves, pouvant varier d’un individu à l’autre, mais elle estimait qu’il n’existait ni critère clair pour un diagnostic, ni base scientifique permettant de faire le lien à une exposition aux champs électromagnétiques.
Le conseil scientifique de la Commission européenne (Scenihr) est arrivé à la même conclusion.
Sous la pression des associations de malades, l’ANSES a lancé la rédaction d’un nouveau rapport sur l’électrosensibilité qui devrait être publié au début de l’année prochaine.
Damien Coulomb
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