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samedi 28 janvier 2012


Avec sa loi sur la précarité, le gouvernement donne des gages aux fonctionnaires

LEMONDE | 25.01.12

Nicolas Sarkozy devrait finir son quinquennat par une réforme destinée àrasséréner les fonctionnaires et à contenter globalement les syndicats. François Sauvadet, le ministre de la fonction publique, devait présenter, mercredi 25 et jeudi 26 janvier, en première lecture au Sénat, un projet de loi visant à y résorberla précarité. Le plan, massif, concerne potentiellement 150 000 agents de l'Etat, des collectivités territoriales et du secteur hospitalier : ceux qui ne bénéficient pas du statut de fonctionnaires, voire qui enchaînent les contrats à durée déterminée (CDD).

La majorité de gauche au Sénat s'apprête à voter le texte, adopté à l'unanimité en commission des lois. Rapporteure du texte, Catherine Tasca, sénatrice (PS) des Yvelines, se félicite qu'il donne une traduction législative à un accord signé entre le gouvernement et six organisations syndicales (UNSA, CGT, FO, CFDT, CGC, CFTC, pas la FSU ni Solidaires).
Nicolas Sarkozy s'était engagé à faire cette réforme, en janvier 2010. Il l'a motivée, une nouvelle fois, le 11janvier 2012, lors de ses vœux aux fonctionnaires : "Ce n'est pas normal qu'au prétexte que vous travaillez pour l'Etat on vous renouvelle pendant six ans un contrat et on vous révèle la septième année que vous êtes un précaire." Sur ce point, la fonction publique fait en effet figure de mauvais employeur. La loi Dutreil de 2005 a rendu possibles les contrats à durée indéterminée (CDI) mais n'a pas jugulé la croissance du nombre de contractuels en situation prolongée. Or, ces derniers ne bénéficient pas du statut de fonctionnaire.
Dans l'ensemble de la fonction publique, ils sont plus de 890 000 contractuels, soit 16,8 % du total. Ils sont même 20,5% dans la fonction publique territoriale.
"TONNEAU DES DANAÏDES"
Pour combler ce que des syndicalistes appellent le "tonneau des Danaïdes" de la précarité, le gouvernement se donne deux armes: son texte instaure d'abord le basculement automatique en CDI de tous les agents ayant six ans d'ancienneté au moment de l'adoption de la loi. Ce sont 100000agents qui pourraient enbénéficier.
Le projet de loi prévoit aussi que tout contractuel en CDD avec deux ans d'ancienneté au moment du vote de la loi, ou déjà en CDI, pourra prétendre àdevenir titulaire. Jusqu'en 2016, il pourra passer des concours spécifiques qui prendront en compte son expérience. Ce sont 50000agents qui pourraient ainsiêtre titularisés.

Lors des négociations menées avec le gouvernement à l'automne 2010, les représentants des collectivités territoriales n'ont guère souhaité durcir le texte, pointent les syndicats et le ministère. "En nous montrant du doigt, le gouvernement est démago, réplique Alain Rousset, président (PS) de l'Association des régions de France. L'Etat a transféré aux régions et aux départements des centaines d'agents pour l'entretien des collèges et des lycées. Il avait pour habitude de les licencier d'année en année en juin pour lesréembaucher comme précaires en septembre. Nous les avons titularisés", souligne le président de la région Aquitaine.
Les syndicats ont bataillé, en vain, pour élargir les possibilités d'accès à une titularisation. "Le projet de loi facilite davantage le passage en CDI que la titularisation, regrette Jean-Marc Canon, (CGT fonction publique). On ne peut pas ne pas voir une volonté idéologique du gouvernement d'aller vers une extinction du statut de fonctionnaire", déplore-t-il.
Dans l'enseignement supérieur, les syndicats ont dénoncé, mardi 24 janvier, des amendements que le gouvernement a prévu de déposer lors de la discussion à l'Assemblée nationale, le 7 février. Ils viseraient selon eux à "exclure des milliers d'enseignants-chercheurs, de chercheurs et d'ingénieurs de recherche de la possibilité d'obtenir un CDI ou une titularisation""Cette question a fait l'objet de l'accord signé avec les syndicats en mars2011, mais nous sommes prêts à en reparler", répond le cabinet de M. Sauvadet. Le ministère assimile le courroux des syndicats sur ce point à une "surenchère entre eux", à la veille du vote du texte.
Béatrice Jérôme et Isabelle Rey-Lefebvre

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