VICHY
JUSTICE
SAMEDI 25 SEPTEMBRE 2010
Tribunal : « Tout est dans le dosage ! »
Il s'était jeté sur une passante dans la rue et avait tenté de lui arracher sa culotte. Sans raison. De là à penser qu'il n'avait pas toute sa raison ?
JUSTICE
SAMEDI 25 SEPTEMBRE 2010
Tribunal : « Tout est dans le dosage ! »
Il s'était jeté sur une passante dans la rue et avait tenté de lui arracher sa culotte. Sans raison. De là à penser qu'il n'avait pas toute sa raison ?
Bruno n'est pas fou. Enfin pas complètement. C'est la médecine qui le dit. En des termes plus soignés. L'expert psychiatre qui l'a examiné l'a qualifié de débile léger et a conclu qu'il était responsable pénalement de ses actes. Tout en précisant que son discernement était « entravé » par ses pulsions.
Conséquence du diagnostic : il peut être jugé par un tribunal. C'est ce qui conduit Bruno à répondre de l'agression d'une passante, le 30 juillet 2009, dans une rue de Saint-Pourçain-sur-Sioule. Sans raison, il s'était approché d'elle, l'avait prise par l'épaule, avait relevé la robe et tenté d'arracher la culotte.
Bruno a répondu à la convocation. Accompagné de son frère qui est aussi son tuteur légal. Et d'un avocat. Il est présent physiquement. Mais semble ailleurs. Les yeux mi-clos, le teint livide, le regard dans le vague, la main gauche tremblante, cet homme de 44 ans en paraît au moins dix de plus.
« Vous vous souvenez ? », tente le substitut. Jusque là mutique, Bruno comprend soudain qu'on s'adresse à lui. Roule des yeux. Se retourne vers son avocat. Qui lui répète la question. « Non », répond-il après un moment d'hésitation. Le substitut n'insiste pas.
Un malaise s'installe. Le tribunal ne cache pas son embarras. Légèrement en retrait du prévenu, la victime a du mal à contenir son émotion. Elle n'a de cesse de triturer ses doigts. Ses yeux laissent deviner des larmes. On lui demande ce qu'elle réclame au titre de la partie civile. « Que cette personne ne ressorte plus de l'hôpital psychiatrique », marmonne-t-elle, timidement.
Plutôt que de se heurter à un prévenu emmuré dans sa pathologie, le président Labonne prend le temps d'expliquer à la victime les limites de la justice. « On ne contrôle pas la psychiatrie. Si le médecin considère qu'il peut vivre en dehors de l'hôpital, on n'y pourra rien. Vous pouvez seulement demander des dommages et intérêts ».
La marge de manœuvre du tribunal apparaît mince. La prison ? « Est-ce bien sa place ? », s'interroge le président. L'obligation de soins ? « Il a déjà fait tout ce qu'il fallait pour se soigner », souligne son frère. « La difficulté, relève également le juge, c'est que, dehors, c'est lui qui gère son traitement, sachant qu'il peut très bien oublier de prendre ses médicaments, sans même s'en rendre compte ».
La castration chimique ? « Ce pourrait être la solution la plus adaptée à son cas », suggère le président. « Encore faut-il que le traitement soit compatible avec son état de santé ». Et le frère d'observer : « Il a fait une occlusion intestinale il y a trois ans. Il ne supporte plus les médicaments ». « Tout le problème est dans le dosage. Quand on le baisse, ses pulsions reprennent le dessus, renchérit Me Laurent Gard. Et quand on l'augmente, on prend le risque de nuire à sa santé ».
« La justice est bien désarmée par rapport à ce genre de comportement », se désole le substitut du procureur. Il suggère une peine d'encadrement, soit un an de prison assorti d'un sursis et mise à l'épreuve et d'une obligation de soins. Le tribunal suivra ses réquisitions en fixant la période d'encadrement à trois ans. La victime a obtenu 800 ? de dommages et intérêts.
Bruno est ressorti du tribunal comme il y était entré. Mutique. Il a réintégré l'établissement psychiatrique où il est actuellement placé.
Jean-Pierre Ducros
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