Beaux métiers que ceux de pharmacien, chimiste ou médecin, où l’on peut planer en travaillant, sous couvert de remplir une mission de recherche ! Depuis le XIXe siècle, nombre de scientifiques ont ainsi expérimenté sur eux-mêmes la molécule psychoactive qu’ils venaient de découvrir, ou une drogue dont ils voulaient mieux comprendre les effets. Au risque, toutefois, de sombrer eux-mêmes dans la toxicomanie…
Persuadé que la cocaïne pouvait être un médicament puissant, notamment pour traiter l’addiction à la morphine, Sigmund Freud (1856-1939) l’a testée sur lui-même, et est devenu cocaïnomane pendant plus de dix ans. La même mésaventure est arrivée au chirurgien américain William Stewart Halsted (1852-1922), tombé dans la poudre blanche en explorant ses propriétés d’anesthésique local.
D’autres, comme le pharmacien allemand Friedrich Wilhelm Adam Sertürner (1783-1841), reconnu comme le père de la morphine, ont failli payer de leur vie leurs audacieuses expériences. Agé d’une vingtaine d’années, Sertürner n’est encore que stagiaire dans une pharmacie en Westphalie (Allemagne) quand il commence à s’intéresser à l’opium, en 1803. Son objectif est d’identifier le principe actif de cette plante dont les vertus médicinales sont connues depuis des siècles. Avec les moyens limités de l’époque, et une infinie patience pour mener à bien la cinquantaine d’étapes nécessaires, le jeune pharmacien réussit à isoler la morphine. Il en administre alors des cristaux, mélangés à de la nourriture, à des souris et des chiens. Les animaux s’endorment. Ils ne se réveilleront pas.