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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

jeudi 22 décembre 2011


“Comment vas-tu point d’interrogation”


La lecture de la semaine est un article du New York Times, signé Nick Wingfield et il s’intitule : “Le bon vieux temps des malotrus accrochés à leur téléphone portable”.
Est-ce que parler au téléphone est la même chose que parler à son téléphone ? se demande pour commencer le journaliste.
siri_hero
Le bruit produit par quelqu’un discutant sur un téléphone portable fait partie de la bande-son de notre vie quotidienne, et la plupart d’entre nous a appris à être silencieux – ne pas parler dans les wagons zen des TGV par exemple. Mais les règles de savoir-vivre concernant la manière dont on s’adresse à un téléphone – et plus précisément à un “assistant virtuel” comme le Siri d’Apple, disponible sur le nouvel Iphone 4S – n’existent pas encore, pour le malheur des gens qui sont autour. D’abord parce que les conversations avec des machines ont un aspect mécanique et troublant. Ensuite il y a un problème de ponctuation : si vous voulez une marque de ponctuation, il faut la nommer. “Comment va-t-il point d’interrogation comment vas-tu point d’interrogation”, Jeremy Littau s’est récemment retrouvé dire cela alors qu’il marchait dans la rue en dictant un texto à sa femme qui était restée chez eux avec leur nouveau-né. La machine Siri lui parlait avec sa voix synthétique et féminine. Les passants étaient stupéfaits : “Ce n’est pas un comportement humain normal d’entendre quelqu’un avoir une conversation avec son téléphone dans la rue”, conclut Jeremy Littau qui est professeur-assistant de journalisme et communication à l’université de Lehigh.


La technologie des téléphones portables à commande vocale existe déjà depuis quelques années – elle permet aux gens de donner des ordres à leur téléphone comme à un factotum numérique, de lui dicter un texto, de noter un rendez-vous sur leur agenda ou de chercher le restaurant de sushi le plus proche. Néanmoins, avec Siri, Apple a franchi une étape supplémentaire. “Bon anniversaire smiley”, c’est ce que Dani Klein a entendu dire par un homme à son téléphone sur Long Island Rail Road, ce monsieur voulant insérer un émoticon dans un texto. “C’était ridicule”, explique Klein, 28 ans, qui travaille dans le marketing sur les réseaux sociaux. Parler à son téléphone est tellement nouveau qu’il n’y a pas encore de règle établie, dans les transports en commun en particulier.

La commande vocale dans les smartphones est d’abord apparue il y a quelques années quand certains appareils ont permis de faire des recherches sur Internet et quelques autres tâches. Mais le Siri d’Apple, introduit cet automne, est une version beaucoup plus sophistiquée de cette technologie, il répond à des phrases apparemment normales comme “Quel temps fait-il ?” ou “Réveille-moi à 8h”. Apple a aussi donné une once de personnalité à Siri, renforçant l’impression des usagers de l’Iphone qu’ils sont vraiment en train de parler à quelqu’un. Demandez à Siri quel est le sens de la vie et il vous répondra : “Je trouve étrange que vous posiez cette question à un objet inanimé”. Pour autant, “je ne crois pas que le clavier va disparaître”, expliquait Martin Cooper qui a développé le premier téléphone portable pour Motorola dans les années 70.
Un autre aspect irritant qu’il y a à écouter des gens parler à leur téléphone est que la plupart des choses que l’on fait avec des commandes vocales peut aussi être fait dans le silence. Billy Brooks, 43 ans, faisait récemment la queue chez un concessionnaire automobile à Los Angeles quand une femme a rompu le silence dans la pièce pour dicter un message à son Iphone : “Vous gênez inutilement les gens alors que vous pourriez tout simplement taper votre message”, dit Brooks, ajoutant que le comportement de cette femme était “ridicule et un peu pathétique”. James E. Katz qui dirige le Centre d’étude sur la communication mobile à Rutgers dit que les gens qui utilisent les commandes vocales de leur téléphone créent une gêne pour les autres – du bruit – au lieu de s’en infliger une à eux-mêmes – l’inconfort de taper lentement un message sur leur clavier. M. Katz compare ce comportement avec celui de quelqu’un qui laisserait tourner le moteur de sa voiture alors qu’il est garé, provoquant du bruit et des émissions de carbone.
Bien qu’Apple ait tenté de rendre possible une conversation presque naturelle avec Siri, le résultat est souvent inverse. Nirav Tolia, entrepreneur numérique, était dans un ascenseur bondé qui l’emmenait jusqu’à son bureau à San Francisco quand un homme a essayé d’utiliser Siri pour trouver la nouvelle adresse d’un café, le Coffee Bar. Le téléphone lui a donné une liste de café – pas les bons – l’obligeant à réitérer sa demande à plusieurs reprises. “Eh mec, t’as qu’à dire Starbuck”, a fini par lui dire un passager quand les portes de l’ascenseur se sont ouvertes. En parlant à leur téléphone, les gens finissent même par avoir des airs de machines. Jimmy Wong, 24 ans, était dans un restaurant à Los Angeles avec des amis quand ils se sont retrouvés à côté d’un homme qui demandait à Siri de prendre des notes et d’écrire des mails. Ils ont trouvé la conversation de l’homme avec son téléphone “flippante”, dénuée de toute pause naturelle dans la diction et des inflexions de voix qui marquent une conversation entre deux personnes. “C’est très mécanique”, ajoute-t-il. Et le groupe n’a pas pu s’empêcher d’écouter. Les gens qui étudient le comportement des usagers de téléphone portable pensent que la conscience qu’on a, dans les hôtels, les aéroports ou les cafés, qu’on est en train d’entendre des gens parler à leur assistant numérique, disparaîtra avec le temps. “Nous verrons une évolution de l’irritation première, qui donnera lieu à un dessin satirique dans le New Yorker, mais au bout d’un moment ce sera globalement accepté”, explique M. Katz. Mais, prédit-il, “il y aura toujours une petite minorité de conservateurs qui pleureront le bon vieux temps où les gens écrivaient leur texto quand ils étaient en public”.
Xavier de la Porte

Le service de santé au travail touché par la désertification médicale

12 décembre 2011

Le service de santé au travail de la Manche est actuellement en retard sur les visites médicales que doivent subir tous les deux ans, les salariés de ses 10 000 entreprises adhérentes. En cause, la désertification médicale mais aussi l'absence des décrets de la loi promulguée en juillet dernier, qui autorise des équipes plurisdisciplinaires à assurer un entretien infirmier, en lien avec un médecin coordinateur. Une situation évoquée cet après-midi lors de l'assemblée générale du Service de santé au travail à Saint-Lô, par le président Didier Morisset, qui est également président de la fédération régionale des services de santé au travail.
Les «fous» de Champ-Dollon

Selon une publication médicale, 46% des détenus de la prison genevoise souffrent de troubles psychiques. Le directeur de l’établissement explique pourquoi cela ne l’étonne pas.
Laszlo Molnar

28 décembre 2010

A Champ-Dollon (GE), près d’un détenu sur deux (46%) souffre de troubles psychiques. Chez les femmes, ce chiffre monte à 56%, selon une étude d’Ariel Eytan et de Hans Wolff, des Départements de psychiatrie et de médecine communautaire des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

Les deux auteurs de l’étude, publiée dans l’International Journal of Law and Psychiatry, ont analysé les dossiers de 1510 détenus – dont 76 femmes – ayant fait appel à l’unité médicale de la prison genevoise en 2007. Ils constatent que le principal symptôme décelé est la dépression. Elle touche 9,6% des hommes et plus de 22% des femmes incarcérées. Les troubles de la personnalité ou de l’adaptation sont moins fréquents, comme d’ailleurs les psychoses à proprement parler (1,2% et 5,3%).

Drogués et alcooliques


Mais les psychiatres genevois incluent les personnes dépendantes – d’une drogue, de l’alcool, voire du tabac – dans leur rapport. Et ils sont nombreux: plus de 41% d’entre elles souffraient d’alcoolisme avant leur incarcération, 36% fumaient régulièrement du cannabis, près de 27% prenaient de la cocaïne et 17% étaient des héroïnomanes. Ainsi, 31% des prisonniers se retrouvent dépendants de benzodiazépines (BZD), une classe de médicaments psychotropes utilisés dans le traitement de l’anxiété, de l’insomnie, de l’agitation psychomotrice, des convulsions, des spasmes, ou dans le contexte d’un syndrome de sevrage alcoolique.

La comorbidité (troubles associés) entre le tabac (70% des prisonniers fument), l’alcool et d’autres produits est de plus très fréquente. Elle est souvent associée à l’anxiété, à l’insomnie, ainsi qu’à des problèmes de peau, dus généralement aux seringues. Mais une chose surprenante est également démontrée: si 1,5% de ces prisonniers souffrent d’un stress post-traumatique (un état morbide dû à un événement exceptionnellement violent), on ne trouve aucune femme dans cette catégorie. Cependant, 70% des prisonnières ont subi des violences ou des abus sexuels.

Cette première étude fournissant une description détaillée de la santé mentale des détenus de la plus grande prison préventive de Suisse ne surprend pas Constantin Franziskakis, directeur de la prison de Champ-Dollon. «Les chiffres peuvent sembler élevés, relève-t-il au téléphone. Mais il faut se dire que l’anxiété des détenus, surtout ceux qui sont emprisonnés pour la première fois, est immense. Des symptômes qui passeraient inaperçus chez les gens vivant en liberté se révèlent omniprésents en milieu carcéral. Il faut par exemple prendre en compte le sevrage que subissent les délinquants dépendants d’une drogue ou de l’alcool. Ils risquent de faire des réactions psychiques importantes quand ils se retrouvent derrière les barreaux.»

Les effets de la surpopulation

Prévue pour 270 personnes, la prison de Champ-Dollon comptait entre 450 et 500 détenus à l’époque de l’étude. Mais la barre des 600 a été dépassée en mai dernier et un record de 622 détenus a été atteint le 19 juillet. Heureusement, une annexe d’une centaine de places devrait voir le jour l’an prochain.

«Réduire la surpopulation irait dans le bon sens en permettant de diminuer les tensions à l’intérieur de l’établissement, tant entre détenus et personnel de surveillance que concernant les détenus entre eux», estime pour sa part le Dr Ariel Eytan, l’un des responsables de ce rapport.

Manon Schick, porte-parole et future directrice générale d’Amnesty International Suisse, abonde dans son sens et note qu’«il serait intéressant de mener une telle enquête aussi en Suisse alémanique, où les prisons souffrent nettement moins de la surpopulation, et de voir quels effets provoque cette surpopulation carcérale.»




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Tee-shirt intelligent pour troubles bipolaires

19.12.2011 | L'Hebdo
Un tee-shirt et un smartphone : rien de plus commun en apparence que ces objets. Ils pourraient pourtant permettre bientôt de détecter les changements d’humeur de patients affectés de troubles bipolaires. Vêtement et téléphone mobile constituent en effet les deux éléments clés d’un dispositif innovant élaboré dans le cadre du programme européen Psyché. Les troubles bipolaires, qui se caractérisent par une alternance de phases de dépression et de grande excitation, sont“difficiles à traiter et s’accompagnent de nombreuses rechutes”souligne Markus Kosel, psychiatre et psychothérapeute des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). En phase dépressive, les personnes concernées n’ont aucune envie de se soigner. En phase maniaque, elles ressentent une grande exaltation dont elles n’ont pas envie de sortir. Pour améliorer leur suivi psychiatrique, il est donc important de pouvoir anticiper ces changements d’humeur. Actuellement, les patients sont invités à remplir un “agenda de l’humeur” mais ils oublient souvent de le faire. D’où l’idée de concevoir un dispositif qui enregistre automatiquement, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, un certain nombre de paramètres physiologiques et comportementaux et les transforme en informations directement exploitables par les médecins. Pour ne pas gêner les personnes dans leur vie quotidienne, “il fallait concevoir un système simple et pratique”, explique Mattia Bertschi, chef du projet Psyché au Centre suisse d’électronique et de microtechnique (SEM). Discrètement intégrés dans des bandes du tissu, des capteurs enregistrent le rythme cardiaque et respiratoire de l’individu, ainsi que ses mouvements. Cela permet de savoir si la personne est active ou non et d’évaluer la qualité de son sommeil, un élément “primordial dans le suivi des troubles bipolaires”, d’après Markus Kosel. Il suffit d’y connecter une petite boîte blanche qui ressemble à un baladeur MP3 pour que ces informations soient enregistrées, traitées et transmises au smartphone du patient. Doté d’une application spéciale, ce mobile permet aussi – et c’est là l’une des principales innovations du système– d’analyser la tonalité de la voix de son propriétaire. Un paramètre particulièrement précieux dans le cas des troubles bipolaires, puisque les fluctuations d’humeur se répercutent sur le timbre de la voix et le rythme de la parole, les épisodes dépressifs se caractérisant notamment par des phrases monotones et plus courtes et par des silences prolongés. Le médecin pourra aussi “demander au dispositif d’enregistrer certains paramètres particuliers”, indique Mattia Bertschi, et “rappeler au patient de prendre ses médicaments ou l’aider à mieux gérer ses activités”, ajoute Markus Kosel. Encore à l’état de prototype, le dispositif a déjà fait l’objet de tests préliminaires sur des volontaires sains, qui se poursuivent actuellement avec de vrais patients. Si les résultats se révèlent satisfaisants, il pourra être mis à la disposition de personnes souffrant de troubles bipolaires et de leurs psychiatres. Rien n’exclut que ces technologies soient ensuite adaptées à des personnes souffrant d’anxiété ou d’autres “maladies de l’âme”.


La modernité malade du Camp 
14 décembre 2011

PSYCHANALYSE
Couverture ouvrage
LUMIÈRE DES ASTRES ÉTEINTS. LA PSYCHANALYSE FACE AUX CAMPS
Gérard Haddad
Éditeur : GRASSET
Résumé :  Un essai qui s’attache à comprendre l’actualité, dans nos sociétés contemporaines, du traumatisme causé par les camps de concentration. 
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 Qui peut croire que la lumière noire de l'astre éteint des camps d'extermination nazis a cessé de nous parvenir ?Cet ouvrage recense les structures nouvelles que les camps continuent d'imprimer dans nos vies en formations pathologiques, telles des bombes à retardement. Ainsi, à partir de sa pratique de la psychanalyse, Gérard Haddad a tenté de bâtir un nouveau pan de la clinique freudienne.
Sommaire:
IL ETAIT UNE FOIS, EN EUROPE
UN PASSE QUI SE TRANSMET
UNE NOUVELLE CLINIQUE, UNE NOUVELLE METAPSYCHOLOGIE
LA PSYCHANALYSE FACE AU CAMP
LE CAMP ET L'ETAT D'ISRAEL
L'auteur:
Né à Tunis, Gérard Haddad, après avoir exercé l'agronomie en Afrique, rencontre Jacques Lacan, ce qui le conduit à entreprendre des études de médecine et à exercer la psychanalyse.
Sa rencontre avec Y. Leibowitz, dont il a traduit huit de ses ouvrages, fut aussi déterminante. Il a publié, entre autres : Manger le livre, Les Biblioclastes, Le jour où Lacan m'a adopté, Le péché originel de la psychanalyse.
*  *  *
On peut lire sur le site nonfiction.fr un compte rendu de cet ouvrage:
Titre du livre : Lumière des astres éteints. La psychanalyse face aux camps
Auteur : Gérard Haddad 
Éditeur : Grasset
Date de publication : 14/12/11
N° ISBN : 2246789990
Chongoroi
Hôpital de Chongoroi en quête de 100 travailleurs 

Chongoroi (Angola) - L’hôpital municipal de Chongoroi,dans la province de Benguela, dans le littoral-ouest angolais, est en quête d’environ 100 cadres, pour divers secteurs de l’institution, a déclaré lundi, le directeur de service Infirmier, Joaquim Cipriano.

Selon lui, les 120 travailleurs affectés dans cet établissement médical sont insuffisants pour répondre à la demande de la population, soulignant qu'en outre, le manque du personnel de la Pharmacie, d’Hygiène hospitalière et de médecins spécialistes comme priorités.

Le nombre du personnel sollicité résoudra le problème, a poursuivi JoaquimCipriano, car l’hôpital de Chongoroi reçoit non seulement les malades de la municipalité, mais aussi ceux de provinces voisins notamment de Huila et de Namibe.

Les gènes de l’intelligence remis en question

Avec l'explosion des analyses génétiques, de nombreux travaux ont associé des variations dans plusieurs gènes impliqués dans le fonctionnement du cerveau avec le niveau d'intelligence. Prochainement publiée par la revue Psychological Science,une étude internationale revient sur ces "gènes de l'intelligence" : elle a essayé de retrouver leur lien avec le QI en utilisant trois jeux de données indépendants qui totalisent presque 10 000 personnes. En bref, ces chercheurs ont suivi le traditionnel et indispensable chemin de la science : répliquer l'expérience pour voir si l'on aboutit au même résultat.
Pour schématiser, ce genre d'études fonctionne de la manière suivante. On relève certaines variations génétiques dans une population et on regarde si elles ont un impact statistiquement significatif sur les capacités cognitives générales (CCG) des participants, mesurées par différents tests. Il s'agit sans doute d'une définition très restrictive de l'intelligence, mais c'est celle sur laquelle ces chercheurs se sont mis d'accord depuis longtemps.
Les auteurs de l'article à paraître dans Psychological Science se sont concentrés sur 12 variations génétiques et les ont donc traquées dans trois échantillons de populations pour laquelle il existait également une évaluation chiffrée précise de ces CCG. Ils ont tout d'abord travaillé sur les données d'une étude longitudinale dans le Wisconsin qui a suivi des milliers de personnes depuis 1957. Au total, les chercheurs disposaient des données sur ces 12 variations pour 5 571 personnes. Résultat : aucune corrélation significative avec le QI et ce pour toutes les variations ! Le deuxième échantillon comptait un peu moins de monde (1 759 personnes) et était extrait de la Framingham Heart Study, une étude célèbre qui surveille depuis 1948 la santé de milliers d'habitants de la ville de Framingham, dans le Massachusetts, censée être représentative de la population américaine. L'objectif premier consiste à s'intéresser aux maladies cardio-vasculaires et à leurs causes, mais des prélèvements à des fins génétiques ont également été effectués. Sur les 12 variations retenues, 10 étaient documentées et 1 seule s'est avérée liée à une augmentation statistiquement significative des capacités cognitives. Pour le troisième et dernier échantillon, l'étude est allée chercher des données en dehors des Etats-Unis en choisissant de piocher des informations dans le registre des jumeaux suédois. Là encore n'étaient disponibles que 10 des 12 variations génétiques. Résultat : aucune corrélation avec les CCG pour aucune d'entre elles. Le seul gène s'approchant d'un résultat significatif était le même que pour l'échantillon de Framingham mais... la corrélation avec l'intelligence marchait dans l'autre sens, dans le sens d'un QI plus bas !
Comme le disent très bien les auteurs de cette étude dans leur conclusion,"le contraste entre le résultat attendu de la littérature et le résultat que nous avons effectivement obtenu dans notre enquête est frappant". Sur 32 vérifications, 31 ont échoué et la seule variation génétique qui ait réussi à franchir l'obstacle n'a pu le faire que sur un seul des trois tests... Autant dire que les expériences qui ont permis, à une certaine époque, d'affirmer que les 12 variations génétiques en question étaient significativement liées à une amélioration du QI étaient toutes des "faux positifs". Comme le suggère l'article, ces résultats erronés sont très probablement dus au fait que "les études originales que nous avons cherché à répliquer ne disposaient pas d'échantillons de taille suffisante".
Il ne faut pas en conclure pour autant que rien, dans les capacités cognitives, ne se transmet de manière génétique. En compilant et analysant des centaines de milliers de données, les auteurs de cette étude confirment que les variations génétiques sont responsables de près de la moitié des variations de QI entre individus, un chiffre déjà avancé par un article paru dans Molecular Psychiatry en octobre. Mais contrairement à ce que l'on constate dans certaines maladies génétiques comme la myopathie de Duchenne, l’hémophilie ou la mucoviscidose, il ne faut pas chercher l'action d'un gène unique. Tout comme dans le cas de la taille d'un individu pour laquelle intervient tout un cocktail de gènes, la part génétique de l'intelligence est le produit de nombreux facteurs, chacun intervenant probablement de manière modeste en parallèle avec l'éducation, l'affection et l'attention des proches, le milieu socio-culturel, etc.
"A l'époque où la plupart des résultats que nous avons essayé de répliquer ont été obtenus, lit-on dans la conclusion de cette instructive étude, les travaux sur des gènes candidats à l'explication de traits complexes étaient courants dans la recherche génétique. De telles études sont désormais rarement publiées dans les revues importantes. Nos résultats ajoutent le QI à la liste des caractères qui doivent être approchés avec une grande prudence dès lors qu'il s'agit d'évaluer des associations génétiques. (...) Les associations de gènes candidats avec des traits étudiés par la psychologie ou d'autres sciences sociales doivent être considérées comme des tentatives tant qu'elles n'ont pas été répliquées dans plusieurs grands échantillons. (...) La dissémination de faux résultats en direction du public risque de créer une perception incorrecte de l'état des connaissances dans le domaine, spécialement pour ce qui est de l'existence des gènes "de quelque chose"." Par conséquent, quand certains journaux (scientifiques ou pas) titreront sur le gène de l'infidélité (très élégamment baptisé "gène de la salope" par Fox News), sur celui dela prise de risques financiers ou sur celui de la délinquance violente, méfiez-vous un peu...
Pierre Barthélémy

Jean Maisondieu : "Il faut que la pyschiatrie soit mieux intégrée aux politiques de lutte contre l'exclusion"

Le psychiatre Jean MaisondieuMercredi 14 décembre, pour la troisième conférence des « Bruits de la Rue », lieu d'échanges et groupe de réflexion pluridisciplinaire attaché à mieux comprendre ce qu'est, aujourd'hui, la précarité sous toutes ses formes, l'invité était le psychiatre Jean Maisondieu. Il a a rappelé combien il est urgent, en cette période de crise économique, de décloisonner la façon de penser le social. Notamment, en commençant par cesser de réduire la psychiatrie au simple traitement des maladies mentales. Il a accepté de répondre aux questions d'Aqui!fr à l'issue de sa conférence très applaudie à l'amphithéâtre Léon Duguit de l'université de Bordeaux IV.

Aqui! : Qu'est-ce que l'autruicide, qui est au coeur de vos analyses de l'exclusion ?
Jean Dieumaison : Au sens propre, cela signifie l'assassinat d'autrui. Au sens figuré, c'est une capacité à tuer l'autre symboliquement. Cela se traduit par un manque de considération, dont souffre une personne, qui est atteint dans sa dignité, par le regard que porte les autres sur elle, mais aussi par le regard qu'elle porte sur elle-même. Dans un contexte de déni de fraternité (inconscient ?), notre aptitude intra-individuelle à l'individualisation passe par la tentative de nous désaliéner de l'autre semblable. Pour se débarrasser de l'autre dont la présence indispose, il n'est pas nécessaire de le tuer : il suffit de nier son humanité en ne le reconnaissant pas comme son semblable. Meurtre sans cadavre, l'autruicide est particulièrement difficile à appréhender. La dérive autruicidaire guette pourtant notre société, jusque dans la relation médecin-malade.Cela provient aussi de l'idéologie actuelle du travail qui nous dit : "je ne vaux pas pour ce que je suis, mais pour ce que je produis". 
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Le Point - Publié le 15/12/2011 à 01:51

Affaire Agnès. Un magistrat peut-il anticiper le risque de récidive ?

CLAUDE ASKOLOVITCH

Avoir un gosse devant soi, deviner son destin tragique et admettre qu'on n'y pourra rien, tout juge que l'on est."Je sais qu'un jour il sera jugé pour meurtre ou pour viol", assure Sabine Orsel, responsable de l'Union syndicale des magistrats (USM), quand elle se souvient de Clément, connu dans un ancien poste de juge des enfants. Un gosse marqué, suivi dès l'âge de 3 ans, placé. Violences, vols, incarcération, centres éducatifs fermés - Clément a tout fait, jusqu'à frôler le pire avant 15 ans."Enfermé, il détruisait les sanitaires, les autres internés finissaient par le détester parce qu'on leur coupait l'eau ; on l'a placé dans un centre d'une réputation impeccable ; après dix jours, il est entré dans la chambre d'une fille, a commencé à la déshabiller de force. Si personne n'était intervenu, il la violait."
Pourquoi parler de Clément quand la France aujourd'hui n'a peur que de Mathieu, cet ado de 17 ans, violeur et meurtrier présumé d'Agnès, 13 ans, au Chambon-sur-Lignon ? Parce que les drames ne sont pas seulement imprévisibles. Mathieu, violeur présumé en attente de procès pour une agression antérieure, pourtant placé dans un lycée-collège mixte, illustrerait, selon le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, les "dysfonctionnements" d'un système promis à la réforme sans fin. En réalité, un fonctionnement normal ne garantit rien. Il y a à Nîmes un juge d'instruction et un expert psychiatre qui ont estimé Mathieu réinsérable. Contrairement à Clément le prédestiné, Mathieu était entouré d'une famille concernée. Le jeune homme était suivi. La récidive, en matière de viol, est ultraminoritaire. Rien n'était écrit mais le pire est arrivé."Nostradamus n'existe pas", dit Gérard Rossinelli, vice-président du syndicat des psychiatres hospitaliers. Il expose la nuance entre la fragilité psychiatrique d'un individu, décelable par un praticien, et sa dangerosité criminelle : "Là, nous ne savons pas l'appréhender. Un simple entretien individuel avec un criminel présumé ne permet certainement pas de poser des prédictions !" Cette incertitude accompagne tous ceux qui font écran entre la société et ceux qui la menacent.
Dérapage. Ils sont juge des enfants, juge d'instruction, juge des libertés et de la détention, juge d'application des peines. Ils ont la clé d'une liberté pour des individus potentiellement dangereux, pas encore jugés ou déjà condamnés. Ils peuvent se nourrir ou se couvrir d'un avis d'expert. Ils sont aussi tenus par la loi. Le principe général fait prévaloir la liberté sur la détention."Il faut deux juges pour mettre quelqu'un en détention - un juge d'instruction et un juge des libertés et de la détention, par exemple -, mais un seul pour libérer quelqu'un", dit Mathieu Bonduelle, secrétaire général du Syndicat de la magistrature. La justice des mineurs pense réinsertion : il était important que Mathieu reprenne une scolarité ! Les détentions sont limitées dans le temps, et chacun fait ce qu'il peut."Clément va revenir chez lui bientôt, avec deux petites soeurs qu'il peut mettre en danger, dit Sabine Orsel.Les psychiatres se sont refusés à le déclarer malade, pour ne pas se charger de lui."
Conclusion ? Les juges gèrent contraintes et contradictions. On vit avec l'inquiétude de mal faire."Mettre quelqu'un sous mandat de dépôt ou l'en faire sortir, c'est un choix qui vous ronge", confie Bonduelle. Lui, juge d'instruction, se souvient d'une affaire qui l'accompagnait jour et nuit. Des jeunes gens, accusés de viols et d'actes de barbarie, incarcérés avant leur procès."Certains menaçaient de se suicider en prison, tentaient des passages à l'acte. Et, en même temps, la gravité des faits, leurs antécédents justifiaient leur détention." Bonduelle a tenu sa position. Il aurait pu avoir tort. Cela ne signifie rien. La justice n'est pas une science exacte. Elle reflète aussi les inégalités sociales."J'ai déjà laissé des violeurs avérés en liberté avant leur procès - où ils ont été condamnés, se souvient Sabine Orsel.Des fils de notables ayant dérapé dans une soirée arrosée. Ils étaient devenus étudiants, ils avaient conscience de leur acte, le risque de récidive n'existait pas."
Les magistrats se plaignent de leur solitude au moment de la décision. Mais la collégialité, réclamée par les syndicats, ne supprimera pas la malchance."Je sais juger des faits passés, affirme Henri Ody, vétéran du siège, délégué de l'USM à Caen.Mais je ne sais pas prédire l'avenir d'un individu." C'est pourtant la demande - contradictoire - de la société et du politique : stigmatisée pour sa cruauté à Outreau, la justice est soupçonnée d'imprévoyance au Chambon-sur-Lignon. Savoir, prévoir. Punir par anticipation. Ne pas se tromper. Michel Mercier, ministre de la Justice, veut "améliorer l'étude de la dangerosité d'un individu". Un débat de fond : contre la psychiatrie française, réputée intuitive et empirique, certains réclament un aggiornamento anglo-saxon ; la méthode "actuarielle", faite de statistiques qui détermineraient le potentiel explosif d'un individu."Je refuse le scientisme bêta, dit le psy et criminologue Roland Coutanceau.Mais l'aveu d'impuissance est aussi insatisfaisant. En délinquance sexuelle, il y a des facteurs dans un premier passage à l'acte qui méritent que la société et la justice soient prudentes pour la suite - s'il y a eu séquestration ou usage d'une arme, par exemple. N'en faisons pas une norme, mais gardons-le à l'esprit."
Tout-répressif. La tentation de la norme existe pourtant. L'affaire du Chambon, c'est une première, est venue effacer des clivages idéologiques. L'opinion politique est allée un cran plus loin vers le tout-répressif. Des responsables socialistes ont réagi aussi vite que la droite sarkozyste, et dans des termes comparables. Pierre Moscovici, directeur de campagne de François Hollande, a réclamé des centres d'éducation fermés pour des mineurs "dans la situation" de Mathieu : précisément ce que veut François Fillon. La gauche lorgne sur le modèle canadien et son fichier national de délinquants sexuels. C'est oublier que Mathieu, quand il a entraîné Agnès dans la forêt du Chambon-sur-Lignon, n'avait pas encore été jugé, restait un innocent judiciaire et n'aurait pu être inscrit sur aucun fichier.

Un fait divers = une loi

Lorsqu'un fait divers fait irruption dans l'actualité, les gouvernements - surtout de droite - ont le réflexe d'annoncer une réforme censée éviter qu'une telle horreur ne se reproduise. Ce fut le cas à la suite des affaires Guy Georges, Bodein, Fourniret, du pédophile Francis Evrard, de l'assassinat de la joggeuse Nelly Crémel, d'Anne-Lorraine Schmitt dans le RER ou de Laetitia Perrais en 2011. En sept ans, cinq lois sur les criminels sexuels ont été adoptées. Trois mesures ont ainsi été décidées après le meurtre d'Agnès. Une modification des procédures d'évaluation de la " dangerosité " des " criminels violents ". Les chefs d'établissement devront être informés des faits reprochés à un élève au moment de l'inscription. Dans l'attente du jugement d'un mineur, le ministère public préconisera son placement en centre d'éducation fermé.