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Articles, témoignages, infos sur la psychiatrie, la psychanalyse, la clinique, etc.

dimanche 11 septembre 2011


Le XXIe siècle est d'ores et déjà lacanien
Traversée

LE MONDE DES LIVRES   08.09.11


A sa mort, le vieux psychanalyste était presque un trésor national vivant. De loin, dandy foutraque adulé ou haï, célèbre pour ses cigares tordus, son noeud pap' et le public people se pressant à son séminaire ; de près, un corps saisi de pensée. Place à la voix. On écoutait cette lente parole entrecoupée de soupirs, débobinant des phrases en quête de chute, piégées dans une grammaire exacte, mais dure à suivre. Alors Lacan revenait sur ses pas, tirant ses auditeurs le long d'un fleuve dont seule sa logique connaissait le cours. Nous, bateaux ivres ; lui, le hâleur. Résultat ? Une pensée couteau suisse. On l'a sur soi, elle sert à tout.

Dans la moisson de textes qui saluent sa mémoire, deux sont de lui, édités par Jacques-Alain Miller. Inédits, les deux datent de 1971-1972. Le premier est le livre XIX du Séminaire et s'intitule... Ou pire - points de suspension signifiant le vide, et Lacan pouvant toujours "faire pire". Ce texte est lui-même flanqué de conférences titrées Je parle aux murs (ceux de la chapelle de l'hôpital Sainte-Anne, autrefois "asile clinique" où les murs jouaient leur rôle).
"Chiure, regard, voix"

Deux textes de même époque aux allures de synthèse. Point de départ : Il n'y a pas de rapport sexuel, phrase en italiques et sursauts dans la salle. "Il suffirait de baiser un bon coup pour me démontrer le contraire", lâche-t-il. Non, Lacan ne nie pas la petite différence organique - "Hourra", lâche-t-il sombrement -, préfigurée comme "valeurs sexuelles" homme et femme par les parents, mais voilà, "le sexe ne définit nul rapport chez l'être parlant". Pourquoi ? Parce qu'"être parlant" introduit une brisure, Spaltung selon Freud, une fente par où l'inconscient gicle. Dans le coït ou la copulation (pas de sentiment), chacun pour soi et pas de rapport. L'ordre du sexe relève du semblant, semblants de rôles sexués d'avance. Les femmes ? Elles sont la discordance que Lacan appelle le "pas-tout", réfutant Aristote pour avoir pensé ensemble l'Un et l'Etre, le Tout. Or fondre deux en un est impossible et les femmes sont "pas-toutes" - "éternelle ironie de la communauté" disait Hegel, voire pestes.. Et l'amour ? On ne parle que de ça, il est même fait pour ça. L'amour, c'est le supplétif.

D'abord plus aisé, Je parle aux murs reprend la théorie lacanienne des quatre discours, dont trois sans échappatoire. Le discours du maître rejoint le discours du capitalisme ("C'est mieux foutu, vous êtes plus couillonnés") ; le discours de l'universitaire, carapace de semblant de savoir ("Vous y êtes à plein tube, en croyant faire l'émoi de Mai") ; le discours de l'hystérique (séduction prédatrice pour régner sur un maître) ; enfin, peut-être le seul à libérer de l'asservissement psychique, le discours analytique fait de l'analyste un objet insaisissable que Lacan a appelé l'objet petit-a. Cet objet partiel sort du corps, "chiure, regard, voix" ; il se fait substitut, tétine ou psychanalyste. Un "objet dont il n'y a pas d'idée", cela sert de levier à l'histoire du désir et cela vous dépouille de vos répétitions. Selon l'éthique lacanienne, la psychanalyse est une "prophylaxie de la dépendance".

Ce résumé perd la drôlerie de Lacan. Ainsi des peauciers du front du hérisson, de la différence entre l'homme et le homard, des étudiants qui font de l'auteur-stop et - je n'y résiste pas - "au niveau du réel, il n'y a pas d'Auvergnats"... Car Lacan redoutait le racisme dont il prophétisait le retour. Manque forcément aussi, dans ce résumé, une foisonnante érudition appuyée sur la pratique du latin et du grec, augmentée de Leibniz, de la topologie, du japonais, grâce à une cohorte d'aides invisibles dont, pour le chinois, François Cheng. Manquent enfin les cruels coups de griffe aux collègues, à Ricoeur, Sartre, Anzieu, Beauvoir - et Freud si nécessaire. Dans un résumé de Lacan, manque la vie.

Alors précisément, sa vie. En voici deux, Lacan, envers et contre tout, d'Elisabeth Roudinesco ; Vie de Lacan, de Jacques-Alain Miller, premier fascicule d'une série sur le modèle des Lettres à l'opinion éclairée de 2002, ébouriffantes d'intelligence et de gaieté. Deux témoins privilégiés : l'une parce que, fille de Jenny Aubry, psychanalyste d'enfants, elle a connu Lacan petite, l'autre parce qu'il est son gendre et le légataire de son oeuvre. Parcourant le XXe siècle, Roudinesco y situe Lacan dès l'enfance, s'attarde sur la vie amoureuse de son objet, décrit une pensée mouvementée et tire à la sanguine le portrait de Lacan en libertin grandiose, rapportant son désir des femmes à la possession de L'Origine du monde, le tableau de Courbet, "la chose génitale", disait Charcot... Si elle croque à belles dents l'homme privé, c'est en historienne, superbement, que Roudinesco met en perspective le siècle de Lacan et le nôtre, "d'ores et déjà lacanien". Loin d'une simple psychologie médicale, nous dit-elle, et fondée sur la nécessité de la transgression, la pensée de Lacan est la seule en psychanalyse qui se confronte à Auschwitz et réinterprète la pulsion de mort. Psychiatre, le docteur Lacan resta populaire auprès des "médecins des fous", à la fois "penseur des Lumières sombres" et grand clinicien.

S'il a passé le plus clair de sa vie à élucider l'oeuvre, Jacques-Alain Miller s'est longtemps tu sur l'homme qu'il côtoya seize ans, par respect pour le voeu de Lacan : que sa personne ne cache plus sa pensée. Peine perdue, le dandy écrase tout. Et Miller s'élance sur la piste de l'homme avec fougue et brio, sa marque de fabrique. Le Lacan de Miller est un révolté au désir hors normes, coup-de-poing américain en poche, qui veut tout tout de suite, trépigne pour obtenir, qui brûle les feux rouges et, s'il ne conduit pas, fonce à pied tête baissée parce qu'il hait le signal Stop !, brave la loi tant qu'il peut, comparable à Naomi Campbell moins la drogue. De sa propre existence, il disait : "Une vie passée à vouloir être Autre malgré la loi." Sur son lit de mort, trois mots : "Je suis obstiné."

"Jardin à la française"

Roudinesco et Miller se croisent sur bien des points. L'excès, la démesure, le non-conformisme de la grande bourgeoisie, le charme et la brutalité. Le Lacan de Miller est plus tendre, plus aimant ; le livre de Roudinesco, nourri à l'amour vache, rend justice à un homme qu'elle admire et discute. Ces deux-là sont passionnés de Lacan.

Jean-Claude Milner aussi, mais autrement. Clartés de tout est d'un chercheur qui ne veut strictement rien savoir de l'homme privé. Mais alors, quelles lumières ! Un exemple. Milner, qui fut linguiste, décrypte la position de Lacan sur les langues. En 1953, neuf ans après la défaite du nazisme, le premier discours de Rome, célèbre pour son affirmation du "retour Freud", s'adressait aux psychanalystes de langue romane. A l'époque, l'allemand vaincu, langue natale de la psychanalyse, cédait devant l'anglais, langue de la marchandisation propre à dévoyer l'entreprise freudienne. Aux Etats-Unis, c'était fait. Pour retourner à Freud, Lacan le mit au cordeau ; de la jungle freudienne, "j'ai fait un jardin à la française", disait-il. Mais pour cela, rappelle Jean-Claude Milner, Lacan a recours à la "langue dialectique", une langue française qu'il se voit contraint de tourmenter, car le français classique ne peut rien dire de freudien. Tard dans sa vie, il n'a plus le temps, il joue aux mots-valises, se sert des homophonies, des sens opposés et, en hâte, brise la langue. L'obscurité vient.

A Miller, il disait : "J'ai 5 ans." Sale gosse génial ! Pour moi, en 1962, inoubliable Lacan du séminaire sur l'angoisse, troublant professeur de discorde à Sainte-Anne, obstinément sérieux parmi les fous.
Catherine Clément, philosophe et romancière

A lire aussi

De Jacques Lacan
Le Séminaire livre XIX... Ou pire, Seuil, "Champ freudien", 256 p., 23 €.
Sur Jacques Lacan
Le Théorème du Surmâle. Lacan selon Jarry, de Paul Audi, Verdier, 214 p., 16 €.
Le Malentendu des sexes. Freud, Lacan et l'amour, de Juan Pablo Lucchelli, Presses universitaires de Rennes, 240 p., 18 €.
Vie de Lacan, écrite à l'intention de l'opinion éclairée, de Jacques-Alain Miller, éd. Navarin, 24 p., 5 €.
"Pourquoi Lacan", numéro 9 de la revue Le Diable probablement sous la direction d'Anaëlle Lebovits-Quenehen, Verdier, 176 p., 15 €.
Signalons également la parution, le 13 octobre, d'un autre inédit de Jacques Lacan, "La Troisième", conférence à Rome en 1974, dans un numéro spécial de la revue La Cause freudienne, "Lacan au miroir des sorcières", sous la direction de Nathalie Georges-Lambrichs, éd. Navarin, 16 €.

Extrait

"L'amour, l'amour, que ça communique, que ça flue, que ça fuse, c'est l'amour, quoi. L'amour, le bien que veut la mère pour son fils, l'(a)mur, il suffit de mettre entre parenthèses le a pour retrouver ce que nous touchons du doigt tous les jours, c'est que, même entre la mère et le fils, le rapport que la mère a avec la castration, ça compte pour un bout. Pour se faire une saine idée de l'amour, il faudrait peut-être partir de ce que, quand ça se joue, mais sérieusement, entre un homme et une femme, c'est toujours avec l'enjeu de la castration. C'est ce qui est châtrant. Ce qui passe par ce défilé de la castration, nous essayerons de l'approcher par des voies qui soient un peu rigoureuses. Elles ne peuvent être que logiques, et même topologiques. Ici, je parle aux murs, voire aux (a)murs, et aux (a)murs-sements."

("Je parle aux murs", pages 103-104.)

Ethica sexualis : Spinoza et l’amour

de Bernard Pautrat


Ethica sexualis : Spinoza et l'amour

Présentation de l'éditeur
L’éthique étant cette partie de la philosophie qui s’emploie à dégager la formule de la vie bonne ou de la vie heureuse, et la sexualité et l’amour étant des expériences centrales qui concernent chaque homme et chaque femme, on attend de toute éthique qu’elle nous dise comment vivre et bien vivre notre sexualité. Or le monumental traité de Spinoza intitulé Éthique observe sur la question une espèce de silence : s’il est disert sur l’Amour, le sexe y demeure caché. Mais caché ne veut pas dire absent, et l’objet du présent ouvrage est de mettre au jour ce qu’on pourrait appeler la "géométrie" de l’amour sexuel et, par voie de conséquence, les principes de "la bonne vie sexuelle". Pour ce faire, l’auteur considère une "histoire d’amour" entre deux individus quelconques, dans toute sa banalité quotidienne, et entreprend de la comprendre à la lumière de la conceptualité mathématique énoncée abstraitement dans les théorèmes du traité. Il constate alors que Spinoza nourrit à l’égard de ce qu’il nomme "l’amour ordinaire" une méfiance constante, et que la vraie voie et la bonne vie consistent, autant que faire se peut, sinon à tout à fait s’en passer, du moins à le dépasser en accédant à un autre Amour, entaché d’aucun des "vices" de l’amour ordinaire, un Amour éternel, indestructible et suprême, l’Amour envers Dieu. Au terme de quoi l’on peut bien affirmer que la doctrine de Spinoza n’est pas seulement une machine à tuer les "passions tristes" (ce qui vaut à ce penseur la faveur d’un large public), mais qu’elle a également pour cible, à égalité, les "passions joyeuses", celles-là même où nous tous, ignorants que nous sommes, croyons trouver la clé de la vie heureuse.
Mais pourquoi Spinoza, résolument hostile à tout idéal ascétique, observe-t-il une telle méfiance à l’égard de l’amour ?
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Spinoza, coït de neuf avec l’«Ethique» ?
CRITIQUE Bernard Pautrat revisite le traité du philosophe et son approche de la sexualitéPar ROBERT MAGGIORI

Papillonnages et dévergondages, séduction compulsive, amours réglés, amours déréglés, célibat, union libre, «mariage fidèle, mariage infidèle», chasteté obligée ou voulue : chacun vit comme il veut, ou peut, sa sexualité. Mais nul n’évite de se demander si le choix qu’il fait, ou la nécessité à laquelle il est soumis, sont les chiffres de la «vie bonne» qu’il souhaite. Vivrait-on sa sexualité de la façon la plus «animale», on ne se rendrait pas pour autant sourd à la «petite voix» de la conscience morale, qui me conseille de vérifier si ce que je fais est «bien» ou «mal». A l’inverse, aucune éthique cherchant la «droite règle de vie» ne peut faire l’impasse sur la sexualité, qui «n’est pas un détail» dans l’existence. Si, animé du souci moral, on s’avisait d’aller chercher quelque conseil dans les éthiques historiquement constituées - stoïcisme, épicurisme, christianisme… -, on se trouverait devant une littérature quasiment infinie. On pourrait lire Epicure, Platon, Schopenhauer, Freud, Sade, les utopistes, Campanella ou Fourier, chez qui les activités sexuelles sont réglées à la minute, Lucrèce bien sûr, qui dit «ce que sont le désir, le coït et l’amour» et «prône aux hommes la satisfaction simple et rapide avec les Vénus de carrefour», Augustin, qui eut un enfant avant d’être saint, Thomas d’Aquin qui, de l’«acte de chair», trace «le cadre où il peut et doit s’exercer» - ou mille autres.

Passions. Mais qui aurait l’idée de consulter l’Ethique de Spinoza, pourtant la plus magnifique ? C’est que, «dans le prodigieux traité spinoziste», le sexe est bien discret. Et dans la vie de Baruch Spinoza, il n’est pas davantage présent : on ne lui connaît ni passion, ni amourette, ni amant, ni maîtresse… Mais peut-être se trompe-t-on. C’est l’avis de Bernard Pautrat, qui publie Ethica sexualis. Spinoza et l’amour : «Discrétion signifie parfois insistance extrême, voire dissimulation. Notre opinion est que le sexe est bien là dans l’Ethique, mais caché. Pas assez, pourtant, pour qu’on ne l’y débusque.» Avant Bernard Pautrat, un autre grand spécialiste, Alexandre Matheron, avait déjà (dans Anthropologie et politique au XVIIe siècle, Vrin 1986) «reconstitué pas à pas la doctrine de la sexualité, et de la bonne vie sexuelle, qui se trouve comme en creux dans le système» de Spinoza. Il était parvenu au résultat qu’il y a, chez celui qu’on considère comme le héraut de la joie et l’exterminateur des passions tristes, un bon sexe, une sexualité rationnelle et heureuse, et qu’il avait «vécu sa misère sexuelle avec discrétion, comme un inconvénient inévitable dû à des circonstances de fait». A partir du même «matériau textuel», qu’il connaît par cœur (pendant vingt ans, il a animé à l’Ecole normale supérieure un séminaire sur l’Ethique, dont il est le traducteur), Bernard Pautrat dessine une autre piste : si, chez Spinoza, «la bonne vie sexuelle est possible, elle doit être "difficile autant que rare" ; au bout du compte, mieux vaudrait, tout simplement et si possible, s’en passer».

Rappeler ces conclusions ne rend pas compte de la richesse d’Ethica sexualis, dont chacun, et pas seulement les lecteurs avertis de Spinoza, peut tirer profit quant à l’approche évidemment non prescriptive d’une vie amoureuse (des amours les plus enracinés dans le corps aux amours spirituels, et à l’amour de Dieu, c’est-à-dire, chez Spinoza, de la Nature) qui soit sentimentalement, sexuellement et éthiquement satisfaisante. Avec une belle dextérité, Pautrat surfe entre les démonstrations, les propositions, les corollaires, les scolies du texte spinozien, afin de recueillir tout ce que le philosophe a pu dire de l’amour, de l’amor meretricius [meretrix, prostituée], des étreintes, du «Chatouillement» (titillatio), de la lubricité, du désir, du mariage, de la chasteté, de la jalousie, et pouvoir ainsi répondre à la question : «Comment l’homme qui vit sous la conduite de la raison vit-il sa libido, à savoir son "désir de s’accoupler aux corps", ou encore son "désir de coïter" ?» La réponse la plus convenue serait que l’homme guidé par la raison aime avec raison, «en prêtant peu d’attention à l’apparence ou beauté de la chose aimée, mais la plus grande attention possible à la liberté de l’âme [animus], la sienne et aussi celle de cette autre chose», et qu’il est «animé du désir d’engendrer, de procréer des enfants et d’en faire, par une éducation sage, des sages». Dans ce cas, «le sage épouse». Cela se défend.

«Mais c’est un fait que Spinoza ne l’a pas défendu.»
Savait-il l’impossibilité d’aimer avec modération, de rendre docile l’échange charnel ? Voici ce qu’il dit des cinq affects où joue «un Amour ou Désir immodéré» : «l’Ambition est le désir excessif de gloire», «la Gourmandise est le Désir immodéré, ou même l’Amour, de manger», «l’Ivrognerie est le Désir immodéré et l’Amour de boire», «l’Avarice est le Désir immodéré et l’Amour des richesses», «la Lubricité[Libido] est également Désir et Amour de s’accoupler aux corps». Que note-t-on ? Que la Libido n’a pas besoin d’être dite «excessive» ou «immodérée» : elle l’est en soi. Aussi, quand les autres affects peuvent être «sauvés par la raison» - laquelle nous fait boire sans être ivrognes, manger sans être gourmands, avoir un peu d’argent sans être avare… -, la Libido, elle, avec ou sans excès, reste telle. «D’où la difficulté qu’on éprouve à trouver cet éventuel "bon sexe" : le sexe modéré, qui serait le bon, serait encore le sexe, c’est-à-dire immodéré puisque modéré et immodéré revient, d’une certaine façon, au même.»

Surcroîts. Certes Spinoza ajoute qu’une «puissance de l’âme» peut malgré tout arriver à maîtriser la Libido : la Chasteté, ou la Béatitude qui en est la forme suprême. Mais s’en tient-il à cela ? Pas sûr : l’enquête n’en est qu’au début. Il faut encore aller farfouiller, entre autres, du côté de la jalousie, ou de la haine. On découvre des cercles bien vicieux : s’il faut désespérer de l’amour qui, promis à la Tristesse et au Regret, produit des surcroîts de haine, il convient d’espérer de la haine, qui produit des surcroîts d’amour, lequel… sera d’autant plus fort que la haine aura été grande… Que faire ? Oublier, liquider la sexualité ? «S’unir à Dieu» et, «muni de cette jouissance», ne désirer même plus ne plus désirer ? Diantre, il s’agit de Spinoza, «le penseur du corps, du désir et de la joie» ! On n’est pas au bout des surprises… Et si le philosophe avait tenu aussi à se débarrasser des passions joyeuses, n’en ayant, dans sa vie affective et sexuelle, connu aucune ?

Vraiment ? Et Clara Maria, la fille de François Vanden Enden chez qui, à Amsterdam, Baruch devait apprendre le latin ? Son biographe, Colerus, dit qu’il en était amoureux, avait dessein de l’épouser, et était jaloux d’un condisciple, un certain Kerkering. A Clara Maria, Spinoza offrit «un collier de perles d’une valeur de deux ou trois cents pistoles», on n’en sait pas plus. Ce qu’on sait, c’est que Clara Maria épousa ledit Kerkering.





Soins sans consentement : le fol été des soignants de psychiatrie

La réforme des soins psychiatriques sous contrainte a bousculé les établissements au cœur de la torpeur estivale. Témoignages de soignants après un mois de rodage.

Pour les juilletistes comme pour les aoûtiens, la réforme des soins sans consentement n’est pas passée inaperçue parmi les professionnels des établissements de santé spécialisés en psychiatrie. Avant le 1er août – date de l’entrée en vigueur de la loi –, c’est l’anticipation des changements à venir qui a mobilisé les équipes à coup de réunions d’information et de coordination tous azimuts. Après, il a fallu, bon an mal an, passer aux travaux pratiques.

Dans les établissements de soins psychiatriques, l’organisation des services a surtout été impactée par l’obligation d’organiser un entretien systématique entre tout patient hospitalisé contre son gré et un juge des libertés et de la détention (JLD) au plus tard quinze jours, puis six mois après la décision de privation de liberté. Trois possibilités pour cela: soit le patient se rend au tribunal, soit le JLD se déplace à l’hôpital, soit encore, l’entrevue se déroule par visioconférence. D’un établissement à l’autre, selon les contraintes géographiques et de transport, la disponibilité et la bonne volonté des juges, l’une ou l’autre des options a été privilégiée. Le recours à la visioconférence, que nombre de psychiatres et soignants réprouvaient en raison de ses effets potentiellement désastreux sur des malades psychotiques, semble avoir été largement boudé.
Sous-effectif
Dans les cas où l’audience au tribunal a été privilégiée, comme au CHS Montperrin d’Aix-en-Provence, il a donc fallu affecter des soignants à l’accompagnement des patients hors les murs de l’établissement. « Toujours un infirmier, éventuellement deux, et un aide-soignant », précise Christine Abad, cadre supérieure de santé. « En fonction de la situation clinique du patient, le juge prend plus ou moins le temps de rencontrer la personne. Il lui fait part des pièces qu’il a en sa possession. Parfois un avocat est présent », témoigne la soignante

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Forum du Manifeste des Psychologues Hospitaliers


Hacker la psychiatrie ?

Des soignants en psychiatrie sortent des rails établis, pratiquent une psychiatrie différente, ne suivent pas les protocoles et les « règles d’or » de la profession, au point qu’on peut les considérer comme des hackers : hacker la psychiatrie, en reconnaissant la valeur de la folie, pour aider à l’adoucir, pour lui donner du sens, pas pour l’éradiquer ?
Sous ce titre provocant de « hacker la psychiatrie », il y a des des réalités très intéressantes dans la relation et les soins aux personnes en souffrance psychique. Il faut, pour commencer, définir rapidement ce que signifie le terme hacker (prononcer aké), ce qu’est un hacker (prononcer akeure), celui qui pratique le hacking.

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Les dessous de l'industrie pharmaceutique

Publié le 07-09-11

L'affaire du Mediator n'est qu'un symptôme. Depuis vingt ans, les géants du médicament ont fait des molécules un produit de consommation comme les autres. Par Anne Crignon et Nathalie Funès

Site de production de medicaments du laboratoire indépendant "Servier" à Gidy-la-Forêt. Dernière étape de conditionnement des médicaments génériques. (LYDIE/SIPA)

Site de production de medicaments 
du laboratoire indépendant "Servier" 
à Gidy-la-Forêt. Dernière étape de 
conditionnement des médicaments 
génériques. (LYDIE/SIPA)

Article publié dans le Nouvel Observateur du 13 janvier 2011
1) Créer des maladies pour vendre
Tout bien portant est un malade qui s'ignore. Il faut le lui faire savoir : l'industrie pharmaceutique a fait sienne la philosophie du Dr Knock, personnage de la pièce de théâtre écrite en 1923 par Jules Romains. Pour faire tourner le système, on invente des maladies. La situation est impeccablement résumée par le Danois Mikkel Borch-Jacobsen, historien de la psychiatrie devenu sociologue affûté du milieu et qui réalise un documentaire intitulé "Maladies à vendre" : "Dans le temps, on créait des médicaments pour guérir des maladies. De nos jours, on crée des maladies pour vendre les médicaments, et les maladies qui ne peuvent se revendiquer d'un médicament sous brevet disparaissent tout simplement du radar."
On lance une maladie "comme on lancerait une marque de jeans", poursuit-il. En 2007, Pfizer a ainsi lancé la fibromyalgie et le Lyrica, qui cible les femmes mûres aux symptômes assez flous - fatigue générale, douleurs musculaires diffuses. Aucune lésion organique n'étant observable, les rhumatologues la pensent souvent psychosomatique, mais, bon, un petit traitement ne peut faire de mal, et hop ! voici le Lyrica vendu à travers le monde. Le traitement a rapporté 1,8 milliard de dollars pour la seule année 2007 malgré sa probable inutilité et ses effets secondaires - insomnies et obésité.
Autre cible privilégiée : toute la gamme des états d'âme. Chercheur de l'université Northwestern de Chicago, Christopher Lane a publié en 2009 "Comment la psychiatrie et l'industrie pharmaceutique ont médicalisé nos émotions". Par la magie d'un grand fourre-tout nommé "dépression", on a mis sous antidépresseur le chagrin d'amour, le deuil, la fatigue ou le questionnement sur le sens de la vie.  La timidité et la retenue, la crainte de parler en public : toute manifestation de pudeur est désormais recyclée en "syndrome d'anxiété sociale", et ce sont des millions dans les caisses de ses inventeurs.
"Trouble affectif saisonnier" (le spleen quand les jours raccourcissent), "trouble explosif intermittent" (colère au volant), "trouble dysphorique prémenstruel" (être d'une humeur de chien avant ses règles), "trouble oppositionnel avec provocation" (l'esprit réfractaire) : les Précieuses Ridicules en 2010 travaillent pour l'industrie pharmaceutique.


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Garçons et filles ont des têtes aussi bien faites

La santé mentale dans les situations d'urgence
16:12:06

Le Dr Mustafa Elmasri est psychiatre à Gaza. Il a vingt ans d'expérience de travail dans les situations de conflit ou de guerre et sur leurs douloureuses conséquences. Il a obtenu son diplôme de médecine à l'Université d'Alexandrie en 1983 et son diplôme de psychothérapie à l'Université de Tel Aviv en 1996. Il été ensuite diplômé en psychiatrie par les Universités de Londres et d'Aim Sham en Égypte en 1997. Il a débuté sa carrière de médecin à Gaza en 1986 et commencé à prodiguer des soins de santé mentale en 1992. De 1998 à 2000, il a travaillé avec les survivants du génocide au Cambodge, de 2000 à 2003, avec les civils terrorisés en Algérie et de 2005 à 2006, avec les réfugiés du Darfour au Tchad. Depuis, 2008, il collabore avec l'Organisation mondiale de la Santé pour intégrer les services de santé mentale aux soins de santé primaires à Gaza.

Q : Vous avez exercé une grande partie de votre activité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, quels types de soins de santé mentale dispense-t-on dans ces régions ?

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Faire souvent l'amour permet aussi de rallonger son espérance de vie




Faire souvent l'amour permet aussi de rallonger son espérance de vie

Faites l'amour et cætera. Le slogan antiguerre des années 1960 était presque tombé en désuétude. Le voici qui revient en force. Faire l'amour ne serait pas seulement bon pour le moral, mais aussi pour la santé et la longévité. Tout l'organisme profiterait des bienfaits d'une sexualité épanouie. A en croire de nombreuses études publiées depuis plus d'une dizaine d'années, il n'y aurait plus aucune raison d'appeler encore la chose "bagatelle".

En 2007, l'étude menée par le neuropsychologue britannique David Weeks, du Royal Edinburgh Hospital, montrait qu'une vie sexuelle active permet de retarder le processus de vieillissement. Les 3 500 femmes et hommes âgés de 20 à 104 ans y ayant participé avaient deux points en commun : une activité sexuelle plutôt intense et le fait de paraître tous beaucoup plus jeunes que leur âge.

Dans son livre La Vie et le Temps, publié au printemps aux éditions Flammarion (350 p., 20 €), Frédéric Saldmann, cardiologue et nutritionniste, le confirme, une impressionnante bibliographie à l'appui : "Il y a un lien entre sexualité, longévité et santé. La sexualité apporte du bien-être qui dope le bonheur et retarde le processus du vieillissement." Il précise : "Douze rapports sexuels par mois augmentent de dix ans l'espérance de vie."

Explication ? Les ocytocines - aussi appelés "hormones du câlin" -, libérées par l'orgasme, procurent apaisement, énergie et plénitude. Quant à la sérotonine et la dopamine, que produit le cerveau après l'acte sexuel, elles sont les heureuses messagères du plaisir et de l'euphorie. Plaisir qui libère ensuite la "fée" endorphine. Ce calmant naturel fait disparaître angoisses, stress et tensions. Plus d'insomnies ni de migraines. Adieu douleurs de dos et de la nuque... En prime : une énergie décuplée !

Du même coup, la tension artérielle augmente, apporte un afflux de sang oxygéné et d'hormones aux cellules et rejette mauvais sang et toxines. La stimulation cardio--vasculaire fait alors s'activer coeur et poumons, réduit le taux de cholestérol et brûle les calories. Avec, au moment de l'orgasme, une pointe allant jusqu'à 180 pulsations par minute. Un excellent exercice pour le muscle cardiaque qui doit travailler pour bien se porter, sous réserve de certaines contre-indications (notamment de graves pathologies cardiovasculaires)... Pratiquer le sexe rendrait aussi plus résistant contre toutes sortes de bobos (refroidissements, symptômes grippaux, etc.) et aurait une action extrêmement positive sur les muscles sollicités.

Mais ce n'est pas tout. Pour le docteur Saldmann, "les rapports sexuels réguliers freinent l'apparition de nombreuses maladies, notamment le cancer de la prostate chez l'homme et celui du sein chez la femme ou les affections cardio-vasculaires." "Cela est d'autant plus important, poursuit le spécialiste,que l'incidence de ces dernières augmente avec l'âge quand, justement, l'activité sexuelle diminue."

Grâce aux progrès médicaux qui favorisent, même sur le tard, le maintien d'une sexualité satisfaisante, "les gens reprennent goût à la vie. La sexualité, c'est un devoir de vacances que je prescris à tous mes patients, femmes et hommes, pour les inciter à aller plus vers les autres. Cela donne une autre dimension à la sexualité, moins cérémonieuse, plus détendue, plus gaie", souligne le docteur Saldmann.

Jean-Roger Dintrans, psychiatre et sexologue, chargé de cours à Paris-V, adhère à la prescription : "Mis à part certaines rares personnes qui vivent très bien sans, la sexualité est un formidable moyen d'expression par lequel passent énormément de pulsions et de besoins (affection, plaisir, émotion, humour et possession...) Comme la pratique d'un sport, elle permet de développer également le sentiment de conscience de soi, de renforcer à la fois l'identité et l'altérité."
Mais c'est aussi le seul terrain de jeu de l'adulte. "Dans les jeux des enfants, il y a des éléments constitutifs de l'excitation de la sexualité de l'âge adulte", poursuit-il. Toutefois, prévient Jean-Roger Dintrans, "Il ne faudrait pas que cet hymne à l'amour et cette mélodie du bonheur deviennent une injonction au plaisir et une norme performative."

"Sexe Game Book", par Denyse Baulieu (Assouline, 380 p., 30 €).
"La sexualité est une longue conversation", par Patricia Delahaie (Marabout, 256 p., 15 €).


Mélina Gazsi

A New York, dix ans de psychothérapie


 09.09.11

NEW YORK CORRESPONDANT - A New York, les services spécialisés de l'hôpital Mount Sinai en voient toujours arriver de nouveaux : pompiers, policiers ou sauveteurs, ils ont été appelés à intervenir sur le lieu des attentats d'Al-Qaida, le 11 septembre 2001, ou s'étaient portés volontaires. D'autres, qui habitaient ou travaillaient dans le quartier, ont assisté de leur fenêtre aux sauts dans le vide d'occupants puis à l'effondrement des tours.

Tous viennent là et dans deux autres centres de la ville parce qu'ils restent obsédés par une image, une odeur, une vision, une peur diffuse et récurrente qui les submerge par moments ou hante leurs cauchemars, générant panique ou désespoir soudains, insomnies, etc.

Une équipe médico-psychologique les reçoit et, après examen, décide s'ils entrent ou non dans la catégorie du PTSD 9/11 : le post-traumatic stress disorder, trouble du stress post-traumatique subséquent au choc du 11-Septembre.


Leur prise en charge est désormais budgétée et encadrée par une loi signée le 2 janvier par Barack Obama. Dite "de santé et d'indemnisation", cette loi porte le nom de James Zadroga, premier policier dont le décès, le 5 janvier 2006, à 45 ans, a été officiellement reconnu comme dû à ses interventions à Ground Zero. Les troubles des personnes qui ont consulté sont chez certains apparus quasi immédiatement, chez d'autres des années plus tard.


Rien de neuf pour les spécialistes, habitués à travailler avec des anciens combattants ou des victimes de catastrophes naturelles. Mais la délimitation de ceux qui sont en droit de bénéficier d'une prise en charge spécifique PTSD 9/11 continue de faire l'objet de polémiques.


Comment, en effet, déterminer la part jouée par l'événement dans les manifestations du stress : a-t-il été déclencheur, révélateur ou accélérateur de problèmes préexistants ? Soucieux de préserver les finances publiques, le juriste néoconservateur Theodore Frank avait lancé, en 2008 : "Il ne faudrait pas que les contribuables finissent par payer les psychothérapies de Woody Allen et de la moitié de Manhattan."


En fait, le nombre de ceux qui ont bénéficié d'un traitement particulier est estimé à un peu plus de 10 000, dont 3 600 sont toujours en psychothérapie. Ces chiffres ne tiennent pas compte de ceux qui se sont adressés à des médecins privés ou ont été suivis hors de New York.


Une première étude exhaustive portant sur cette population, réalisée par Yuval Neria, psychologue au département de psychiatrie de l'université Columbia, prend à rebrousse-poil un certain nombre d'idées reçues. Il constate, note Roxane Cohen Silver, du département de psychologie et de comportement social de l'université de Californie à Irvine, une plus grande "résilience" des personnes touchées de près par les attentats du 11-Septembre qu'on ne l'aurait imaginé : "Les trois quarts, dit-elle, n'ont développé aucun symptôme pouvant s'assimiler au PTSD."


Plus globalement, les effets du 11-Septembre sur ceux qui l'ont vécu en direct sont jugés souvent "surestimés", indique la psychologue, qui a coordonné le numéro spécial d'American Psychologist dans lequel est publié cet article.


Elle indique deux données majeures qui ressortent de cinquante études différentes effectuées sur les populations ayant consulté après les attentats : d'une part, la propension à développer le PTSD tient beaucoup à un terreau symptomatique (anxiété, propensions dépressives...), sans que cela soit une règle constante ; de l'autre, les symptômes psychologiques constatés chez les témoins du 11-Septembre sont "très similaires" à ceux relevés chez les anciens combattants. Aucune étude comparative n'a cependant été réalisée incluant des traumatisés du 11-Septembre et des anciens combattants d'une guerre, celle d'Irak par exemple.


Une autre conclusion veut que la "libération de la parole" ne constitue que rarement un remède. Amener un patient intensément stressé à remémorer et "dire" son traumatisme s'avérerait plus susceptible d'accroître fortement son angoisse ou ses tendances dépressives. On notera que cette idée va dans le sens communément prisé aujourd'hui aux Etats-Unis, qui tend à restreindre ou annuler le travail psychologique lié à la parole.


La revue est publiée par l'Association des psychologues américains (APA), dont l'attitude a fait l'objet de vives critiques dans le passé, en particulier lorsque son bureau directeur a autorisé ses membres à participer à des "interrogatoires poussés" - des tortures - de prisonniers.


Cette décision a été abrogée en 2008 et l'APA a réécrit son code éthique en 2010. Une lecture de son numéro spécial 11-Septembre indique cependant que cette association s'inscrit toujours dans une conception "patriotique" de son action et du rôle de ses adhérents. Si un seul article traite directement de l'impact des attentats sur les victimes collatérales, la moitié des autres étudie des sujets peu usuels dans des revues de ce type.


Dans un texte intitulé "L'impact de la science psychologique sur les agences de sécurité nationale après le 11-Septembre", l'auteur, Susan Brandon, rappelle que "les psychologues ont été une partie intégrante des agences de sécurité nationale depuis la première guerre mondiale".


Elle regrette que le 11-Septembre, bien qu'ayant "élevé la prise de conscience quant à l'importance du renseignement humain" dans les services de défense, n'ait pas permis d'"accroître significativement l'impact des psychologues sur les politiques et les pratiques des agences de sécurité ".


D'autres articles s'intitulent "La psychologie hors du laboratoire : le défi de l'extrémisme violent", "Réponses politiques des Américains au 11-Septembre : comprendre l'impact des attaques terroristes et de leurs suites", "Une gestion intelligente des agences de renseignement", etc.


Mme Silver s'étonne que l'on s'étonne. "La psychologie clinique, répond-elle, n'est qu'une division de la psychologie parmi énormément d'autres. Nous avons voulu étudier l'impact du 11-Septembre sur tout le spectre de nos activités, de la psychologie sociale au rôle de la psychologie dans les processus de décision politique. D'où la multiplicité d'articles sur des thèmes politiques et sécuritaires."


Elle-même précise qu'elle "n'est pas une clinicienne" et rappelle qu'elle a été conseillère au département américain de la sécurité nationale. Dans ce numéro spécial, elle signe un article simplement titré : "A quoi s'attendre après la prochaine attaque ?"

Sylvain Cypel


jeudi 8 septembre 2011


7 septembre 2011 



Etre propriétaire de son corps et de son esprit, est une évidence! en est on si sur? Avec les nouvelles lois concernant la psychiatrie, nous sommes tous susceptibles de nous retrouver devant un panel d’individus qui, de part leurs études sur les comportements humains, seront à même de juger d’une pathologie mentale. Les assimilations comportements/maladies mentales me semble dangereuses, quand ceux qui jugent, le font sur des critères purement établis par un collège d’ »experts ». Au nom de la protection, on est en train de materniser l’individu, décidant ce qui est bon ou mauvais pour lui, pourvu qu’il rapporte à la société.



Dans « Les Temps modernes » (1936), Charlie Chaplin ne dénonce pas seulement l’organisation tayloriste du travail. Il anticipe la mise à disposition complète du corps de l’ouvrier au service de la production et la fin de la vie privée. Son personnage en vient à se réfugier en prison pour retrouver paradoxalement une forme d’intimité et de liberté intérieure.
La dernière loi psychiatrique française, le rapport de l’Assemblée nationale sur la prostitution, tout comme le développement des suicides dans l’entreprise, dévoilent l’existence d’un pouvoir maternant avec lequel les individus entretiennent une relation fusionnelle. Nous ne sommes plus dans un société de surveillance. Il ne s’agit plus de contrôler et de modeler les corps, afin de les rendre aptes à la machine économique, mais de s’attaquer à leur être même en fixant les modalités de jouissance des individus.
Quel rapport peut-il exister entre une loi psychiatrique, créant une injonction de soins à domicile, avec un rapport parlementaire visant à pénaliser les clients des prostituées ? [1] Les deux textes opèrent une dissociation du sujet de droit. La propriété de soi est scindée. La jouissance de son corps reste aux mains de l’individu, mais à condition qu’il en fasse un bon usage. L’utilisation doit être conforme à l’image de la dignité humaine, dont les autorités sont le dépositaire légal.

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