Par Romain Imbach Publié le 10 avril 2024
« Le Monde » a recensé les pathologies les plus fréquentes qui ont conduit à des euthanasies en Belgique et aux Pays-Bas et a imaginé le sort de mêmes patients en France si le projet de loi, qui est présenté en conseil des ministres mercredi, était voté.
Le projet de loi sur l’« aide à mourir », dont les grandes lignes ont été dévoilées par Emmanuel Macron en mars, sera présenté en conseil des ministres mercredi 10 avril et arrivera en première lecture à l’Assemblée nationale le 27 mai. D’après le texte, transmis au Conseil d’Etat, l’aide à mourir pourra strictement bénéficier aux personnes remplissant simultanément ces cinq conditions :
- avoir au moins 18 ans ;
- être de nationalité française ou résider en France ;
- être capable de manifester sa volonté « de façon libre et éclairée » ;
- avoir déclaré une maladie grave et incurable engageant son pronostic vital à court terme ou à moyen terme ;
- présenter une souffrance physique ou psychologique « réfractaire ou insupportable ».
Le patient devra formuler sa demande auprès d’un médecin qui, après avoir recueilli l’avis d’un spécialiste et d’un soignant du demandeur, rendra sa décision dans un délai de quinze jours. Le texte prévoit que le patient s’administre lui-même la substance létale lorsqu’il en est capable ou, à défaut, qu’il le demande à une personne de son choix. Le médecin ou l’infirmier présent, chargé de vérifier la volonté du patient, pourra aussi accomplir cette tâche.
Quels sont les enjeux spécifiques du projet de loi français ?
Deux questions importantes se posent à partir des conditions prévues par ce projet de loi : comment définir l’échéance du pronostic vital à moyen terme, et qu’en est-il des directives anticipées, non prises en compte ?
La définition de l’engagement du pronostic vital à moyen terme est centrale pour dessiner avec précision les contours de ce dispositif. Selon que l’échéance est posée à quelques semaines ou à plusieurs mois, les pathologies ouvrant le droit à l’aide à mourir ne sont pas les mêmes.
Mélanie Heard, responsable du pôle santé à Terra Nova, et Martine Lombard, professeure émérite de droit, s’inquiétaient dans une tribune au Monde que l’ambiguïté de la formulation ne vide « la future loi sur la fin de vie d’une grande partie de sa portée pratique », en laissant la responsabilité de l’interprétation aux médecins, qui seront probablement très prudents. D’autres, comme l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), dénoncent cette notion, qui « condamne les patients atteints, par exemple, de la maladie de Charcot, à éprouver les drames des derniers stades d’évolution de la maladie », dont l’évolution est lente mais inéluctable. Des professionnels militent aussi pour une évolution de la loi : « Pour que ceux qui ne veulent pas subir une déchéance physique ou psychique puissent avoir un accompagnement vers la mort », argumentait à la fin de 2023 dans Le Monde la neurologue Valérie Mesnage.